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Ambitieuse et élégante

La Truffe de Bourgogne

Dès le Moyen Age, la Truffe de Bourgogne a trouvé une place de choix à la table des rois de France. Malgré ses qualités gastronomiques, elle est tombée dans l'oubli au début du siècle dernier. D'une élégance délicate, elle entend bien reconquérir ses lettres de noblesse.

Depuis le Moyen Age, la Truffe de Bourgogne fait l'objet d'un négoce important qui a atteint son apogée dans les années 1900. De nombreux marchés régionaux permettaient alors d'écouler un volume de production important. Du point de vue économique, les mercuriales de cette époque la plaçaient au second rang, juste après celle du Périgord. Au début du XXe siècle, la Truffe de Bourgogne tombe partiellement dans l'oubli. Les guerres de 1914-1918 et de 1939-1945 ont décimé les hommes et ont fait disparaître la mémoire de la récolte de la Truffe de Bourgogne et sa commercialisation. A partir de 1940, les forêts de l'Est de la France et de Bourgogne, dans lesquelles elle s'épanouissait, ont été défrichées pour faire place aux cultures de céréales. C'est grâce à François Beaucamp, agriculteur de la région d'Auxerre, et à Gérard Chevalier, chercheur à l'Inra, que la Truffe de Bourgogne est de retour depuis une vingtaine d'années, suscitant l'intérêt des chefs gastronomiques et des gourmets. "Je me suis intéressé à la Truffe de Bourgogne dans les années 80, raconte François Beaucamp. Céréalier et âgé de 40 ans, je me suis dit qu'il était temps de penser à ma retraite. Je voulais trouver une activité à la fois pointue sur le plan technique, et intéressante sur le plan économique. En 1979, j'ai découvert les plants mycorhizés mis au point par Gérard Chevalier et son équipe à l'Inra. Dès 1980, j'en ai planté sur un hectare. Cette année, je récolte sur 4 hectares et j'ai loué 5 000 hectares de forêt que j'exploite en truffières naturelles."

Une production en pleine progression

Passionné par cette nouvelle activité et désireux de redonner à ce produit du terroir l'image de marque qu'il possédait autrefois, François Beaucamp a été nommé président de l'ITCE (Fédération interrégionale des trufficulteurs du Centre et de l'Est). Il est aussi responsable de la normalisation de la commercialisation de la truffe pour la France et l'Europe. L'ITCE compte à ce jour 150 trufficulteurs-adhérents répartis en Bourgogne, Franche-Comté, Champagne-Ardenne, Lorraine et Auvergne. La production de Truffe de Bourgogne oscille entre 6 et 15 tonnes en France. 2 tonnes environ ont été récoltées en 1999 en Bourgogne et 5 à 6 tonnes dans le Centre-Est. Cette année, la récolte s'annonce plutôt moyenne. Il a en effet trop plu en juillet et pas assez en août et septembre. Si la plantation de plants mycorhizés est à l'origine du renouveau de la Truffe de Bourgogne, la majeure partie de la production provient cependant de truffières naturelles situées dans les forêts du Grand-Est de la France. Des adhérents à l'ITCE, comme François Beaucamp, louent en effet de grandes surfaces qu'ils exploitent. Les truffières plantées, qui représentent environ 250 hectares, sont encore trop jeunes pour alimenter le marché de façon importante. Des marchés aux truffes ponctuels sont cependant en activité à Commercy (Meuse), Fismes (Marne)... Les Caves de Bailly à Saint-Bris-le-Vineux dans l'Yonne organisent chaque année, sur trois jours, le Marché du Réveillon au moment de Noël. D'autres marchés verront le jour parallèlement à la production. Le conseil régional de Bourgogne accorde des subventions afin de développer les surfaces de plantations nouvelles et l'installation de systèmes d'irrigation. Quant aux membres de l'ITCE, ils travaillent en étroite collaboration avec les spécialistes de l'Inra, du CTIFL et de l'Oniflhor pour optimiser le rendement de leurs truffières. La Truffe de Bourgogne tient en effet à reconquérir la place de choix qu'elle occupait autrefois auprès des gourmets.

