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Jean-Marc Banzo, Le Clos de La Violette à Aix-en-Provence

Cuisiner pour donner du plaisir

En mars 1999, le Guide Rouge attribuait 2 étoiles à Jean-Marc Banzo, Maître cuisinier de France à Aix-en-Provence. Juste reconnaissance du talent, du travail, de la passion d'un homme qui a su forcer le destin depuis plus de 20 ans pour faire la cuisine qu'il aime.

m Patricia Alexandre Le Naour

Certains diront que c'est le destin qui a mené Jean-Marc Banzo à cette réussite. Ce serait sans compter avec la volonté dont il a fait preuve à tous les moments de sa vie pour forcer son destin. Son parcours le montre, ô combien.
Rien ne prédestinait ce fils de gendarme à devenir un grand chef de cuisine. C'est pourtant tout au long de sa carrière ce pour quoi il s'est battu. Elève sérieux, attentif, plutôt doué, Jean-Marc a 17 ans et a déjà terminé ses études à l'école hôtelière Lesdiguières à Grenoble. C'est tout naturellement qu'il intégrera à sa sortie la brigade d'un grand nom de la cuisine de l'époque : celle d'un 2 étoiles Michelin (déjà !), Roger Roucou. Jean-Marc se passionne pour ce métier difficile, beaucoup plus dur qu'aujourd'hui, et veut continuer à apprendre. Il bouge, c'est la tradition en cuisine, et part, le temps d'une saison, à Grimaud, Aux Santons, en attendant de rejoindre la brigade de Roger Vergé au Moulin de Mougins. Parce qu'il va trouver en Claude Girard un maître, il restera beaucoup plus longtemps et préviendra Roger Vergé qu'il n'ira pas chez lui... "C'est Claude Girard qui m'a donné la passion de la cuisine", explique-t-il encore aujourd'hui. Le temps passe et Jean-Marc continue son tour de France ; il sait qu'il doit continuer à apprendre. Plusieurs expériences, certaines plus heureuses que d'autres, le mèneront à Narbonne, à Lille, à Vaison-la-Romaine, à Avignon, jusqu'à ce jour où, en route pour prendre le poste de sous-chef au Juana (à l'époque Alain Ducasse y était chef), il fait une halte à Aix-en-Provence et... lit L'Hôtellerie. Une annonce changera le cours de sa vie : "Restaurant centre-ville, de caractère, belle clientèle, idéal pour jeune couple." Jean-Marc vivait depuis peu avec Brigitte, il avait alors 24 ans, et eut dès lors la sensation que cette annonce ne s'adressait qu'à lui. Immédiatement, il se présenta... Le courant allait immédiatement passer entre le vendeur et un acheteur qui n'avait pas un sou en poche, pas de parents susceptibles de l'aider et aucune connaissance dans les milieux financiers. Séduit par la passion du cuisinier, par sa jeunesse, le vendeur fit une proposition de gérance pour lui donner du temps, mais il fallait tout de même en 6 mois trouver l'argent de la caution. Une somme qui, avec un salaire de cuisinier, était absolument impossible à trouver. Sûrement parce qu'il faut être un peu fou, parce qu'il faut avoir des rêves pour avoir la possibilité de les réaliser un jour, Jean-Marc, conscient de cette réalité, accepta tout de même de signer cette promesse d'achat... Il allait s'ensuivre des mois de porte-à-porte, de refus, de déprime, jusqu'au jour où le miracle se produisit. Sortant dépité d'une banque qui venait une fois de plus de lui refuser un prêt, il croisa le père d'un ami d'enfance, qui avait toujours apprécié le sérieux du garçon à l'époque. Discussion, étonnement : "Que fais-tu là ?", lui demande-t-il. "Je cherchais de l'argent, mais on n'a rien voulu savoir", répond le jeune homme. Curiosité du père de l'ami, il veut en savoir plus, et est séduit par la folie, la pugnacité de ce garçon qui n'a que sa passion, son courage et son travail à donner en caution. C'est lui qui prendra les choses en main, mettra les premiers francs pour rassurer les banques et interviendra à titre personnel pour qu'un prêt soit débloqué.

