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Un chef pâtissier comblé

Sylvain Mathy au Majestic de CannesA 27 ans, Sylvain Mathy occupe déjà depuis quelques mois le poste de chef pâtissier au Majestic. Mordu de pâtisserie de restaurant depuis ses tous débuts, le Caladois a su se faire apprécier du chef du palace cannois, Bruno Oger.

Les chefs pâtissiers des grands établissements restent encore le plus souvent dans l'ombre. Et pourtant, leurs compétences contribuent à la renommée de leur établissement. Bruno Oger, le chef de la Villa des Lys, le restaurant du Majectic de Cannes, l'a bien compris. Cet homme sait s'entourer. Qu'il s'agisse de cuisine, de sommellerie ou de pâtisserie, le jeune chef de la Croisette recrute en fonction du talent, mais également de tout un état d'esprit. Dans son équipe, la communication est aussi importante que la créativité. Comme lui, Sylvain Mathy, qu'il a nommé chef pâtissier, est de ceux qui donnent la parole à chaque membre de son staff, tout en leur inculquant une foi véritable dans le métier. La brigade se rencontre volontiers, selon un rythme bien établi où la rigueur est de mise. De quoi cadrer les mariages les plus fous qui tiennent tant à cœur au nouveau chef pâtissier.
Né à Villefranche-sur-Saône (Rhône), Sylvain Mathy investit très vite la cuisine familiale pour y préparer des gâteaux d'anniversaire pour une quarantaine de personnes. Il faut bientôt trouver une autre solution, et c'est chose faite lorsque Sylvain rend visite à Paul Koeberlé, la référence du Rhône. Meilleur ouvrier de France, celui-ci accepte de l'accueillir pour l'été 1988. Et c'est la révélation. Peu importe d'embaucher à cinq heures du matin lorsque l'on réalise son rêve. Et pendant la coupure de l'après-midi, Sylvain ne se lasse pas des décorations au cornet et des fleurs en pâte d'amandes... Son CAP en poche, Paul Koeberlé l'engage en juillet 1989 comme apprenti pâtissier. Les deux hommes se vouent déjà un respect et une affection réciproques. "Mon père spirituel m'a consacré un temps irremplaçable en termes d'expérience. Il avait le don de la pédagogie tout en réalisant parallèlement des choses extraordinaires."

Le culte au chocolat

C'est d'ailleurs Paul Koeberlé qui pousse Sylvain à suivre un stage de perfectionnement d'un an, à la pâtisserie traiteur Pignol à Lyon. "Un dépaysement total sur le plan technique, définit aujourd'hui Sylvain. Je passais d'une équipe de cinq à une brigade de vingt personnes, extrêmement hiérarchisée. La transition fut rude, surtout en quittant le giron de Paul Koeberlé. J'ai appris à encaisser, à me blinder face aux réflexions et à une ambiance de jalousie et de rancœurs. Je reconnais malgré tout que cet apprentissage à un rythme soutenu m'a été fort utile lorsque je suis rentré au Majestic." Sur une année, il passera du four aux petits gâteaux pour terminer par un trimestre en glacerie-chocolaterie. Il participe également - à raison de douze heures par jour - aux JO d'Albertville pour lesquels la maison Pignol assure la pâtisserie. A la même époque, il se qualifie au concours de Meilleur apprenti de France. En septembre 1992, toujours à Lyon et toujours sur le conseil de Paul Koeberlé, il intègre l'équipe des chocolatiers de la maison Bernachon, où il prend notamment en charge la confection des moulages de Pâques. Sylvain voue déjà un véritable culte au chocolat. "J'ai appris à maîtriser le chocolat de A à Z. Je travaillais la fève de cacao, je la broyais, je la torréfiais... C'est là aussi que j'ai appris les goûts forts qui me permettent de jouer aujourd'hui sur une palette de nuances et de contrastes avec un maximum d'originalité et aussi de sécurité dans les rapprochements."

