Actualités

RESTAURATIONVos droits

Le conjoint collaborateurUn statut qui en impose

Par Pascale Carbillet

Les femmes ont de plus en plus conscience que participer à l'entreprise familiale, c'est bien, mais bénéficier d'un statut, c'est mieux. Mais pour quel statut opter ?

Tout conjoint qui participe à l'activité professionnelle de l'entreprise familiale s'interroge son statut. Quel est le meilleur ? En fait, il va dépendre des possibilités financières de l'entreprise et des priorités des époux, comme par exemple éviter un surcoût pour l'entreprise, mais bénéficier d'une meilleure couverture sociale pour le conjoint et garantir ses droits pour le futur en cas de séparation volontaire ou non. Certaines situations peuvent être transitoires en raison des possibilités financières de l'entreprise, mais celles-ci doivent évoluer à terme, un conjoint sans statut pourra par la suite être salarié sans que cela grève trop les charges de l'entreprise.

Que pouvez-vous choisir ?

Tout d'abord la forme juridique de l'entreprise va conditionner le choix du statut du conjoint.

En entreprise individuelle, le conjoint peut choisir d'être :

- conjoint sans statut ;

- conjoint associé ;

- conjoint collaborateur ;

- conjoint salarié.

L'entreprise est exploitée sous forme d'une société, le conjoint peut choisir d'être :

- conjoint sans statut ;

- conjoint associé ;

- conjoint salarié.

Le conjoint sans statut

De nombreux conjoints d'artisans ou de commerçants travaillent au sein de l'entreprise familiale, mais ils ne sont ni salariés, ni collaborateurs déclarés, ni associés. Pourtant, ils contribuent par leur travail à la bonne marche de l'entreprise sans en percevoir directement les fruits. Bien sûr, ce travail peut trouver sa récompense dans la plus-value apportée au fonds de commerce, ce qui augmentera la part respective de chacun des époux quand ils sont mariés sous le régime de la communauté légale. Dans l'hypothèse où les époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens, une contrepartie peut être envisagée par le biais de donation (devant notaire) que pourrait consentir le chef d'entreprise à son conjoint. Si ces solutions sont facilement envisageables quand tout va bien dans le couple, il en est autrement en cas de séparation.

Condition :

Il s'agit du conjoint qui assiste le chef d'entreprise dirigeant de la société en dehors de tout statut. Dans cette hypothèse, le conjoint ne reçoit aucune rémunération de la société, et ne perçoit pas directement les bénéfices éventuels dans la mesure où il ne possède pas de parts de la société.

Couverture sociale :

Celle-ci va dépendre de celle dont bénéficie le mari exploitant.

- Epouse de gérant minoritaire : l'époux gérant de la SARL relève dans ce cas du régime général des salariés. L'épouse hors-statut est rattachée au régime de protection de son époux chef d'entreprise gérant de la SARL et donc au régime général des salariés.

- Epouse de gérant majoritaire : le gérant de la SARL est assujetti au régime d'assurance maladie des non-salariés, son épouse bénéficie alors des prestations attachées à ce régime.

L'épouse du commerçant ou de l'artisan sera dans la même situation que l'épouse du gérant majoritaire.

Cette situation n'entraîne aucun frais pour l'entreprise, mais elle présente les inconvénients suivants :

* lorsque la femme est enceinte, elle ne perçoit ni allocation de repos maternel, ni indemnité de remplacement ;

* si elle devient veuve avant 55 ans, elle n'aura droit qu'au capital décès, l'assurance veuvage n'est pas instaurée dans le régime des non-salariés ;

* en cas de divorce, sa participation à l'entreprise ne lui ouvre aucun droit propre, comme le droit au chômage...

Il est possible d'améliorer la couverture sociale du conjoint :

* en tant que conjoint, elle peut adhérer volontairement à l'assurance vieillesse des travailleurs non-salariés, ce qui lui permettra d'obtenir sa propre pension vieillesse ;

* ces versements sont déductibles du revenu global.

Le conjoint associé

Condition :

Le conjoint détient un certain nombre de parts de la SARL qui exploite le fonds de commerce. Nous ne mentionnons que cette forme de société qui est le plus souvent utilisée.

Le statut de conjoint associé peut se cumuler avec un contrat de travail. Il peut donc être un conjoint associé salarié. Il peut aussi avoir une autre activité.