1983, une première étoile
C'est grâce à cette rencontre incroyable, au bon sens et à la générosité de cet homme, que Brigitte et Jean-Marc Banzo se retrouvaient dans la maison qui allait les lancer, dans la maison où leur fille allait naître, Les Caves Henri IV, au cœur d'Aix-en-Provence. Ils y resteront 5 années, le temps de s'installer, et en 1983, de se voir attribuer une première étoile au Guide Rouge. La maison devient trop petite, ils cherchent un peu d'espace pour donner davantage de confort à leurs clients et pour pouvoir mieux harmoniser leur vie de famille avec leur vie professionnelle. Ils veulent vivre à proximité de leur restaurant, voir leur fille grandir. C'est là encore par hasard qu'ils trouveront le Clos de La Violette, l'habitation d'un client qui cherchait à la céder... En 1986, ils transformeront cette maison en restaurant, et depuis, ne cesseront jamais d'y investir beaucoup d'argent. Locataires pendant presque 10 années, ils rachètent les murs il y a 6 ans, refont les cuisines, agrandissent les espaces de réception, améliorent le confort de leurs clients, et installent un jardin.
Juste retour des choses, en 1999, Le Clos de La Violette se voyait attribuer une seconde étoile au Guide Rouge. Consécration, bien sûr, émotion, mais aussi humilité. Ce n'est pas au milieu d'une pluie de paillettes qu'il fêtera ce moment extraordinaire, mais c'est au CFA, avec les élèves et les enseignants, que Jean-Marc Banzo ira fêter cette consécration : "Je voulais montrer aux jeunes que la passion permettait beaucoup de choses, je voulais leur donner espoir." Quel beau message, quel symbole fort, empreint de générosité. Jean-Marc Banzo a dû faire preuve chaque jour de dureté, de résistance pour arriver à ce résultat. Plusieurs fois, les fins de mois ont été difficiles, très difficiles, mais la passion, le courage et le talent ont été les plus forts.
Aujourd'hui, Jean-Marc Banzo est installé dans une belle maison bourgeoise à quelques pas de la Villa Gallici, Relais & Châteaux, et Le Clos de La Violette est d'une grande sobriété. De l'espace, de la lumière, un décor chaleureux, le client a tout simplement l'impression, quand il arrive, d'être attendu chez des amis. Installé à Aix-en-Provence depuis 20 ans, Jean-Marc a laissé sa passion le modeler pour que sa cuisine atteigne aujourd'hui un niveau remarquable. Sur une culture gastronomique très classique, parfaitement maîtrisée, il se plaît chaque jour à imaginer ce qu'il appelle les "collisions aromatiques", un mariage de goûts qui, au lieu de se tuer, de se neutraliser, se fondent pour justement mieux encore se magnifier. Il aime à créer les contrastes, à trouver les déséquilibres qui mettent mieux en valeur la subtilité des saveurs.

Enfant de la Méditerranée
C'est au quotidien que Jean-Marc Banzo vit son aventure gastronomique comme il se plaît à définir sa manière de cuisiner. La cuisine est pour lui une passion qui le fait vibrer depuis plus de 20 ans maintenant quand, chaque jour, il travaille les produits qu'il a choisis. Parce que l'homme est empreint de tout ce que la Méditerranée a de fort, de chaleureux, de subtil, mais aussi d'exigeant, Jean-Marc Banzo plonge dans ses racines pour chercher son chemin, la voie des mariages des produits, des associations de techniques pour que des goûts nouveaux apparaissent avec encore plus de délicatesse et de subtilité, "mais toujours pour que ce soit bon, très bon", précise-t-il.
Influencé dans ses goûts par son histoire, une mère italienne, un père espagnol, lui-même né à Vaison-la-Romaine, Jean-Marc Banzo se plaît à évoquer les odeurs de la cuisine de sa grand-mère en Tunisie, les premiers plaisirs gustatifs, les premiers étonnements gastronomiques, grâce à cette cuisine de femmes, à cette cuisine du cœur. Pour lui, la cuisine méditerranéenne, c'est justement le mariage de toutes ces sensations. Sa cuisine a forcément les accents du grand Sud, du soleil, car il utilise les produits de la région, tant ceux de la terre que de la mer, il se plaît à les associer d'une façon toujours forte et subtile.
Homme de passion, il cherche constamment à découvrir ce que les produits ont d'exceptionnel à travers des mariages étonnants mais toujours harmonieux. "Je veux rester en accord avec mon pays, avec mon environnement, préserver et servir les produits que je travaille pour toujours apporter aux gens pour qui je cuisine du bonheur, toujours plus de bonheur." n

Le Clos de La Violette
10, avenue de La Violette
13100 Aix-en-Provence
Tél. : 04 42 23 30 71
Fax : 04 42 21 93 03


En 1999, Le Clos de La Violette se voyait attribuer une seconde étoile au Guide Rouge.

A la carte

Menu déjeuner
300 F

Menu dégustation
600 F

Carte des vins
Très riche en vins de la région, cassis, coteaux d'aix-en-provence, bandol, palette, côtes de provence

A déguster
w Queues de langoustines rôties tortellinis fourrés au corail, lait de pince en cappuccino
w Gros calisson aux amandes, crème mousseuse à l'Amaretto

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L'HÔTELLERIE n° 2721 Magazine 7 Juin 2001


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