Actualités

wpe289.jpg (754 octets)Enquête

Vache folle

Les Français n'ont plus peur

Enfin une bonne nouvelle : dans les restaurants, la crise de la vache folle serait terminée. Dans les établissements que nous avons interrogés, depuis janvier 2002, la vente de viande de bœuf est en progression.

Bernadette Gutel

Doc. Puigrenier

Depuis janvier 2002, les consommateurs retrouvent le plaisir de déguster de la viande de bœuf au restaurant.

Les consommateurs aujourd'hui ne se posent plus beaucoup de questions sur l'ESB, mais s'intéressent à la qualité de la viande de bœuf, aux différentes races, et cherchent à reconnaître les morceaux. Il suffisait de s'approcher de l'un des kiosques d'information installés courant février dans les gares parisiennes et animés par le CIV (Centre d'information des viandes), ou de participer à l'une des séances de dégustation de viandes, organisée également par le CIV au Salon de l'Agriculture, pour le constater. Les participants étaient nombreux, curieux d'en savoir plus sur les labels de qualité et sur les saveurs de la viande. Peu de questions sur l'ESB. Les efforts déployés par la filière viande pour redonner confiance au Français, et la politique d'information menée par le CIV, se révèlent aujourd'hui payants. Au moment de la crise, en octobre 2000, certaines chaînes de restaurants spécialistes de la viande ont vu leur taux de fréquentation chuter de plus de 20 %. Les clients sont revenus dès novembre 2000, mais la baisse de fréquentation aurait atteint 12 à 15 % en 2001 par rapport à 2000. Depuis le premier trimestre 2002, la fréquentation est à la hausse et tend à redevenir proche d'avant la crise.
McDonald's, qui offre le produit considéré comme le plus 'suspect' au moment de la crise, annonce même que ses ventes de steaks hachés ont progressé de 4 % en 2001 par rapport à 2000 (il faut cependant tenir compte des ouvertures), et que les résultats McDonald's France repassent en positif depuis le début de l'année. "En janvier 2002, nous confiait Pierre Cassagne, directeur général de la chaîne Hippopotamus à l'époque, dans nos menus parents et nos menus enfants, les statistiques montrent que nous avons vendu autant de viande de bœuf et de steaks hachés en janvier 2002 (à 0,3 % près) qu'en 2000 avant la crise. Il aura fallu 18 mois pour regagner la confiance après la seconde crise, alors que 5 mois avaient suffi après celle de 1996. Je suis serein pour l'avenir. La viande est maintenant un produit bien sécurisé."

Doc. McDonald's

McDonald's a expliqué à ses clients pourquoi ses steaks hachés 100 % muscles peuvent être consommés sans crainte.

Dans les restaurants La Boucherie, Bertrand Baudaire, p.-d.g., affirme également "avoir retrouvé les chiffres d'avant la crise. Nous avons confiance en l'avenir car, après avoir ouvert 25 établissements en l'espace d'une dizaine d'années, nous allons en ouvrir 6 à 8 autres prochainement, dont la mise en route a commencé en pleine crise de la vache folle".
Les restaurateurs indépendants qui offrent une carte variée comme Le Médicis à Blois ont noté des baisses de consommation de viande de bœuf de l'ordre de 20 %. "Aujourd'hui, confie Christian Garanger, son propriétaire, je vends autant de filets de bœuf qu'avant la crise, soit 16 filets pour 60 couverts." Quant à Jacques Crossard de l'Hôtel de la Paix au Mont-d'Or, il n'a ressenti aucune baisse. "J'ai toujours fait de la Salers, explique-t-il, filet, pavé et faux-filet. C'est la viande préférée de la région, les gens savent comment les animaux sont élevés et ont toujours eu confiance."

Viande de bœuf d'origine française, des mesures sérieuses

"En 2000, explique la direction d'une importante entreprise d'abattage et de découpe de viandes, l'ensemble des mesures prises par la filière viande pour sécuriser la viande de bœuf en France a fait augmenter le prix de 0,73 e net par kg de viande. Résultat, nous avons perdu des parts de marché importantes à l'exportation, car les viandes allemandes ou italiennes non soumises à de telles mesures étaient moins chères. Aujourd'hui, les viandes de bœuf françaises sont reconnues saines, et les exportations ont repris car chacun sait qu'en France les contrôles sont effectués sérieusement par des laboratoires externes indépendants, ce qui n'est pas toujours le cas dans certains autres pays européens. Nous avons perdu 6 % de CA en 2001 par rapport à 2000 au lieu de 10 % comme nous l'avions prévu, et nous constatons une reprise depuis janvier 2002.
De plus, il faut savoir qu'aucun pays européen ne fabrique le steak haché garanti 100 % muscles comme nous le faisons en France. La consommation de viande hachée est cependant restée inférieure en 2001
de 15 % par rapport à 2000.
"


Dans ce document, le CIV recense toutes les mesures prises en France pour sécuriser la viande de bœuf.