Un produit de haute qualité

"Si nous voulons redonner à la Truffe de Bourgogne toutes ses lettres de noblesse, assure François Beaucamp, nous devons offrir sur les marchés des produits d'une qualité irréprochable et au meilleur rapport qualité-prix. Les membres de l'ITCE se sont donc engagés à respecter les règles de bonnes pratiques de commercialisation de la Truffe fraîche de Bourgogne, définies par l'accord interprofessionnel du 8 octobre 1996 (Journal officiel du 10 décembre 1996). Ainsi, sur les marchés aux Truffes de Bourgogne, les membres de l'ITCE proposent leurs truffes, non pas en terre, mais brossées, lavées, triées et canifées comme le prévoit la norme pour la vente aux consommateurs. Ils ne mettent à la vente que des truffes mûres. Les truffes immatures ne possèdent en effet aucun goût et déçoivent ceux qui les mangent. Elles ne présentent aucune valeur gastronomique. Proposées plusieurs mois avant leur maturité, elles sont bien souvent ramassées par piochage. Dépourvues d'odeur, elles ne peuvent d'ailleurs pas être localisées par l'odorat d'un cochon ou d'un chien. Le piochage a malheureusement encore beaucoup d'adeptes, notamment dans les régions du Nord et de l'Est de la France, alors que cette pratique provoque la destruction des truffières naturelles. Je demande donc aux restaurateurs de ne pas acheter de truffes immatures. Elles nuisent à l'image de marque de leur restaurant et à celle de ce produit du terroir que nous voulons revaloriser." Pour éviter la vente de truffes immatures, des dates de commercialisation ont été définies par l'ITCE. La Truffe de Bourgogne, ou Tuber uncinatum, ne doit être récoltée en France qu'entre le 15 septembre et le 31 janvier. Alors, avant le 15 septembre, refusez toute Truffe de Bourgogne. La peau de la Truffe de Bourgogne est toujours noire, mais sa chair prend des couleurs différentes selon son degré de maturité : blanche quand la truffe n'est pas du tout mûre, grise quand elle commence à mûrir, et de couleur marron chocolat très finement veinée de blanc quand elle est parfaitement mûre. C'est à ce stade que la Truffe de Bourgogne développe tous ses parfums.


La Truffe de Bourgogne a occupé une place de choix
à la table des rois de France.


C'est grâce à François Beaucamp, agriculteur en retraite, que la Truffe de Bourgogne est en train de retrouver ses lettres de noblesse.


Dans le Centre et l'Est de la France, de nombreux plants de chênes et de noisetiers mycorhizés à la Truffe de Bourgogne sont plantés chaque année.  

"Pour nos clients restaurateurs, nous maintenons les prix définis en début de campagne jusqu'à fin décembre. Nous n'augmentons pas les prix au moment des fêtes"

La Truffe de Bourgogne : à quel prix ?


Sur les marchés à la Truffe de Bourgogne, les truffes sont présentées à maturité, brossées, lavées et triées.

"Nous voulons, explique François Beaucamp, président de l'ITCE, proposer la Truffe de Bourgogne au meilleur rapport qualité-prix." La Truffe de Bourgogne est essentiellement vendue au direct : 75 % auprès des restaurateurs et traiteurs et 25 % auprès des particuliers. Le prix de vente doit permettre aux producteurs et récoltants de rentabiliser leurs investissements et aux cuisiniers et traiteurs de gagner leur vie. En moyenne, la Truffe de Bourgogne est proposée à 1 500 F/kg.
"Pour nos clients restaurateurs, poursuit François Beaucamp, nous maintenons les prix définis en début de campagne jusqu'à fin décembre. Nous n'augmentons pas les prix au moment des fêtes. Pour les particuliers, le prix est plus élevé."

Secrets de chef

Jean-Luc Barnabet - Restaurateur à Auxerre

"La Truffe de Bourgogne est un aromate plein d'élégance"


Jean-Luc Barnabé à Auxerre propose à ses clients un menu 'Tout aux Truffes fraîches de Bourgogne'.

