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Au Mercure aéroport de Lille

La restauration en appel

Le plus gros porteur du groupe Accor au nord de Paris veut réformer sa restauration et devenir une pépinière de formation.

Par Alain Simoneau

En poste à Lille depuis neuf mois, le directeur du Mercure Aéroport (212 chambres) Karim Laouamen s'est donné pour objectif d'améliorer la qualité et de relancer sa restauration. Celle-ci réalise déjà l'un des plus gros scores du groupe Accor en France avec 150.000 couverts/an et 22 MF de CA. Christophe Fouré, auparavant chef de cuisine au grand hôtel Mercure d'Orly a pris début janvier à la fois les postes de directeur de la restauration et de chef des cuisines (avec deux seconds). Une situation plutôt rare dans l'hôtellerie. Ce recrutement fut difficile, y compris à l'intérieur du groupe, pour deux raisons : la difficulté de faire venir un cadre dans le Nord, comme toujours, et le nombre de couverts qui effraie les chefs. Est-il possible de réaliser de la véritable cuisine avec de telles quantités ? Christophe Fouré, un normand, ancien de l'EH de Granville, expérimenté à la fois dans de bonnes maisons traditionnelles et dans l'hôtellerie de chaîne y a vu l'opportunité d'une responsabilité globale. Pourquoi de tels volumes pour cet ancien Holiday Inn passé sous la bannière Mercure, situé au sud de Lille à quelques minutes de l'aéroport ? Sans doute parce qu'il a été un précurseur dans l'art de créer et gérer des formules adaptées à la clientèle. La restauration y trône à claire-voie le long de la réception. On y entre sans complexe malgré l'étiquette trois étoiles de l'hôtel. Le problème est de relancer cet acquis. La restauration se divise peu ou prou en trois tiers. Premier tiers, 50.000 couverts pour la brasserie le Poëlon, 70 places, ouvert le midi seulement. Un succès régulier à 140-150 couverts/jour. Le Poëlon est la cantine des zones industrielles et notamment du Centre régional de transport (CRT) voisin. 80 à 85 F de prix moyen, de grandes assiettes, des directs, le steak tartare en vedette. En principe plus élitiste avec 160 à 170 F de ticket moyen, le grill La Flamme a imposé à Lille voici plus de vingt ans le concept de buffet de hors- d'oeuvre à volonté suivi d'un plat ultra-classique, vendu en formule tout compris. Mais la formule désormais très concurrencée s'essouffle un peu, et écarte les repas d'affaires haut de gamme. Le grill La Flamme est ouvert midi et soir. C'est la seule solution proposée aux résidents de l'hôtel le soir. La Flamme réalise aussi ses 50.000 couverts grâce au dîner dansant du samedi soir comme on n'en voit que dans le nord de la France. De 200 à 500 couverts, de tous horizons et de tous âges en tout oecuménisme et en toute sécurité. Le problème est plutôt d'endiguer la fête et d'éteindre les feux à deux heures du matin. Autre classique du lieu, les mille couverts de la Saint-Sylvestre, très impressionnants pour ce directeur nouveau dans le Nord. Troisième tiers, le Mercure produit 50.000 couverts environ en séminaires et repas de famille, grâce à une infrastructure remarquable et à son ancienneté sur le marché. Mais la tendance est à la baisse face à une concurrence de plus en plus vigoureuse. C'est en premier lieu sur l'érosion sournoise des deux derniers tiers cités que l'action a commencé.

Plus au même prix

La mission de Christophe Fouré est de relever la qualité et d'élargir l'offre pour le même prix.
«Nous devons avant tout structurer nos équipes, redéfinir le produit dans l'assiette et l'offre commerciale, surtout à La Flamme, bien différencier le produit restaurant du produit brasserie par le nappage et les accessoires par exemple, travailler le professionnalisme du service», résume-t-il. Structurer les équipes sera sans doute le plus difficile, mais c'est la base de la progression. «Nos gens sont pleins de bonne volonté, mais une forte proportion d'entre eux n'a connu que cette cuisine et manque dramatiquement d'un parcours dans différentes maisons», note Karim Laouamen. Or côté cuisine, de nouvelles exigences, déjà visibles dans la nouvelle carte de septembre, vont apparaître avec une reprise progressive de la sous-traitance et une diminution de l'assemblage. Retour à la cuisine demandé.
La nouvelle carte a un sens bien précis : donner le choix au client et élargir les possibilités notamment vers le haut. En clair, le client peut toujours choisir la formule tout compris qui a fait la force de l'établissement. Mais il peut désormais commander à la carte avec une variété inconnue jusqu'alors et composer son repas aux quatre services à sa convenance. Toujours des classiques, mais exécutés selon des critères plus professionnels. Avec des sauces maison comme la vallée d'Auge du chef, par exemple. Bémol, il s'agit tout de même d'une grande cuisine et on travaille à partir de fonds industriels. Autre avantage, la carte des grands vins Mercure, invendable sous le régime de la formule, peut reprendre du service. Dès août dernier, les choix avaient été introduits à titre de test. Le service et la présentation doivent suivre à l'avenant. Rien de révolutionnaire en somme, vu de loin, mais l'évolution demandée est considérable dans ce microcosme resté un peu confit dans son succès. Le recrutement et les évolutions de carrière s'effectueront à l'avenir selon les critères de mobilité propres au groupe. «Nous avons la volonté de faire ici de la formation. C'est notre devoir d'en faire un vivier de compétences pour le groupe. Cet hôtel n'a pas de notoriété ni d'image à l'intérieur d'Accor, alors que sa taille et son activité sont considérables. En allant chercher des chefs de service de la dimension de Christophe Fouré nous pensons bien professionnaliser les équipes. Beaucoup, à commencer par ses seconds, sont demandeurs», insiste Karim Laouamen. Le pari n'est pas si aisé. Il faut enrayer les baisses de certaines clientèles sans chasser les fidèles de la formule, et offrir mieux sans compromettre les marges.
Rendez-vous dans un an.


Auprès du barman du Mustang, Christophe Fouré directeur de la restauration au centre et Karim Laouamen directeur du Mercure Lille aéroport, à droite. Créer une pépinière de talent.


La curiosité de l'hôtel : le hall de réception communique avec les salles de restaurants, vedettes de l'établissement avec 150.000 couverts servis par an, un réveillon et des samedis soirs dansants à peine croyables.

Faits et chiffres

Le Mercure Lille aéroport a 25 ans environ. Sur trois hectares et deux étages, il propose 212 vastes chambres sur deux étages, une demi-douzaine de salons modulables, jusqu'à 800 m2 d'un seul tenant.
En 1997, l'hôtel, très marqué affaires en raison de sa situation a réalisé 46 % de TO moyen (30 % en juillet et en août). Très bien placé en carrefour autoroutier pour rayonner dans la région, près de l'aéroport (800.000 passagers), il souffre de son éloignement du centre-ville qui le prive de la toute récente manne touristique issue d'Eurostar. L'hôtel emploie 86 personnes en base plein temps, plus les extras et peu de sous-traitance (les espaces verts), dont quatorze en cuisine et trente en salle. Il a réalisé 42 MF de CA en 1997 dont 22 MF pour la restauration et 2 MF pour le bar. Les investissements
présents et à venir concernent le rafraîchissement des chambres et les aspects techniques (climatisation, téléphonie, ascenseurs, détection incendie).


L'HÔTELLERIE n° 2581 Magazine 1er Octobre 1998

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