m Cécile Junod
Son talent d'initiateur,
Alain Ducasse l'exerce au quotidien dans ses cuisines d'où sortent les grands chefs de
demain. Après quelques années passées à ses côtés, il les pousse à voler de leurs
propres ailes et à s'engager dans de beaux parcours professionnels. Mais aujourd'hui,
Alain Ducasse va plus loin. Il poursuit sa démarche en créant un centre de formation
destiné à améliorer encore et toujours les qualifications des professionnels de la
restauration. Que ce soit pour revoir ou parfaire ses connaissances de base, se
perfectionner autour d'un thème particulier ou découvrir les nouvelles techniques de
cuisson, le centre ADF propose un ensemble de formations originales permettant
d'appréhender la cuisine de demain.
"Notre métier va subir, au cours des cinq prochaines années, une révolution
identique à celle qu'a connue l'informatique, explique Alain Ducasse. Il va donc
falloir trouver des méthodes pour évoluer. Art éphémère, la cuisine est un travail de
chaque jour où la répétition est une qualité pour la maîtrise qu'elle apporte, mais
également un danger pour la routine qu'elle peut entraîner. Et s'il faut travailler les
gestes techniques jusqu'à la perfection, c'est pour mieux en changer et en inventer
d'autres le moment venu."
Un métier en évolution et révolution
La philosophie d'Alain Ducasse se base sur une remise en question permanente. Sans cesse,
il faut tester de nouvelles technologies, s'aventurer dans des associations culinaires
inédites, s'ouvrir aux saveurs du monde, anticiper les nouvelles tendances, concilier
tradition et évolution, sélectionner attentivement les produits, sans oublier de
toujours mettre le goût et la qualité à l'honneur.
"La nécessité de faire meilleur, moins cher et l'application des 35 heures vont
révolutionner le métier de chef, poursuit Alain Ducasse. J'ai la quasi-certitude
qu'en 2005, le cuisinier arrivera à 10 h 30 et trouvera toutes ses bases prêtes. Elles
auront été préparées en amont dans des ateliers de découpes et de préparation
situés en périphérie de la ville. On aura ainsi la garantie de l'hygiène et
l'assurance que le cabillaud, par exemple, pèse toujours 145 g si c'est ce que l'on a
décidé. Demain, la cuisine sera un laboratoire clinique doté de hautes technologies
qu'il faudra être capable d'utiliser au mieux pour les mettre au service de notre métier
traditionnel. Elles nous permettront d'être encore plus performants et d'évoluer dans
une ambiance à la juste température. Finies les vestes de cuisine trempées par la sueur
!"
La réalisation de cette cuisine-école s'est faite sous la houlette de Paul Valet, déjà
complice d'Alain Ducasse pour, entre autres, les cuisines du restaurant Spoon à Paris.
Sur la base d'un cahier des charges très strict, le laboratoire de formation et de
recherches ADF a été entièrement équipé par du matériel du groupe Electrolux. Et
selon la volonté du grand chef, ici, il n'y a pas de flammes. Tout est électrique et
l'induction a pris une large part. "Comme je l'ai déjà exprimé, il faut
désormais penser la cuisine autrement, insiste Alain Ducasse. Il faut donc changer
nos habitudes, nos gestes, nos réflexes. Aujourd'hui, l'électricité offre des
performances exceptionnelles : une grande souplesse d'utilisation grâce à
l'instantanéité de l'induction, et des conditions climatiques particulièrement
agréables grâce à l'absence de rayonnement. Si nous voulons que les jeunes
s'intéressent à ce métier, il faut le faire
évoluer et lui accorder des conditions de travail satisfaisantes. Il n'y a plus aucune
raison de continuer à transpirer au-dessus des fourneaux à gaz, comme nous l'avons
nous-mêmes vécu. Cela n'apporte rien à la profession."