Le dessert à l'assiette comme mode d'expression

Armée oblige, Sylvain effectue son service militaire, et à sa sortie, il accepte le lancement d'une boulangerie-pâtisserie dans l'Ain. Mais il est désormais déterminé à intégrer un poste en pâtisserie de restaurant de haut niveau. "J'étais de plus en plus attiré par le dessert à l'assiette où j'arrive davantage à m'exprimer. En pâtisserie au détail, un saint-honoré reste un saint-honoré traditionnel. En restaurant, on peut laisser aller son imagination en déco, même si la composition de base ne varie guère. Des choux, certes, mais en volume, en forme de cage par exemple, accompagnés d'une glace à la vanille, ou d'un coulis de noisette, ou encore d'une sauce légère au Grand Marnier..." C'est encore grâce à Paul Koeberlé - qui s'est beaucoup entretenu avec Bruno Oger - que Sylvain rencontre le chef en plein festival de Cannes. Quinze jours plus tard, les portes du Majestic s'ouvrent à lui. "Comblé sur tous les plans, commente Sylvain, je rentrais dans un palace comme chef de partie, avec un esprit comme j'en avais rêvé, et face à la mer : un cadre de vie de rêve !" Cinq ans plus tard, le jeune homme est promu chef pâtissier, un poste qui n'existe pas à part entière. Un responsable du tour en avait exercé la charge pendant vingt-huit ans.

Une organisation pensée

Côté pâtisserie, l'organisation est ferme. En tenant compte de la fermeture annuelle - 15 novembre/25 décembre - la Villa des Lys propose trois cartes. Parallèlement à une réunion mensuelle qui fédère cuisine et pâtisserie, Sylvain soumet huit propositions et une suggestion au chef cuisinier, en accord avec ses orientations, chaque quinzaine. Alors qu'une ou deux propositions se trouvaient refusées dans les débuts, c'est aujourd'hui l'intégralité qui est retenue. Sylvain a lui-même aiguillé son second, Jean-Baptiste Priolet, 27 ans, sur les goûts du chef. Selon lui, Bruno Oger exige que le client sache ce qu'il mange, même s'il lui accorde une totale confiance. A partir de là, Sylvain peut jouer les contrastes (moelleux-craquant, douceur-amertume...) usant couramment du chaud-froid. "Le contraste ne doit pas être un choc. J'exclus par exemple les couples farfelus, du style chocolat-fruits." L'équipe reprend souvent un dessert qui a plu, parfois sans le modifier, comme la Brioche perdue à l'orange (segments caramélisés et sorbet agrume), présente sur la carte de printemps, parfois en l'adaptant à la saison, comme le soufflé. "Bruno Oger communique, met en avant son équipe, jamais lui-même", précise le chef pâtissier qui n'hésite pas à faire quelques clins d'œil aux origines bretonnes de son patron -comme avec ce Moelleux aux marrons. Pour l'heure, Sylvain envisage d'instaurer une réunion interne bimestrielle en pâtisserie. "Permettre à chacun de se sentir impliqué à la Villa des Lys. Avec beaucoup de petites idées, on arrive à de grandes choses, même en cuisine où l'on barde le canard d'écorces d'orange..." Présent au bas mot de 9 à 15 heures et de 20 heures à minuit, Sylvain a consacré ses coupures à l'administratif et au travail du chef de partie jusqu'à l'arrivée de Jean-Baptiste. Seules parenthèses : ses derniers voyages avec Bruno Oger au Japon dans le cadre de la gastronomie française, en mars 1999, en Russie, trois mois plus tard, afin de promouvoir l'hôtel auprès de la clientèle locale... Seul le club de football interne de l'hôtel lui permet de s'aérer un peu. "Je ne regrette rien. Jamais je n'aurais pensé être chef pâtissier d'un palace à vingt-sept ans, et en plus, je le vis sereinement." *

Animer, motiver, passionner pour diriger

En chiffres

Effectif cuisine Basse saison : 35
Haute saison : 55
Evénements (festival du Film, etc.) : 80

Effectif Basse saison : 9
pâtisserie Haute saison : 12
Evénements : 14

"Chez Bernachon, j'ai appris à maîtriser le chocolat de A à Z. Je travaillais la fève de cacao, je la broyais,
je la torréfiais..."


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L'HÔTELLERIE n° 2699 Hebdo 04 Janvier 2001


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