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Contre le bogue des bistrots...
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Les machines à sous à la rescousse

Le café traditionnel se meurt. Un certain nombre d'établissements, à bout de souffle, se laisse alors tenter par les bandits manchots. Aujourd'hui, de simples jeux électroniques sont détournés de leur utilisation originelle. La loi a beau les interdire, les clients en sont friands. Le Milieu aussi...

m Sylvie Soubes

Lors de son assemblée générale, en novembre dernier, la Confédération française des professionnels en jeux automatiques (CFA) a appelé à manifester courant mai 2000, s'il n'y avait pas "d'avancée significative dans les négociations" qui visent à obtenir "une législation autorisant l'exploitation d'appareils à mises et gains limités". Comme il en existe dans tous les autres pays d'Europe, à l'exception du Portugal et de la France, qui persistent dans leur refus de valider ce type de jeux. Le problème hexagonal pourrait faire sourire, si, réellement, certains bistrots, ne devaient leur survie qu'à l'utilisation de jeux électroniques transformés en machines à sous. Faire sourire parce que l'Etat français, dans sa grande sollicitude, multiplie les appels au jeu par l'intermédiaire de la Française des Jeux, qui verrait d'un œil gourmand la possibilité de placer des machines apparentées au fonctionnement des bandits manchots. Et que de vraies machines à sous fonctionnent en toute légalité dans bon nombre de casinos.
Plusieurs poids, plusieurs mesures... Surtout que dans un passé récent, une loi a autorisé l'implantation de distributeurs de confiseries à lots dans les cafés. Matériel qui fut "naturellement" détourné de son utilisation initiale et qui allait d'ailleurs être interdit en 1995.

Combien de machines à sous (autorisées) en Europe ?

m Allemagne : 227 000 machines, recette fiscale 1,68 milliard de francs.
m Belgique : 68 000 machines, recette fiscale 293 millions de francs.
m Grande-Bretagne : 215 000 machines, recette fiscale 1,69 milliard de francs.
m Autriche : 5 000 machines (3 länder uniquement), recette fiscale 27 millions de francs.
m Espagne : 252 000 machines, recette fiscale 5,62 milliards de francs.
Rappel : En France, les machines à sous sont autorisées uniquement dans certains casinos.

En préface d'un rapport paru l'an dernier sur le Phénomène massif de criminalisation du jeu illicite par le biais des machines à sous, Alain Bauer, enseignant à l'IEP de Paris et à la Sorbonne remarque : "Les instances de répression elles-mêmes ont du mal à déceler une logique entre interdits officiels et facilités "exceptionnelles" : il est temps que la France se dote d'une politique des jeux claire et applicable."
Oui, mais laquelle ? La CFA, première intéressée puisqu'elle représente la distribution "professionnelle et officielle" des jeux automatiques, bataille depuis plusieurs années pour la légalisation de machines nouvelles, dans lesquelles on ne placerait ni jetons, ni monnaie, mais des cartes à puce prépayées (genre cartes de téléphone) avec enjeux et gains limités. Ceci suffirait-il à contrer la main mise de la mafia ? La mafia, fidèle au poste lorsqu'il s'agit de jeux illicites, de gains faciles et en liquide. Personne, à l'heure actuelle, n'est capable de l'infirmer ou de le confirmer. La proposition de la CFA paraît toutefois de bonne guerre (la profession, en butte directe à la concurrence de la Française des Jeux, chute dramatiquement depuis vingt ans). Elle séduit aussi les cafetiers qui, d'un point de vue financier, seraient mieux rémunérés par ce système que si la Française des Jeux se voyait octroyer la possibilité de commercialiser des machines similaires par l'intermédiaire du réseau national qu'ils représentent.
Thierry Mariani, député du Vaucluse, département très touché par le problème, soutient la démarche. Il devrait prochainement déposer de nouvelles propositions de loi allant dans le sens de la CFA. De là à débloquer la situation, rien n'est moins sûr.
Au mieux pour certains, au pire pour d'autres, des professionnels de l'automatique souhaiteraient que des rapprochements puissent avoir lieu entre la Française des Jeux et les adhérents de la CFA, notre institution des jeux ayant fait un premier pas en 1999 en demandant à rencontrer les responsables de la Confédération. De là à entrevoir une éclaircie, là encore, rien n'est moins sûr. Mais des intérêts communs peuvent jaillir des solutions extrêmes. Non ? n

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Extraits

Etude réalisée l'an dernier par Xavier Raufer et Stéphane Quere, chercheurs au Centre universitaire et juridique de recherche sur les menaces criminelles contemporaines (Paris II).

m Les machines à sous sont "des jeux de comptoir (bingo, poker, etc.) installés dans les débits de boissons et assimilés. Dans leur version honnête, ces machines ne permettent de gagner que des parties gratuites (comme les flippers). Mais souvent, elles sont trafiquées (la moitié de celles placées en France, selon des experts policiers) ou permettent de gagner des sommes d'argent, en dessous de table, après entente avec le patron de café, souvent approché à l'occasion de difficultés de gestion de son établissement."

m "Financièrement, les machines à sous sont une aubaine pour les truands : certaines équipes spécialisées en contrôlent 150, voire 200 : chacune de ces "baraques" rapportant de 30 000 à 50 000 F par mois selon la qualité de son implantation."

m "Les bandes criminelles les plus puissantes engagées sur le marché des machines à sous ont désormais une surface financière telle qu'en cas de fermeture administrative (pour un semestre par exemple) d'un débit de boissons détenant leurs machines, elles couvrent le manque à gagner du patron pendant six mois, s'il accepte de reprendre les "baraques" du gang à sa réouverture ! "

m "L'intérêt du public pour ce type de jeux : aujourd'hui en France (et en chiffres ronds), le produit brut de l'activité jeux des casinos est de 10 milliards (moitié CA, moitié prélèvement fiscal) et près de 90 % de ce produit brut proviennent des machines à sous."

m "Des enquêtes policières reprises par la presse permettent d'estimer le nombre de ces machines illégales. Il y aurait ainsi 400 "baraques" dans l'agglomération parisienne, plutôt en banlieue. Paris même, en tant que capitale, est très surveillée. 6 000 machines dans le reste de la France, d'abord dans le Midi, puis dans la région lyonnaise, enfin dans les départements du nord du pays, par ordre d'importance. (...) Voilà donc un pactole de plus de 2 milliards de francs qui défile entre les mains d'un crime organisé n'acquittant ni taxes ni impôts."

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L'HÔTELLERIE n° 2651 Magazine 3 Février 2000

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