Attention ! le nombre de parts détenues par la femme peut venir modifier le régime fiscal ou social de la gérance. En effet, au regard du droit fiscal et social, le statut de salarié n'est réservé qu'au gérant minoritaire.

Pour apprécier si un gérant est majoritaire ou non (c'est-à-dire plus de 50% des parts), on prend en compte non seulement ses parts mais aussi celles détenues par son épouse et leurs enfants.

Couverture sociale :

Le statut de conjoint associé n'interdit pas une autre fonction. La femme peut donc être salariée de l'entreprise ou à l'extérieur. Lorsque le conjoint exerce une activité de salarié de l'entreprise, il est soumis au régime général de la Sécurité sociale avec les limites que nous mentionnons dans la partie du conjoint salarié.

Si le conjoint est gérant ou cogérant de la société, c'est le régime propre à la gérance qui s'applique, avec les règles de gérance majoritaire ou minoritaire.

Conjoint cogérant :

- Conjoint cogérant majoritaire : dans ce cas, peu importe que la femme soit salariée ou non, dans la mesure où elle appartient à un collège majoritaire, elle relève du régime des non-salariés.

- Conjoint cogérant minoritaire ou égalitaire : si la femme perçoit un salaire, elle bénéficie dans ce cas du régime des salariés. A l'inverse, si elle n'est pas rémunérée, elle ne relève d'aucun régime, et même pas en tant qu'ayant-droit de son époux. Pour bénéficier d'une protection sociale, elle doit donc cotiser à l'assurance volontaire.

L'épouse peut être cogérante statutaire non-rémunérée. Si elle est minoritaire, elle ne relève alors d'aucun régime de protection sociale obligatoire. Mais la caisse primaire est alors en droit de lui refuser la qualité d'ayant-droit, c'est-à-dire bénéficier du même régime que le chef d'entreprise. Dans ce cas, il ne lui reste plus qu'à souscrire une assurance personnelle.

Conjoint associé d'un gérant majoritaire :

Le conjoint participant à l'activité de l'entreprise doit être affilié personnellement à l'ensemble des régimes de non-salariés.

Le conjoint salarié

Il s'agit ici du régime le plus protecteur pour le conjoint qui collabore à l'entreprise familiale. Si le droit du travail accepte que son employeur soit aussi son époux, pour éviter les fraudes à la loi, il impose un minimum de conditions à respecter.

Conditions :

Le conjoint doit participer à titre professionnel et habituel à l'activité de son conjoint et de l'entreprise.

tout travail à l'extérieur de l'entreprise, même à mi-temps. Souvent en raison des risques occasionnés par le démarrage de l'exploitation, le conjoint conserve un emploi salarié à mi-temps, et travaille le reste à l'exploitation, cela lui est interdit pour bénéficier de ce statut.

Le conjoint se trouve placé sous l'autorité ou la dépendance du chef d'entreprise, comme n'importe lequel des salariés vis-à-vis de son employeur. Peu importe son lien matrimonial avec le chef d'entreprise.

de se comporter en patron bis en passant et signant les commandes aux fournisseurs.

Le conjoint doit percevoir un salaire qui correspond au salaire de la catégorie professionnelle en cause et qui doit être proportionnel à l'activité exercée au sein de l'entreprise.

de payer son conjoint en dessous du SMIC ou à l'inverse de lui verser un salaire de P-dg de multinationale à moins que l'entreprise en soit une avec un chiffre d'affaires en conséquence.

Couverture sociale :

Comme tout salarié du régime général, le conjoint salarié d'un chef d'entreprise bénéficie d'une large couverture sociale. Il bénéficie des prestations en nature : remboursement des soins, visites médicales..., des prestations en espèces : indemnités journalières en cas d'arrêt de travail, rentes d'accidents de travail..., des prestations familiales dans leur totalité : allocations familiales servies à compter du 2ème enfant, allocation pour le jeune enfant à la naissance.

Avantages fiscaux :

Pour ces impôts, les revenus du conjoint sont des salaires qui bénéficient de l'abattement de 10% et 20%.