"J'ai découvert la Truffe de Bourgogne en 1981. Originaire du Sud-Ouest, je l'ai cuisinée comme je cuisine la Truffe du Périgord et j'ai été déçu. Je ne retrouvais pas dans mes préparations (omelette, sauce périgueux...) les parfums de la truffe fraîche. En 1985, j'ai reçu des clients italiens avec lesquels j'ai parlé de la Truffe de Bourgogne. C'est grâce à eux que j'ai découvert comment la préparer pour permettre à ses arômes de s'épanouir. La Truffe de Bourgogne, comme la Truffe d'Alba, ne doit pas être cuisinée. Il ne faut pas la faire bouillir ni la mélanger avec du vin. Il faut la considérer comme un aromate que l'on ajoute au dernier moment dans les plats. C'est un aromate très complexe, aux parfums plus ou moins puissants selon sa maturité. Après une première attaque minérale, elle révèle des arômes délicats de champignons, noisettes et fougères. Elle est toute en élégance, en délicatesse, en finesse et en dentelle. L'idéal est de l'associer à un produit unique. Ce produit doit pouvoir capter et sublimer ses arômes afin de donner aux consommateurs le plus de plaisir possible. J'aime associer la Truffe de Bourgogne avec de la coquille saint-jacques ou du poisson blanc, comme le sandre, ou bien avec une purée ou des œufs. En amuse-bouche, je propose par exemple à mes clients une Brouillade d'œufs à la Truffe de Bourgogne sur canapé, que je prépare à partir d'œufs parfumés à la truffe en bocal, et sur laquelle je rajoute au dernier moment de la truffe en julienne. Je propose aussi du Saumon mariné à la Truffe de Bourgogne et du soumaintrain, fromage de la région, gras et de saveur assez neutre, à la Truffe de Bourgogne. Ce mariage met parfaitement en valeur les parfums de cette truffe. Mon menu 'Tout aux Truffes fraîches de Bourgogne' comprend : Miroir aux truffes en blanc-manger aux truffées, Quasi de veau à la purée de pommes de terre aux truffes (6 à 8 % de truffes en julienne ajoutées au moment de servir), Lasagnes de soumaintrain aux truffes, et Dentelle glacée aux poires et aux truffes. Ce menu est bien sûr accompagné de vins de la région comme le chablis et l'irancy. Un tel menu ravit tous mes clients."

Les conseils de Jean-Luc Barnabet

1. N'achetez que des truffes récoltées à parfaite maturité.
Pour les conserver, mettez-les dans un bocal de verre ou une boîte plastique sur du papier absorbant. Fermez le récipient et placez-le
au réfrigérateur. Changez le papier absorbant tous les jours. Ainsi traitées, les truffes ne s'abîmeront pas.
Elles garderont leurs arômes et leur texture croquante pendant au moins une semaine.

2. Ne jamais faire cuire la Truffe de Bourgogne au-delà de 55/60 °C. Ne jamais la mettre dans une sauce portée à ébullition.
3. Ne jamais la couper à l'avance, sinon elle dessèche et perd tous ses arômes.
4. Prévoir 10 à 15 g par personne.

Salade de coquilles saint-jacques et de doucette à la Truffe de Bourgogne

Recette de Jean-Luc Barnabet - Auxerre (89)

Ingrédients (pour 4 personnes)
500 g de mâche (doucette)
400 g de noix de saint-jacques, soit 3,5 kg environ en coquilles vivantes
6 cl d'huile d'olive 1re pression à froid
80 g de Truffe de Bourgogne
1/2 citron, sel, poivre du moulin


Préparation

* La veille, émincer finement les Truffes de Bourgogne et les faire mariner au moins 12 heures dans 6 cl d'huile d'olive
à température ambiante.

* Le lendemain, préparer la mâche.
Laver et égoutter les coquilles saint-jacques. Les découper en 2 ou 3 tranches selon leur grosseur. Les disposer sur un plat allant au four sans les superposer. Saler, poivrer. Ajouter 4 c. à café de citron frais, 6 cl d'huile d'olive avec les lamelles de Truffe de Bourgogne.
Laisser mariner au moins 15 mn.

* Au moment de servir, assaisonner légèrement la mâche et la disposer harmonieusement sur les assiettes.
* Mettre le plat au four chauffé à 100 °C pendant 2 mn. Le sortir, remuer délicatement avec une cuillère. Le remettre au four environ 2 mn jusqu'à ce que les coquilles saint-jacques deviennent blanches et raides. Les répartir dans chaque assiette sur la doucette.
Répartir les lamelles de truffes. Servir aussitôt.

 


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L'HÔTELLERIE n° 2695 Magazine 07 Décembre 2000

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