Communiquer sur la qualité
Pour faire face à cette chute de fréquentation et pour continuer à satisfaire leur clientèle, les restaurateurs ont dû mettre en place des plans d'action. Les mesures prises concernent la communication avec la clientèle, la modification de la carte et des menus, le choix de viande de race... Ces mesures perdurent à l'heure actuelle et seront pour la plupart maintenues dans l'avenir. "Chez McDonald's, explique Etienne Haussedat, directeur de la communication, nous avons décidé de communiquer avec nos clients par le biais des médias, par Internet, et en distribuant des informations dans nos restaurants. Nous avons expliqué que notre steak haché est sain car garanti 100 % muscles. Nous avons raconté comment les 32 abattoirs, tous situés en France et avec lesquels nous travaillons, pratiquent pour éliminer sérieusement les MRS (Matériels à risques spécifiés). Nous avons précisé que McDonald's, ses produits et ses restaurants, sont soumis à des contrôles effectués à l'improviste par un organisme de contrôle extérieur indépendant et agréé. Nous avons mis en place un numéro vert pour expliquer à nos clients les garanties du 100 % muscles. Nous avons participé pour la première fois au Salon de l'Agriculture en 2001, nous y sommes retournés en 2002, et nous y retournerons chaque année. Nous voulons faire connaître notre démarche qualité à propos de la viande et de tous les autres produits que nous proposons à nos clients. Nous avons également lancé un CrocMcDo au jambon destiné aux enfants dont les mamans refusaient de leur faire manger du steak haché. Et nous avons lancé en avril 2001 le 280, le plus gros sandwich de notre offre avec 150 g de bœuf pour montrer combien nous avions confiance en nos steaks hachés, mais pour soutenir également la filière viande. Nous allons continuer à communiquer sur notre politique de qualité. Il ne faut pas s'arrêter là. Nous avons bien compris l'intérêt d'être plus proches de nos clients."
Dans la chaîne de restaurants La Boucherie, dont la plupart sont situés en province, Bertrand Baudaire a également choisi de communiquer sur la qualité de la viande qu'il sert à ses clients : "Nous avons voulu regagner la confiance de nos clients en leur faisant savoir comment nous achetons et découpons la viande. Nous leur avons garanti que nous n'achetions que des arrières français et que nous les découpions dans notre propre atelier. Nous leur avons aussi expliqué l'importance du temps d'affinage pour une viande, affinage que nous réalisons dans notre propre centre d'affinage. Tout ceci rassure nos clients plus qu'un contrat ou un cahier des charges. J'envisage d'en rédiger un bien précis, mais il me semble que les consommateurs préfèrent un climat de confiance plutôt que des normes." Quant à Hippopotamus pour informer ses clients, il leur distribue un livret intitulé Les secrets de la bonne viande.

Doc. Hippopotamus

Choix multiples et races à viandes
Pour faire face à la crise, Bertrand Baudaire a également pris la décision d'ajouter à sa carte de la volaille, du mouton, du porc, de l'andouillette. "Aujourd'hui, commente-t-il, notre carte comprend 75 % de bœuf, mais nos clients en consomment 85 %. Près de 9 clients sur 10 choisissent parmi l'entrecôte, le faux-filet, l'onglet ou le steak. Nous allons donc nous recentrer sur la viande de bœuf." Dès l'automne 2000, Hubert de Rostolan, directeur général de la chaîne de restaurants Chez Clément, a pris deux décisions. La première a été de proposer trois offres rôtisserie au lieu d'une : l'offre de base composée de viande de bœuf, de poulet et de travers de porc, et deux variantes dans lesquelles la viande de bœuf a été remplacée par du canard ou du saumon. La deuxième décision a été de faire signer, par tous les établissements de la chaîne, le Contrat de transparence proposé par la filière viande bovine française, de le faire savoir en indiquant le logo Contrat de transparence sur la carte, et en plaçant des affichettes explicatives sur les tables. En été, il a supprimé le tartare de sa carte. "Nous avons constaté, analyse Hubert de Rostolan, que notre nouvelle offre rôtisserie avait fait grimper les quantités vendues dans cette famille de plats, et que la baisse de la consommation de bœuf a été compensée par le canard et le saumon. Les consommateurs, d'une façon générale, ne pensent plus à l'ESB. Cependant, nous avons conservé les 3 formules rôtisserie et nous avons ajouté des grandes assiettes, des risottos... pour offrir une solution de repli à ceux qui ne veulent pas manger de bœuf. Le Contrat de transparence a bien rassuré nos clients, mais, si nous continuons de nous approvisionner ainsi, nous allons arrêter de communiquer dessus car tout est rentré dans l'ordre. Quant au retrait du tartare de notre carte d'été, ce fut une erreur. Nous avons dû le mettre en plat du jour permanent, et ça marche de nouveau." Dans les restaurants Hippopotamus, pour rassurer et retenir les clients, on a d'une part précisé la race de la viande utilisée pour faire les steaks hachés et les tartares, et d'autre part, inscrit à la carte des plats sans viande de bœuf. Suite à la deuxième crise de la vache folle, la carte contient désormais 15 plats sans viande de bœuf, ce qui représente 50 % de l'offre. Néanmoins, aujourd'hui, Hippopotamus vend autant de viande de bœuf qu'avant la crise.