En outre, ce salaire est déductible des frais généraux de l'entreprise, selon différentes modalités :

* le salaire est totalement déductible quand les époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens ;

* lorsque l'entreprise est exploitée dans le cadre d'une société de capitaux relevant de l'impôt sur les sociétés, le salaire est totalement déductible ;

* lorsque le patron et son employée préfèrent le concubinage au mariage.

Si les deux époux sont mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, il s'agit du régime matrimonial légal, qui s'applique dans la majorité des cas dans la mesure où les époux n'ont pas conclu de contrat de mariage, il faut distinguer :

* l'exploitant adhère à un centre de gestion agréé, il peut alors déduire le salaire mensuel mais dans la limite de 36 fois le SMIC mensuel, pour l'année 1995 cette limite est fixée à 220.700 F ;

* l'exploitant n'adhère pas à un centre de gestion agréé, dans ce cas, le salaire ne sera déductible que dans la limite de 17.000 F.

Le conjoint collaborateur

Conditions :

Ce statut ne concerne que les épouses de commerçants ou d'artisans travaillant effectivement avec leur conjoint. Seul le conjoint du chef d'une entreprise individuelle peut bénéficier de ce statut de conjoint collaborateur.

le conjoint du chef d'entreprise en société ne peut bénéficier de ce statut.

Pour bénéficier de ce statut, le conjoint collaborateur doit se faire inscrire en tant que tel au registre du commerce ou au répertoire des métiers.

d'avoir une autre activité rémunéré à l'extérieur de l'entreprise. L'épouse ne peut occuper un autre emploi à mi-temps.

Avantages pour le conjoint :

En contrepartie de cette inscription, le conjoint se voit reconnaître le droit de gérer l'entreprise. Il peut donc effectuer au nom du commerçant tous les actes concernant la gestion courante de l'entreprise.

Les actes de gestion courante que le conjoint collaborateur peut effectuer :

* représenter l'entreprise auprès des différents partenaires ou organismes ;

* réaliser les ventes de l'entreprise ;

* passer les commandes habituelles auprès des fournisseurs.

Les actes interdits :

* souscrire un emprunt pour l'entreprise ;

* mettre le fonds en location-gérance ;

* vendre un immeuble mis à l'actif de l'entreprise.

Couverture sociale :

Le conjoint collaborateur a le statut d'ayant -droit du chef d'entreprise, qui est soumis au régime de protection sociale des non-salariés.

De ce fait, la femme est couverte par le régime de son mari en ce qui concerne les prestations d'assurances maladie, les prestations familiales, et bénéficie d'une couverture invalidité décès identique à celle du chef d'entreprise.

En cas de maternité, elle perçoit l'allocation de repos maternel et l'indemnité de remplacement, et ce, sans payer de cotisations supplémentaires.

En outre, elle peut se constituer ses propres droit à la retraite en cotisant volontairement à l'assurance vieillesse des non-salariés. Elle dispose de trois options pour se constituer sa retraite :

- cotiser forfaitairement sur une assiette égale à 1/3 du plafond de la Sécurité Sociale ou sur la base des revenus du chef d'entreprise ;

- cotiser dans la limite du plafond de la Sécurité Sociale, sur une assiette égale à 1/3 des revenus du chef d'entreprise ;

- cotiser au partage des revenus entre le chef d'entreprise et le conjoint (il faut l'accord de l'époux), sur la base de 1/3 ou 1/2 au choix des revenus du chef d'entreprise.

Ce système permet au couple de percevoir deux retraites : une retraite personnelle (au titre de cotisant obligatoire pour le chef d'entreprise) et une au titre de cotisant volontaire pour le conjoint.

Ces cotisations versées au titre de l'assurance vieillesse sont intégralement déductibles, ce qui permet de diminuer sensiblement les charges de l'entreprise individuelle.

Votre statut matrimonial

vous protège aussi

Si vous êtes marié sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, il s'agit du régime matrimonial légal qui s'applique à 90% des époux qui n'ont pas fait de contrat de mariage spécifique.

Ex. : pour l'achat d'un fonds de commerce avec de l'argent commun, il faut l'accord des 2 époux.



L'HÔTELLERIE n° 2477 Magazine 3 Octobre 1996

L'Application du journal L'Hôtellerie Restauration
Articles les plus lus...
 1.
 2.
 3.
 4.
 5.
Le journal L'Hôtellerie Restauration

Le magazine L'Hôtellerie Restauration