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Le Barrio Latino à Paris
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L'art de prouver qu'un restaurant est un produit

Après le Buddha Bar et le Barfly, Thierry Bégué et Raymond Visan viennent de donner le coup d'envoi du Barrio Latino. Installé au cœur du quartier de la Bastille à Paris, ce nouveau restaurant-bar, sur 4 étages, s'impose dès son ouverture comme l'événement de la rentrée. Innovations, conception et explications.

m Nadine Lemoine

L'ancien magasin de meubles Gouffé, situé à deux pas de la place de la Bastille, entame une nouvelle vie. Le Barrio Latino, c'est un niveau de restaurant et trois niveaux consacrés au bar avec une petite restauration sous forme de tapas. Un établissement qui peut accueillir jusqu'à 1 000 personnes et où 2 500 clients se sont précipités le premier samedi suivant son ouverture. Son atout, outre la surface (3 500 m2, dont 1 800 de surface clients), c'est de proposer dans un seul et même lieu des espaces aux concepts différents. A chaque étage, sa décoration, son atmosphère et sa carte bien spécifique. Le tout respectant la cohérence du thème latino d'inspiration Argentine et Chili.
Au rez-de-chaussée, autour du superbe escalier classé et conservé, le Barrio Latino s'ouvre sur un premier espace très coloré avec une multitude de canapés habillés de tissus aux motifs différents et deux bars. Le premier, garni de bouteilles de tequila, donne le ton. Le second, tout au fond, joue une note plus cosy, plus feutrée. En fait, dès l'arrivée, sur un air de salsa, les clients pénètrent dans le niveau Pisco-Tequilathèque. «Le Pisco, c'est un raisin de muscat distillé à 40°. En Argentine, ils en vendent 120 millions de bouteilles pour 60 millions d'habitants», explique Thierry Bégué qui compte bien conquérir sa clientèle avec ce produit méconnu chez nous. «J'ai envoyé un ami négocier avec Capel, qui détient là-bas 95 % de la production. A mon avis, on va faire 7 000 bouteilles sur l'année», précise-t-il. Quant à la tequilathèque (30 références), «on veut faire découvrir des tequilas nobles. Ça va jusqu'à 800 F la bouteille hors taxe pour nous à l'achat. Nous voulons faire de cet établissement une ambassade de ce produit», dit Thierry Bégué.

Politique volontariste de partenariat
C'est au premier étage que se situe le restaurant d'une capacité de 260 couverts. De nouveau, deux atmosphères bien distinctes : la salle autour de l'atrium où les murs et les assiettes multicolores contrastent avec la sobriété du mobilier (bois et cuir brun) et le jardin d'hiver, lumineux sous une verrière. En retrait, le salon-table d'hôtes pouvant accueillir 16 convives. Au menu, Pavé de requin au coulis de poivron, Ceviche de merlan en noix de coco, Cuisse de poulet rôtie au beurre de cacahuète... «La cuisine, c'est l'Argentine et le Chili revisités, avec beaucoup de poissons, de viandes, des ceviches (poisson cru mariné)...», note Thierry Bégué. La carte se compose de 15 entrées (de 30 à 95 F), 24 plats (de 35 à 146 F) et 11 desserts (de 25 à 45 F). Côté boissons, l'originalité s'exprime dans la sélection latino (vins en provenance d'Argentine et du Chili) et du nouveau monde (Californie, Australie) qui a été concoctée en partenariat avec la Maison Richard. «J'ai travaillé avec Corinne Richard et M. Giraud. Sur 25 dégustations, on a choisi 4 à 5 vins. Aujourd'hui, c'est un véritable succès et on va monter à terme à 30 références», déclare Thierry Bégué.
A l'étage supérieur, ambiance toujours latino, mais c'est Cuba qui est à l'honneur. Nouvelle thématique, nouveau décor : portrait du Che sur les murs et la carte, table de billard, bar décoré de bagues à cigares et rhum bien sûr ! «On a développé un contrat de partenariat avec Bacardi et on aura bientôt 30 à 40 rhums de qualité. Nous voulons tirer vers le haut», explique encore Thierry Bégué.
Le quatrième niveau, c'est l'espace VIP, club très fermé à l'usage d'une clientèle triée sur le volet. Pour y accéder, il suffit d'emprunter l'ascenseur privé accessible avec une clé dont seuls les VIP sont détenteurs. Avec ses vastes canapés de cuir noir et ses fauteuils moelleux colorés, ce dernier étage clos permet de diffuser à volonté une musique différente. «Sur la carte, je reprends un éventail des meilleurs cocktails de chaque niveau et une sélection des meilleurs alcools, tequila, rhum, champagne, whisky, cognac...»

