En Italie, sur les bords de l'Oglio, la petite auberge des années 20 est devenue un restaurant gastronomique. Les femmes s'y sont succédé en cuisine avec toujours la même exigence : une cuisine de terroir. Un choix judicieux récompensé par 3 macarons.
Lydie Anastassion
L'aventure de Nadia et d'Antonio Santini a commencé, en 1974, par un voyage de
noces culinaire en France.
Quand Nadia a épousé Antonio, elle a dit "oui". Oui à une vie de restauratrice au sein de l'établissement de sa belle-famille, Dal Pescatore, une vie à laquelle pourtant la diplômée de l'université de sciences politiques n'était pas préparée. "Le père d'Antonio, Giovani, tenait le restaurant de son père. C'était une hosteria où l'on mangeait du poisson et où toute la famille travaillait. Antonio m'a dit qu'il lui serait difficile d'envisager une autre vie. Et moi j'ai dit d'accord. A 21 ans, on n'a peur de rien", raconte en souriant le chef aux 3 étoiles. La cérémonie du mariage terminée, le jeune couple part sur les routes, au volant d'une Diane. Direction : la France. Objectifs : 45 jours pour découvrir la gastronomie. "Nous avons fait tous les grands restaurants. Nous voulions voir les meilleurs afin de comprendre l'essence de ce travail. Moi, je n'y connaissais rien, poursuit Nadia Santini... Nous avons parcouru 6 000 km. Nous avons apprécié Bocuse, Troisgros et aussi les petites auberges situées le long de la route, dans la région des châteaux de la Loire. Nous ne prenions pas de notes. Toutes les émotions étaient dans notre tête. Chacune des maisons que nous visitions avait un esprit qui nous parlait du chef, du propriétaire. C'était à chaque fois beaucoup de bonheur." Au retour, les jeunes mariés font le point : "Les 'grands' Français nous ont donné la plus importante des leçons : être nous-mêmes."
Du rendez-vous familial à l'étape gastronomique
Le voyage de noces achevé, Nadia Santini prend place dans la cuisine aux côtés de
Bruna, sa belle-mère (toujours à son poste actuellement), de Giovani, son beau-père et
de Teresa, la mère de celui-ci. "Quand une fille entre dans une famille, elle ne
doit pas en modifier l'équilibre. C'était un devoir pour moi d'apprendre des autres.
Ici, on cultivait les traditions depuis plusieurs générations." L'histoire du
restaurant remonte au début du siècle. En 1920, le grand-père d'Antonio rentre de la
guerre et achète Vino e Pesce (Vin et pêche), une petite auberge située le long d'un
bras du fleuve Oglio. Au menu : le poisson qu'il va pêcher et que cuisine sa femme Teresa
ainsi que des plats traditionnels. La clientèle locale afflue, l'auberge devient le
rendez-vous dominical des familles. Puis dans les années 50, les clients s'y retrouvent
devant l'unique poste de télévision du village. En 1960, le restaurant change de nom et
devient Dal Pescatore. "Comme tout le monde disait-on va chez le pêcheur, le
nouveau nom est venu automatiquement. Bruna, ma belle-mère, élevait des volailles,
faisait ses pâtes, ses saucissons et cultivait le jardin potager. Elle travaillait aux
côtés de Teresa, sa belle-mère. A cette époque, il fallait produire au sein d'une
maison tout ce qui était nécessaire au bien-être de la famille. Tout changement à ce
fonctionnement aurait engendré une perte." Si les Santini ne font plus
aujourd'hui leur vin, ils continuent de produire une partie de leurs légumes dans le
potager qui prolonge le jardin du restaurant.
En écoutant Nadia, on pourrait croire que la cuisine du Pescatore n'a pas changé. "Les
saveurs sont les mêmes, explique-t-elle. Je fais une cuisine traditionnelle
italienne, des pâtes, du poisson, car la cuisine reflète l'âme du pays."
Conjuguée au savoir-faire de Bruna, la cuisine de Nadia conserve un lien fort avec la
tradition tout en faisant preuve d'autonomie, en adaptant les recettes aux goûts actuels.
Les doses de beurre et de parmesan plus légères soulignent la saveur des tortellis de
citrouille. Elaborée selon les saisons, la carte conserve néanmoins des plats
incontournables : les Agnolini au bouillon, le gras pistà, l'Omelette aux herbes, le
Straccoto de cheval (cheval braisé), et l'Anguille braisée.
Un devoir envers les clients
En 1980, le guide attribue deux fourchettes noires à Dal Pescatore. Les étoiles vont
suivre : la première en 1982, la seconde en 1988 et la troisième en 1996. "La
troisième étoile, c'était l'Everest", s'exclame le chef, avant de continuer :
"A chaque fois, on s'est dit qu'il faudrait travailler encore plus dur. Nous avons
un but : qu'en sortant de notre restaurant, les gens se disent 'on a passé un bon
moment'. Nous devons être nous-même et à la hauteur des attentes des clients. C'est un
équilibre que nous cherchons à atteindre tous les jours, c'est un devoir envers nos
clients. Certains font des kilomètres pour arriver jusqu'ici, ils ont chaud, il ne faut
pas les décevoir." Transformée au fil des ans, la bâtisse, située dans la
réserve naturelle du parc de l'Oglio sud, semble elle aussi avoir trouvé un équilibre.
C'est une vaste maison cossue de famille avec ses cheminées, ses poutres apparentes, ses
deux salons où l'on peut prendre le café, à la décoration très féminine. Rien de
théâtral ou d'ostentatoire, mais des vases, des lampes, des tableaux et de gros bouquets
de fleurs disposés comme seule une maîtresse de maison sait le faire dans son
intérieur. "Dès que nous sommes rentrés de notre voyage de noces, nous avons
engagé des travaux. Les ouvertures ont été agrandies, une salle à manger construite à
la place du jardin. Nous avons modifié l'architecture afin de donner davantage d'espace
et de légèreté." Pour que les convives soient à leur aise, dix tables rondes
seulement ont été installées dans la salle à manger. * zzz18p zzz22i zzz99
Dal Pescatore
Loc. Runate
Verso Carzaghetto
146013 Canneto Sull'Oglio - Italie
Tél. : 00 39 0376 723 001
Fax : 00 39 0376 70 304
E-mail : Santini@dalpescatore.com
Internet : www.dalpescatore.com
Parlons chiffresChiffre d'affaires
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Pour 8 personnes
75 g de pecorino
75 g de parmesan
75 g de robola
75 g de ricotta
100 g de petites herbes
1 petit oignon
1 tranche de céleri
20 g de beurre
50 g de court-bouillon
Poivre
Pour la pâte
2 jaunes d'ufs
2 ufs entiers
150 g de farine
Sel, beurre et fromage
pour condiment
Préparation
-Mélanger les 4 fromages râpés. Faire blondir le beurre avec l'oignon et
le céleri hachés. Ajouter les herbes et le bouillon. Poivrer et suivre la cuisson
pendant 4 à 5 mn. Passer au mixer et mélanger avec le fromage.
- Préparer la pâte et tirer-la bien fine. Mettre la farce et bien fermer la
pâte.
- Mettre les tortellis dans l'eau bouillante et les faire cuire doucement pendant 2
mn. Les sortir de l'eau et ajouter parmesan et beurre.
Pendant l'été, il est très agréable de les présenter avec une petite quenelle
d'aubergine.
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L'HÔTELLERIE n° 2686 Magazine 05 Octobre 2000