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de juin 2003
ON PARLE D'EUX

Saadia Dahoumane

Femme, Algérienne, autodidacte et chef

A 50 ans, elle a mis le pied en France pour la première fois pour une escale trop courte au restaurant La Réserve, Sofitel Palm Beach de Marseille où elle a proposé des plats algériens.


Saadia Dahoumane - "La cuisine algérienne demande tellement de travail qu'elle est une affaire de femmes."

La réalité dépasse la fiction. C'est le cas de Saadia Dahoumane, autodidacte de 50 ans, qui, à force de patience et de travail, s'est hissée au rang de chef oriental au restaurant El-Mordjane, Sofitel Alger. Elle en éprouve une légitime fierté, même si elle la dissimule sous une grande pudeur et, aussi, une dose d'ironie qui lui fait affirmer que "la cuisine algérienne demande tellement de travail qu'elle est une affaire de femmes". Cette version soft du féminisme lui fait évoquer, à demi-mot, le mariage obligé des jeunes femmes, dont le sien, à 16 ans. Et lui fait encore affirmer que, dans son pays, il y a plus de chômeurs chez les hommes que chez les femmes et que les médias (occidentaux, NDLR) racontent des histoires fausses sur le statut des Algériennes. "Chez nous, à l'exception de régions reculées, c'est comme en France." Pourtant, elle, qui porte le foulard islamique, concède : "Il n'est pas question pour une jeune fille de s'habiller d'une jupe de 20 cm de long devant son frère. Dans un pays musulman, il y a quelques règles à respecter."
Retour en arrière. Saadia naît à Azzazga, zone industrielle de Kabylie. Elle est le 9e enfant d'une tribu de 11. Elle n'ira jamais à l'école, découvrira l'alphabet français avec sa belle-sœur, et apprendra à lire et à écrire seule. Elle a le premier de ses 5 enfants à 17 ans. Pour gagner sa vie, elle cuisine pour des traiteurs. "Tout a démarré comme ça." A 38 ans, elle entre comme commis de cuisine au Saint-Georges (El-Djair), l'un des palaces d'Alger. "Je savais cuisiner, mais il fallait passer par la première marche de la hiérarchie." 3 ans après, elle devient chef de partie du restaurant oriental, et en profite pour observer les méthodes de la gastronomie française et s'en inspire. Après un passage à El-Aurassi, hôtel de 500 chambres, elle entre au Sofitel en 1996. Elle est 'dégradée' au rang de demi-chef de partie, ce qu'elle comprend. "C'était normal, les normes Sofitel sont draconiennes. Je savais que, tôt ou tard, je grimperais dans la hiérarchie." Elle tâte à tous les types de cuisine, gastro, orientale et coffee-shop. Elle remarque : "J'avais un chef formidable qui m'a appris à travailler..." Elle reçoit une formation de formateur, et ne tarde pas à reprendre son rang de chef de partie puis à devenir sous-chef junior. Enfin, en 2002, elle est nommée chef oriental. Son avenir ? Il se résume en un mot : travail. Bien entendu, elle rêverait d'avoir les moyens de se payer un petit restaurant. Autre rêve, plus à sa portée, celui d'écrire un livre ou de participer à des revues pour faire connaître et reconnaître la cuisine algérienne, "à la fois fine, inventive, aux multiples facettes..." Pour une autodidacte, ce serait une revanche !
Dominique Fonsèque-Nathan zzz18p

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