2/3 du CA généré par le bar
Pour le premier exercice, Thierry Bégué estime que le Barrio Latino devrait réaliser 50 MF de chiffre d'affaires. «fourchette basse», précise-t-il. Un chiffre d'affaires généré pour les deux tiers par l'activité bar. Aussi, tout a été pensé dans les moindres détails. Pour le fonctionnement et l'animation des bars, Thierry Bégué a fait appel à la société Barman Agency. «On a créé des modules avec des postes et une ergonomie spécifiques. Chaque poste a la même configuration. Lorsqu'un barman passe d'un poste à l'autre, il retrouve les mêmes repères. Ça permet une flexibilité totale». Un atout de premier ordre pour un établissement qui gère une brigade de 18 barmen. Et il y a aussi une politique volontariste de partenariats : «J'ai poussé la notion de partenariat à l'extrême dans cette maison, revendique Thierry Bégué. Ici, on est vecteur de tendances, comme au Barfly et au Buddha Bar. Je fais découvrir des alcools exceptionnels. On raconte une histoire.

Inévitablement derrière, nos partenaires vont raccrocher des volumes. Le sens du partenariat, c'est de développer des concepts pour montrer la marque, faire du cousu main, du spécifique. Par exemple, pour Heineken (Desperados), notre brasseur engagé sur le projet, je fais faire de grandes vasques décorées de capsules Desperados dans lesquelles on dispose des bouteilles de bière dans de la glace.»

«Tout est investi pour le confort du client»
Deux ans d'attente pour le permis de construire, huit mois de travaux, le Barrio Latino, c'est aussi 20 MF d'investissements, pour partie en autofinancement par le groupe George V Restauration (92 MF de chiffre d'affaires). «20 MF d'investissements sans le fonds de commerce, précise Thierry Bégué. Tout est investi pour le confort du client : la sécurité, la climatisation... Nous sommes en location et en moyenne pour le groupe, nos loyers représentent 5 % du chiffre d'affaires. Et nos ratios, toujours en moyenne pour le groupe, c'est 35 % de coût de personnel et 23 % de coût matière.»
«En termes de stratégie, pour nous, le pari c'est de montrer que notre fonctionnement ne se limite pas au 8e arrondissement, qu'on est capable de conquérir des marchés à l'extérieur et de se positionner sur des segments de marché différents», scande Thierry Bégué. Au Barfly, le ticket moyen se monte à 270 F et à 80 F pour le bar. Quant au Buddha Bar, il atteint 400 F en restauration et 90 F au bar. Au Barrio Latino, entre 170 et 200 F de ticket moyen est prévu à terme au restaurant, 50 à 60 F pour le bar et 90 F pour la petite restauration. Si le groupe n'a pas pour ambition de concevoir des thèmes au ticket moyen encore plus réduit, il n'écarte pas l'idée d'aller encore plus haut vers les 600/700 F. «Nous sommes des développeurs. Ça veut dire qu'il y aura d'autres établissements», assure Thierry Bégué. n


Niveau 1 : accueil et bars Pisco-Tequilathèque.


Niveau 2 : le restaurant, version jardin d'hiver.


Niveau 3 : Le bar cubain.


Niveau 4 : l'espace VIP : club très fermé où se côtoient vastes canapés de cuir noir et fauteuils moelleux.


Très coloré, le bar est constellé de capsules de bières Desperados et Heineken.


La salle de restaurant autour de l'atrium où les murs et les assiettes multicolores contrastent avec la sobriété du mobilier.


Des tapas chaudes et froides sont proposées à tous les niveaux du bar.

 

Barrio Latino en chiffres

Inauguration 24 août 1999
Places assises 700 (bars + restaurant)
Nombre de couverts 260
Ticket moyen 160 F
Effectif 150 personnes
Investissements 20MF

 

Thierry Bégué :

«La restauration, c'est une technologie appliquée. On a un produit, un positionnement,
une volonté marketing pour segmenter.C'est tout, c'est simple et cela n'empêche pas une part de créativité et d'inconnu. Mais c'est le discours qu'il faut tenir. Il faut prouver que nous sommes une industrie organisée parce qu'en face de nous il y a des financiers, des investisseurs, des gens qui peuvent s'intéresser à notre business.»


L'HÔTELLERIE n° 2634 Magazine 7 Octobre 1999

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