LICENCE IV
Spécial Bière
Bière de Mars
30.000 bistrots et plus
Depuis le 1er mars et jusqu'à la fin du mois, plus de 30.000 cafés
proposent la Bière de Mars. Pour Jean-Paul Schmitt, président de l'Association des
Brasseurs de France, cette bière, essentiellement pression, est porteuse de tradition et
c'est, selon lui, la raison de son succès. Propos recueillis par Sylvie Soubes
L'Hôtellerie :
Avec 30.000 établissements, 18 brassins, près de 40.000 hectos, la Bière de Mars est
un succès incontestable. Mais comment analysez-vous cette réussite ?
Jean-Paul Schmitt :
«Pourquoi les bières d'Abbaye ont-elles du succès, pourquoi les trappistes plaisent ?
Parce que ce sont des bières basées sur quelque chose d'authentique. Pour la Bière de
Mars, la démarche est identique puisque celle-ci a derrière elle 600 ans de tradition.
C'est également une bière brassée en quantité limitée et ce qui est rare est
apprécié. D'autant plus appréciée qu'elle est synonyme de qualité. J'ajouterai que la
Bière de Mars est aussi la fête de la bière pression, donc la fête des bistrots. Nous
avons d'ailleurs toujours résisté au fait qu'elle devienne un produit d'appel avec la
bouteille. Ce n'est pas un produit marketing mais une bière liée au rythme des saisons,
qui annonce le printemps. C'est enfin une «animation» médiatisée, reconnue et qui
n'existe qu'en France. Je me souviens d'un article consacré en début d'année au nouveau
film de Woody Allen. Il commençait ainsi «Entre le beaujolais de novembre et la
Bière de Mars...». Cela veut dire que la Bière de Mars fait partie de notre
patrimoine, qu'elle s'institutionnalise ! C'est très important et j'en suis à la fois
heureux et très fier parce que je la considère un peu comme un mécénat car elle porte
en elle des valeurs de renouveau, de fête, de convivialité.»
L'H. :
Peut-on comparer Bière de Mars et Bière de Noël ?
J.-P. S. :
«Non, dans la mesure où la Bière de Noël n'est pas spécifique au bistrot et qu'il y a
d'autres événements à cette période. Je me répète, mais la Bière de Mars apporte le
renouveau, elle est liée au printemps. La Bière de Noël est plus mystérieuse, c'est un
événement différent. Ce n'est pas la même démarche.»
L'H. :
Quelles sont les caractéristiques des brassins de mars 1998 ?
J.-P. S. :
«Il y a donc 18 brassins différents mais nous ne dépasserons pas, en tout, les 30 à
40.000 hectos. C'est volontaire de notre part. Je vous l'ai dit, c'est une bière rare et
elle doit le rester. La tradition veut que cette bière titre entre 4,5 et 5,5° d'alcool,
qu'elle soit peu chargée en houblon et offre une couleur relativement ambrée, bien
brillante et elle est soutirée généralement en fûts. Elle est accessible au goût et
c'est d'ailleurs une bonne occasion de faire connaissance avec la bière. Quant à
l'opération elle-même, nous avons créé un personnage : le porteur de Mars, qui sera
décliné sous forme de dessins en train de tirer la bière, de la servir, etc.»
L'H. :
Vous présentez jusqu'au 8 mars, dans le cadre du Salon de l'agriculture, à Paris, la
Cité des brasseurs. C'est la deuxième année consécutive que vous mettez l'accent sur
la bière dans ce salon. Quelles sont vos motivations ?
J.-P. S. :
«La Cité des brasseurs permet d'assister en direct au brassage et à la fabrication de
la bière. Nous faisons participer les visiteurs à des jeux qui leur permettent de mieux
connaître l'univers brassicole. Ils peuvent toucher, goûter l'orge, le houblon. Nous
proposons également des séances de dégustation qui réunissent des grands maîtres du
goût et nous rappelons l'importance de la femme dans l'histoire de la bière.
Personnellement, je tiens énormément à la présence de la bière dans ce salon parce
que nous faisons partie de la filière agricole. Pour obtenir une bière, il y a tout un
savoir-faire qui appartient aussi aux céréaliers, aux malteurs, aux cultivateurs de
houblon. Sans eux, il n'y a pas de bière. La filière bière commence au champ d'orge et
se termine au demi-pression. D'où notre présence logique au Salon de l'agriculture.»

Le logo 1998 de la Bière de Mars : un personnage, le porteur de Mars, repris dans
différents dessins sur le thème de la bière.
La filière céréales et malterie
L'orge
La France est un des premiers pays producteurs d'orge de
brasseries en Europe. 1,4 million d'hectares d'orges cultivés en 1996 ont donné une
production de 8 millions de tonnes, dont 2,4 millions d'orge de brasseries. 1,66 million
de tonnes sont utilisées par les malteurs, 680.000 tonnes d'orge de brasseries sont
exportées. Pour 1997, la surface cultivée progresse de 9% et atteint 1.660.000 hectares
(avec + 20% en Bourgogne et 18% en Champagne). La culture de l'orge nécessite un climat
régulier et tempéré. Les zones de production sont les suivantes : Bourgogne, Champagne,
Nord, Alsace, Charentes, Sud-Ouest. Les spécialistes parlent de terroir car chaque
production a ses particularités. |

De gauche à droite : Henri de Benoist, président des Céréaliers de France et
Jean-Paul Schmitt, président de l'Association des Brasseurs de France, au Salon de
l'agriculture, à Paris.
La malterie
La malterie française joue un rôle de premier plan sur
les marchés européens et mondiaux. Il est vrai que la France compte quatre des six
premiers malteurs mondiaux. La malterie utilise 1,66 million de tonnes de cérales et
produit 1,28 million de tonnes de malt dont 82% sont exportés. La France revendique et
affiche son rang de premier exportateur mondial de malt depuis 25 ans. Et par ses unités
situées dans d'autres pays de l'Union européenne et dans d'autres continents, ce sont en
fait 2,4 millions de tonnes de malt qui sont contrôlées par les malteurs français. Il
faut rappeler que l'orge est la matière première principale de la malterie (95%). Au
cours de la campagne 95/96, les malteurs ont colecté 5,71 millions de tonnes d'orge dont
41% d'orge brassicole (74% de l'orge brassicole sont utilisés par les malteurs
français). Tandis que les orges fourragères représentent 59% de la collecte. |
Le houblon
Le houblon, dont seul le plant femelle
intéresse le brasseur, est une matière première coûteuse. Le cône sur le rachis porte
à sa base des glandes sécrétant une poudre jaune -la lupuline- surnommée autrefois
l'or du brasseur. Ce sont les acides amers contenus dans la lupuline qui donneront à la
bière son amertume et les huiles essentielles qui apporteront le parfum. Avec 671
hectares cultivés et 1.108 tonnes produites, la France occupe une place relativement
modeste. |
Les brassins 1998 de la
Bière de Mars
Bière de Mars d'Adelshoffen, Angélus de Mars, Bière de Mars des Brasseurs de
Gayant, Bière de Mars du Ch'ti, Bière de Mars Fischer, Bière de Mars Jenlain, Bière de
Mars Jupiler, Bière de Mars de Kanterbräu, Bière de Mars de Kronenbourg, Bière de Mars
La Choulette, Bière de Mars Meteor, Bière de Mars Orpal, Bière de Mars Pelforth, Bière
de Mars de Saint-Omer, Bière de Mars de Saverne, Bière de Mars Schutzenberger, Bière de
Mars Stella Artois, Bière de Mars de Terken. |
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L'HÔTELLERIE n° 2551 Magazine 5 Mars 1998
