Retour d'expérience : reprendre un 3 étoiles avec un associé

Chagny (71) En mars 2008, Éric Pras succède à Jacques Lameloise. Dix mois plus tard, c'est au tour de Frédéric Lamy d'entrer au capital du restaurant et d'en assurer la direction. Les deux hommes ne se connaissent pas mais l'association s'avère finalement fructueuse.

Publié le 13 avril 2016 à 12:28

Quand, en 2008, Jacques et Nicole Lameloise ont décidé de céder leur affaire triplement étoilée à Chagny (71), ils l'ont d'abord proposée à Éric Pras. "Quand Jacques m'a proposé de prendre sa succession, c'était pour moi un rêve qui se réalisait, confie Éric Pras. Reprendre une maison comme celle-ci, avec cette image liée au Michelin et à la grande cuisine... je le souhaitais mais ne pouvais pas seul." D'où l'arrivée d'un deuxième homme, Frédéric Lamy, dix mois plus tard. Derrière lui, une longue expérience dans la direction de grandes maisons et une entrée au capital de Lameloise qui se fait quasi simultanément. "On n'a pas perdu de temps, s'amuse encore aujourd'hui Éric Pras. Nous nous sommes lancés sans réfléchir, car le feeling est passé immédiatement. C'est seulement ensuite que nous avons appris à nous connaître. Mais il y avait ce bagage professionnel qui était rassurant." Ce que confirme Frédéric Lamy : "Nous ne nous connaissions pas, effectivement, mais nous savions ce que l'autre avait fait, chacun avec dans son domaine : la gestion, les comptes et la direction d'un côté ; la cuisine et l'accueil de l'autre." Cette complémentarité va s'imposer naturellement dans les tâches du quotidien, "et autant par le professionnalisme que la personnalité de chacun".

La recette du succès

Reste que si Frédéric Lamy admet avoir sauté le pas de cette vaste entreprise avec "un brin d'inconscience quand même... voire une folie", lui comme Éric Pras confirment que certains ingrédients, en dehors du bagage professionnel, étaient nécessaires pour mener à bien une telle entreprise. "Il faut avant tout, aimer les défis, note le chef, parce que nous avons pris des risques." Frédéric Lamy renchérit : "Nous avons également eu la chance que la banque nous suive. C'était l'ingrédient incontournable pour que le projet aboutisse." Autre point incontournable : la bonne entente. "Si on en est là aujourd'hui c'est grâce à ça, estime Éric Pras, et je souhaite à tous ceux qui s'associent d'obtenir une telle symbiose." Car s'il y a échanges, prises de conseil, communication entre les deux hommes, "on dépasse même la notion de droit de regard sur ce que l'autre fait : chacun fait entièrement confiance en ce qui est entrepris par l'autre." Certaines décisions appellent toutefois à consultation. "Bien sûr, s'il y a hésitation on en discute, et on consulte également les équipes. La validation se fait ensuite entre nous", précise Frédéric Lamy. Comme ce fut le cas pour le choix d'un piano à induction lors des derniers travaux qui ont nécessité un investissement de 1,8 M€ pour refondre la cuisine et le back office.

Améliorer l'outil et les conditions de travail

Un projet nourri pendant près d'un an et demi et qui aura nécessité deux mois et demi de fermeture. Mais pour Éric Pras comme pour Frédéric Lamy, "c'était devenu impératif". La cuisine avait 34 ans. "Elle avait fait ses preuves, explique le chef, mais nous pouvons aller plus loin dans la minutie et le détail aujourd'hui, tout en améliorant les conditions de travail du personnel. Je voulais qu'en cuisine, l'équipe évolue dans un espace dans lequel elle était bien, avec un réel confort de travail." D'où une réorganisation logistique et technique qui a généré la création de pôles (verrerie, cafèterie, pâtisserie-boulangerie, cuisson, préparation) permettant une grande fluidité dans les services, aucun croisement, une aisance dans le dressage et le moins de pas possible. Autre soin apporté au confort du personnel : la salle de repos, les vestiaires et le réfectoire. Ce que justifie Éric Pras "Quand le personnel est bien dans ses baskets, il fait du bon travail... Notre métier est exigeant, il faut donc ça." Frédéric Lamy admet qu'à travers ce chantier, "nous sommes allés dans le détail. Même si la maison va bientôt souffler ses 100 bougies [en 2021, NDLR], on peut quand même la considérer comme une jeune entreprise pour laquelle 1,8 M€ de travaux dans la cuisine et le back office, ce n'est pas rien : c'est un gros investissement. Un calculateur, un investisseur n'aurait jamais fait ça. Contrairement à une industrie qui peut mesurer la rentabilité de l'investissement, pour nous le retour sur investissement ne sera pas direct et difficilement mesurable. Mais ce que nous avons voulu faire, c'est investir sur la performance." Éric Pras ajoute : "Ce que l'on veut, c'est que le client soit satisfait et revienne."


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Publié par Myriam HENRY



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