Des installations à la hauteur de l'excellence recherchée
Etendues sur 300 m2, les cuisines offrent la possibilité de s'initier ou de se
perfectionner à de nombreuses techniques culinaires, des plus traditionnelles aux plus
atypiques tels que la cocotte, la rôtissoire, la plancha, le wok ou l'induction. Pour ce
faire, la pièce maîtresse de la zone de cuisson, c'est le fourneau central high-tech
Molteni. De finition inox, il mesure 3,70 m de long et développe une puissance totale de
68 kW. Il comprend une plaque Ecotherm 4 foyers, une grillade au chrome lisse, une plaque
à induction 4 foyers et 2 woks à induction de 300 mm de diamètre. En soubassement, un
four électrique et des étuves ventilées.
Dans cette zone de cuisson se trouvent également, à proximité du piano, une broche
verticale implantée sur un meuble neutre et des plans de travail en inox, neutres et
réfrigérés, avec le dessus en granit noir. L'ensemble est surmonté d'une hotte de
ventilation centrale, réalisée sur mesure, en inox poli miroir.
Tout ici a été conçu pour limiter les pas inutiles. Les équipements ont été placés
de façon à offrir la meilleure fonctionnalité et les surfaces ont été volontairement
limitées. Avoir tout sous la main, dans un espace juste nécessaire, est une donnée
logique pour faciliter le travail du chef.
Outre ses équipements performants et sa conception rationnelle, cette cuisine a la
particularité d'être belle et agréable à vivre. Le choix des matériaux, des
éclairages et la qualité des finitions apportent aux occupants et utilisateurs
l'insaisissable sensation d'être dans un lieu d'exception.
"Le noir du granit apporte une sensation de calme et de luxe, explique Paul
Valet. Il présente également la singulière particularité de mettre en valeur les
produits travaillés. C'est très gratifiant. Et pour que la beauté du travail soit
encore rehaussée, la conception de la lumière est également primordiale. Ici, pas un
seul néon. Chaque plan de travail bénéficie d'un éclairage basse tension halogène
encastré dans des placards muraux à portes coulissantes. Par ailleurs, nous avons
beaucoup travaillé sur les jeux de transparence. La brique de verre est très présente.
Elle se transforme en baies vitrées, mais également en murets de séparation entre les
divers postes de travail, assurant ainsi une bonne clarté et une communication aisée.
Enfin, un gros travail de réflexion a été mené autour de l'hygiène. Pour éviter les
nids à microbes et faciliter le nettoyage, il n'existe aucun angle vif. Angles et
dosserets sont arrondis et polis à la main. Et dans cette approche exigeante de
l'hygiène, la qualité des finitions est absolument capitale. Tout doit être
parfaitement ajusté, sans vis apparentes, ni rainures ou autres aspérités."
Et toujours sous le signe de l'innovation, cette cuisine est équipée de trois caméras
360° qui filment en permanence, lors des sessions de formation, les faits et gestes des
élèves. Enregistrés sur magnétoscope, les cours sont ensuite retransmis sur trois
téléviseurs intégrés dans un meuble inox à roulettes. Il est alors possible de revoir
une étape de la préparation ou de corriger une gestuelle inadaptée.
Bien sûr, à l'issue de chaque cours, le chef et les stagiaires se réunissent autour
d'une table conviviale pour déguster et commenter les plats préparés. n
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La génération DucasseAlain Ducasse ne se désintéresse jamais du sort de ses anciens élèves. Après
les avoir poussé à voler de leurs propres ailes, il garde toujours un il attentif
sur leur évolution. |
Le contenu pédagogiqueADF propose des formations destinées à faciliter l'adaptation et l'évolution des techniques et des conditions de travail afin de maintenir et d'améliorer les qualifications professionnelles de l'hôtellerie et de la restauration. Les modules de cuisine Les autres modules |
ADF sur le webLe site Internet www.ducasse-formation.com présente le centre de formation et le contenu des cours enseignés, avec possibilité d'inscription en ligne. Par ailleurs, ce site propose, par un accès réservé, une sélection des principales recettes d'Alain Ducasse, et assure une veille culinaire permettant d'établir les tendances du goût de demain. |
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L'HÔTELLERIE n° 2660 Magzine 6 Avril 2000