Sur sa carte, Hippopotamus a précisé la race de la viande utilisée pour réaliser son tartare.


Chez Clément propose désormais 3 offres rôtisserie : 1 avec bœuf et 2 autres avec canard ou saumon.

La garantie de la traçabilité
Dans son restaurant gastronomique Le Médicis à Blois, Christian Granger a également modifié sa carte. Il propose aujourd'hui 3 volailles au lieu de 2, mais seulement 2 viandes de bœuf au lieu de 3 (filet et joue), et cette viande est du Charolais. "Avec la chambre d'agriculture, explique-t-il, j'ai organisé un immense barbecue pour 130 personnes à la ferme de Motteux à Ouchamps. Notables, journalistes et clients ont été ravis de se retrouver dans une ferme, et les retombées médiatiques et commerciales ont été nombreuses." Bien que les consommateurs paraissent désormais rassurés, les restaurateurs sont de plus en plus nombreux à proposer ou à vouloir proposer de la viande de bœuf de qualité et de traçabilité garantie. "Nous avons constaté cette nouvelle approche lors de notre participation au salon Equip'Hôtel 2001, explique Frank Samoyau, directeur général des Boucheries de l'Ile-de-France. Nous avons reçu beaucoup de professionnels très intéressés par la traçabilité que nous assurons, et notre sélection de viandes haut de gamme (Black Angus d'Irlande, Bœuf Normand...)." n zzz44s zzz44o

Allemagne : Bovins mal testés mis sur le marché

"Un laboratoire qui teste sans autorisation, d'autres qui ne déclarent pas les cas suspects, et des semaines, voire des mois qui s'écoulent avant que l'on retrace où est partie la viande suspecte : encore une fois, l'Allemagne se distingue par une accumulation de négligences inquiétantes en matière de dépistage de l'épidémie de vache folle. Des dizaines de milliers de bovins incorrectement testés ont été mises sur le marché allemand ou international ces derniers mois - dont une partie encore non déterminée a été consommée. Au moins 18 000 demi-carcasses et quartiers de bœuf ont été exportés vers la France, l'Espagne, les Pays-Bas, l'Autriche, la Grèce... Il y a de quoi s'inquiéter, sachant qu'un certain nombre de premiers tests ont été positifs ou équivoques, et que l'Allemagne en est à 151 cas déclarés de vache folle. C'est aussi un manquement majeur à la règle européenne de dépistage systématique imposée depuis janvier 2001 à tous les bovins de plus de 30 mois." (d'après Lorraine Millot - Libération du 14 février 2002).
On comprend pourquoi la viande allemande est meilleur marché que la viande française !

 

Restauration scolaire et viande de bœuf

D'après une étude réalisée par Sylab-Ypsis en décembre 2001, 1 commune* sur 5 n'a toujours pas réintroduit la viande de bœuf dans les restaurants scolaires. C'est la raison pour laquelle 11 % des élèves ne consomment pas de viande de bœuf à l'heure du déjeuner. Les freins viennent surtout des parents d'élèves vivant en ville ; ils connaissent mal les conditions d'élevage des bovins et restent interrogatifs sur la réintroduction de la viande dans le scolaire. Les garanties apportées par la traçabilité ont été le moteur déterminant de la réintroduction de la viande dans les autres établissements.

*Communes de + de 20 000 habitants.

Article précédent - Article suivant


Vos commentaires : cliquez sur le Forum de L'Hôtellerie

Rechercher un article : Cliquez ici

L'Hôtellerie n° 2767 Magazine 2 Mai 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

L'Application du journal L'Hôtellerie Restauration
Articles les plus lus...
 1.
 2.
 3.
 4.
 5.
Le journal L'Hôtellerie Restauration

Le magazine L'Hôtellerie Restauration