Enquête Patrice Tereygeol connaît bien la capitale russe où il est arrivé, il y a 10 ans. Il envisage maintenant de se lancer à son compte et fait le point sur le marché en Russie.
Pierre Boyer
Patrice Tereygeol, originaire de Blanzat dans le
Puy-de-Dôme, cuisine pour les Moscovites depuis 10 ans. Il a commencé son périple russe
chez Potel & Chabot, comme beaucoup d'autres chefs français venus à Moscou. C'était
en 1991. Puis il a pris la direction des cuisines du restaurant Yakor, spécialisé dans
les fruits de mer et les poissons. Après une courte interruption, il est revenu pour
faire du tex-mex à l'Azteca. En 1995, il rejoint Arcadie Novikov au Club T, un des grands
restaurants de gastronomie française de la capitale russe. Fin 2000, il participe au
lancement du restaurant Koumir Michel Troisgros. L'association s'est terminée en mai
dernier, mais Le Koumir existe toujours, et le chef auvergnat poursuit sa collaboration
avec Arcadie Novikov, propriétaire du Club T et de 31 autres restaurants à Moscou,
chacun d'un style très particulier. Ils ont ouvert Biscuit en novembre dernier. "C'est
le dernier restaurant à la mode à Moscou, ça marche très fort", souligne
Patrice Tereygeol.
Patrice Tereygeol : "Nous vendions
beaucoup de grands crus et de cognac haut de gamme avant la crise de 1998. Maintenant,
cela arrive moins souvent."
1 million de dollars
Il envisage de lancer sa propre affaire bien sûr... "Il faut compter 1 million de
dollars pour 80 places environ." Comme il ne dispose pas d'une telle somme, il
lui faut des partenaires russes.
"Les temps ont évolué depuis 1995. Il était alors possible de récupérer son
investissement de départ en 6 mois. Pour les businessmen russes, il fallait que les
affaires rapportent rapidement. Les prix étaient élevés dans la restauration : pas
moins de 100 dollars par personne dans un établissement quelconque. Mais la crise de 1998
(1) est passée par-là. Beaucoup de restaurants ont fermé ; les autres ont baissé leurs
prix pour revenir à des niveaux plus raisonnables", explique Patrice Tereygeol. "Les
clients, hommes d'affaires, politiques, banquiers dépensaient sans compter. Ils ont
appris à comparer. Et si c'est reparti, le niveau d'avant 1998 n'a pas été
retrouvé." Donc, il faut plus de professionnalisme et plus de moyens pour
réussir.
Mais Patrice Tereygeol n'est pas un novice. Il a lancé un night-club, il y a 2 ans, avec
5 associés, 2 Moscovites et 3 Français. "Les Russes sont indispensables, pas du
tout pour des raisons de sécurité, mais pour les rapports avec les administrations, trop
tortueuses ou brumeuses pour quelqu'un qui ne maîtrise pas la langue." Baptisé
le Bouddha Bar, la boîte de nuit a dû changer de nom. La mairie de Moscou, le ministère
des Affaires étrangères l'ont demandé fermement. L'ambassade de Thaïlande avait
protesté contre l'utilisation du nom de Bouddha pour une discothèque. "Nous
avons laissé un premier courrier sans réponse. Mais une commission quelconque,
dépêchée sur les lieux, a insisté, sinon elle allait trouver un prétexte pour fermer
la boîte", raconte le chef. C'est donc devenu le Karma bar. Les bénéfices
d'exploitation sont réinjectés dans l'entreprise. "Nous voulons développer la
restauration dans la discothèque et ouvrir plus tôt. Les évolutions vont dans le bon
sens, sauf pour la circulation en ville, aujourd'hui un vrai cauchemar. Nous trouvons des
légumes et des fruits locaux. Les salades se développent aussi, comme poireaux et
épinards. Mais artichauts, fenouil, asperges ne sont pas connus ici. Il n'existe pas non
plus de production de bœuf à viande, pas de filière locale pour le poisson frais.
Donc une grosse partie de nos produits reste importée." Enfin, Patrice Tereygeol
a noté une belle progression des Russes derrière les fourneaux. "Encore quelques
années et les meilleurs d'entre eux vont atteindre de très bons niveaux." n zzz99
(1) La crise d'août 1998 : la monnaie russe s'est effondrée ; le dollar est passé de 6 à 30 roubles.
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Accor s'intéresse
à la Russie
Restaurants de rêve, Arcadie Novikov ne
duplique pas ses concepts
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L'Hôtellerie n° 2794 Magazine 7 Novembre 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE
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