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interview

Marc Médevielle, Le goût de l'observation


Marc Médevielle, directeur de la rédaction

Marc Médevielle est le directeur de la rédaction de la très belle revue « Terre de Vins ». Homme de terrain, il mène un véritable travail d'encyclopédiste, fort utile aux professionnels qui ont besoin d'informations nouvelles et régulières sur ce Languedoc qui voit naître au moins deux cents belles et nouvelles cuvées par an ! L'expérience rédactionnelle qu'il mène est unique en France et nous avons souhaité lui donner la parole afin de mieux comprendre la complexité de la région.

Tous les média parlent à nouveau d'une probable crise dans le Midi viticole. La situation semble si désespérée que certains viticulteurs sont prêts à entrer dans la violence. Et pourtant, pendant que des vignerons n'ont que la solution d'écouler leur production vers la distillation, d'autres vendent leurs bouteilles à prix d'or. Comment expliquez-vous ce paradoxe ?
En matière de viticulture, la région est coupée en deux. D'un côté, vous avez les producteurs de vins de table issus du monde agricole traditionnel, de l'autre une floraison de domaines qui ont le vent en poupe. Entre ces deux mondes, le fossé est profond et ne cesse de se creuser. Le premier est en grande souffrance. Le second est en pleine expansion : sur le seul Languedoc, on dénombre environ 500 exploitations. 5 ans auparavant, elles se comptaient sur les doigts de la main. Saura-t-on sauver une nouvelle fois les vignerons du « passé », grâce à la distillation, aux primes, aux subventions ? Je ne sais pas, mais il est certain que cette fois l'avenir du Languedoc se trouve ailleurs.


Le Languedoc connaît une vraie mutation et voit se développer, comme à d'autres périodes de son histoire, une nouvelle culture du goût et des vins ? À vous entendre, la région semble en pleine ébullition.
Le bouleversement est perceptible à tous les stades de la filière. La région est devenue en quelques années un eldorado du vin français. Chaque jour, sur le terrain, je croise de nouveaux œnologues, conseillers, courtiers. Le négoce prend une place de plus en plus importante et cette activité est nécessaire à une grande région viticole. La chance du Languedoc réside dans un brassage professionnel extrêmement stimulant : les étrangers investissent, les Bourguignons, les Bordelais achètent des vignobles. Tout ceci va de pair avec le développement de la gastronomie, de l'art et même du tourisme. Une vraie culture voit en ce moment le jour et le vin en est l'aiguillon.

On peut donc considérer que le Languedoc vit actuellement une vraie révolution dans des domaines qui ont tous un lien entre eux. Une révolution apporte toujours des excès, voire même des dangers. Quels sont ceux, à votre avis, que le monde du vin doit éviter ?
Peut-être justement une vision trop « étrangère » du vin, une idée trop éloignée de la culture languedocienne. Certains arrivent ici avec l'envie de reproduire des schémas trop stéréotypés, qui ne tiennent pas suffisamment compte du terroir. Les dangers de ce grand mouvement se trouvent dans ce que j'appellerais une « parkerisation » du vin. J'entends par là, faire du Languedoc une terre à syrah bien mûre, en cherchant l'extraction et la concentration maximum, en multipliant les micro-cuvées... Il serait plus judicieux de chercher l'expression des terroirs, de trouver le meilleur dans les cépages locaux comme le carignan ou le grenache.

Les prix pratiqués, de plus en plus élevés pour certains domaines, ne sont-ils pas un autre danger. Certains vignerons n'investissent-ils pas démesurément dans le packaging ?
Je ne suis pas choqué par les prix. Si certains vins trouvent preneurs à des prix élevés c'est tout de même une reconnaissance du travail effectué dans le Languedoc. Toutes les dégustations le prouvent depuis quelques années : il y a dans cette région de très grands vins avec lesquels il faut compter sur le marché international. D'autres vins restent de véritables affaires. Quant au packaging, je me réjouis plutôt de voir la région accorder enfin de l'importance à la création de belles étiquettes, de beaux flacons.

Les restaurateurs savent-ils accompagner ce vent de renouveau qui souffle sur la région? Avez-vous constaté des changements sur les cartes ?
Oui, je pense qu'ils se sont vraiment pris au jeu et qu'ils sont d'authentiques relais « publicitaires » entre les vignerons et les amateurs de vins du Midi. Nombreux sont les restaurants en France ou à l'étranger qui ont inscrit à leur carte les vins du Languedoc. Il y a peu de temps encore, les restaurants de la région ne proposaient à leur clientèle qu'un « faugère » ou un « corbière » anonymes. Aujourd'hui, pas un seul restaurant n'a moins de 50 références.

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34923 Montpellier cedex 9

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L'Hôtellerie n° 2770 La Cave 23 Mai 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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