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Bières artisanales

La Tchafète et la Passe Stout enchantent Sedan

C'est dans un garage transformé en brasserie artisanale que quatre amateurs de bières des Ardennes ont créé la Tchafète. Pour ranimer la tradition des brasseurs de la région.

 
Lionel Passe, propriétaire
du bar Au Roy de la Bière,
est aussi microbrasseur.

Lionel Passe, patron du bar Au Roy de la Bière à Sedan, se souvient : "A Sedan, comme dans le Nord ou en Belgique, les maîtresses de maison brassaient pour agrémenter l'eau. Et chaque famille avait sa recette particulière, faite de tradition, de malt, de fleurs de houblon, d'eau du puits et de levures ambiantes descendues des poutres." Les brasseries de la ville faisaient aussi partie du paysage, mais la crise est passée : Stella Artois a racheté puis fermé la Grande Brasserie Ardennaise (GBA) de Sedan "laissant la voie aux bières standard". Pour faire revivre la tradition, Lionel Passe a décidé avec trois associés de transformer un garage de 60 m2, tout près de la frontière, en brasserie artisanale. Avec leurs investissements modestes, les associés prévoyaient de produire 7 000 bouteilles de 75 cl par an. Le succès de leurs premières bières, la Tchafète et la Passe Stout, en a décidé autrement. La production de
la microbrasserie de Grand Hez a atteint 17 000 bouteilles entre mars et décembre 1999 pour la Tchafète, et 2 000 pour la Passe Stout. Les demandes affluent de la région, mais aussi de Lyon, de Marseille, de Suisse et de Hollande. Même si les associés affirment "que la rareté est aussi un gage de qualité du produit et d'amour du travail bien fait", ils se posent désormais la question d'une plus grande commercialisation de la Tchafète. "Il faut d'abord la faire découvrir à d'autres patrons de bistrot, commente Lionel Passe, mais avec la manière de la présenter et de la servir. Aujourd'hui, l'univers de la bière est un désert rempli de mauvais goût. Tout est à faire." En fait, le rêve de Lionel Passe consiste à rouvrir une brasserie dans les Ardennes. "Attention, c'est pour nous développer et créer un établissement de plus grande taille, il faut trouver des personnes qui ont le même état d'esprit, qui sachent parler à la bière et de la bière. J'ai fait des recherches et j'ai trouvé des traces de brassage de la bière depuis l'an 1100 dans la région. Aujourd'hui, à part les bières des Trappistes, il n'y a plus de vrais produits artisanaux. Il nous faut donc réellement renouer avec la tradition."

Champion de France des brasseurs amateurs

En attendant, Lionel Passe cherche à explorer d'autres marchés. Un de ses amis en partance pour la Chine va d'ailleurs prochainement emmener avec lui quelques exemplaires de la Tchafète et de la Passe Stout. La bière ardennaise sur le marché chinois ? "Et pourquoi pas ?" Après tout, peu de gens ne croyaient au succès de Lionel quand il a commencé à brasser. En fait, tout a débuté dans la salle du café familial ouvert par son père en 1951. "Quand j'ai repris ce bar il y a une dizaine d'années, je comptais parmi mes clients fidèles le directeur de la Grande Brasserie Ardennaise qui m'a fait visiter les cuveries de sa société, et m'a aussi initié à l'alchimie du breuvage." Le cafetier-brasseur commence ainsi des recherches sur la bière dans sa cuisine, avec une cocotte. Puis d'échecs en demi-réussites, il met au point la Passe Stout, une brune presque noire enrichie en miel qui lui permet de remporter le championnat de France des brasseurs amateurs en 1997. "J'avais envie de brasser, explique-t-il. A l'époque, il n'y avait pas de microbrasseries et peu d'ouvrages sur le sujet, alors j'ai fait mes expérimentations seul, et il m'a fallu plusieurs années pour trouver. Pour faire de la bière, il faut du goût, c'est avant tout un métier de bouche, même si aujourd'hui, avec les bières standard, on a perdu cette tradition." En 1997, nouvelle rencontre décisive pour Lionel Passe. Il fait la connaissance de Guy Willame, un ingénieur agricole belge et brasseur amateur éclairé.

Création de la Tchafète

Ce dernier se fait déjà la main sur une bière rousse toute en langueur, baptisée la Tchafète, du surnom wallon de la grive commune. Les deux amateurs créent une société belge, avec Jacques Barnet, un ingénieur-brasseur, et André Dehon, un informaticien. Les quatre associés investissent en 1998 près de deux millions de francs belges (320 000 francs) pour acquérir du matériel neuf de brassage, dont une cuve sur mesure avec un brûleur à flamme directe. La première Tchafète est tirée le 12 décembre de la même année. "Nous sommes dans une zone protégée, située au cœur d'une forêt. C'est important car la qualité de l'eau est primordiale. Celle de la Tchafète est puisée à 70 m de fond." Le week-end, les quatre artisans surveillent les mélanges secrets de malts dans cette eau 'parfaite', les réchauffements successifs, l'amérisation et l'aromatisation au houblon. Les levures sont sélectionnées par les maîtres brasseurs, et la bière est embouteillée à la main... au format champagne.

En chiffres
* 4 associés
* 20 000 bouteilles vendues entre mars et décembre 1999
* 320 000 F de matériel

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L'HÔTELLERIE n° 2690 Magazine 02 Novembre 2000

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