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du 4 décembre 2003
EMPLOI

< AU PONT SAINT-ETIENNE À LIMOGES (87)

On est aux 35 heures et ça marche !

En appliquant à la lettre, dès leur promulgation, les principes de la loi Aubry, un restaurateur limougeaud considère qu'il a fait avancer l'entreprise.

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Nicolas Marcheix, directeur général du Pont Saint-Etienne.

"Nous sommes passés aux 35 heures en 1999, et nous nous en portons plutôt bien." Nicolas Marcheix, directeur général du Pont Saint-Etienne, un des restaurants les plus fréquentés de Limoges, se félicite des nouvelles donnes de l'emploi Aubry. Son établissement, un ancien bar-tabac-presse, est devenu un exemple de réussite en matière de RTT, et une référence de développement dans le monde local de la restauration. Idéalement situé dans le quartier historique de la cité, en bord de Vienne, le site est passé de 15 places assises à 160 en 10 ans, avec le renfort d'une terrasse très appréciée en saison de 80 places. La progression a été régulière dans tous les domaines : 3 salariés en 1990, 29 aujourd'hui, des travaux importants en 1996 avec le recrutement d'un cuisinier (Antony Sylvain, toujours en place) et d'autres aménagements en 2002, avec l'ouverture d'une salle panoramique. "Nous servons maintenant 65 000 couverts par an, révèle le dirigeant, pour un ticket moyen de 22 e le midi, et de 32 e le soir. Notre CA est de 1,9 Me, nous avons 12 personnes en cuisine, et nous allons répartir une partie de notre bénéfice à nos employés, dont la majorité est actionnaire de l'affaire." Pour expliquer cette 'succes story', Nicolas Marcheix s'appuie sur une politique qualitative qui a fidélisé les clients, et construit la bonne réputation de sa table, ainsi que sur une stratégie sociale et économique.

Une collectivité responsable
En cuisine, Antony Sylvain est secondé par Cyrille Besse, mais aussi par 4 agents de production ou chefs de partie, travaillant sur une carte changée trimestriellement, suivant une politique rigoureuse de qualité. Le foie gras maison aux pruneaux a été reconnu et subventionné par l'Anvar pour sa méthode de cuisson originale sous vide. Un contrôle drastique est imposé volontairement deux fois par semaine sur les produits et les appareils. "Nous jouons en collectif, détaille le manager, et si nous avons pu appliquer les 35 heures, c'est grâce à notre organisation du travail, et la responsabilisation des personnels. Nous avons dû réfléchir sur les techniques, l'agencement, le matériel pour que ces heures deviennent non pas une servitude, mais un atout de réussite économique."
L'accord, signé le 29 décembre 1998, concernait alors 13 salariés. Dans les 6 mois, comme la loi l'exigeait, 2 recrutements secs ont été effectués en CDI, et 2 mi-temps sont passés en temps complet. Un plan offensif comportant 17 % d'embauche par rapport à la masse salariale, qui n'a fait depuis que monter en puissance.
"Nous nous sommes fait les réflexions suivantes, précise Nicolas Marcheix. Comment utiliser les personnes au bon moment, à la bonne heure, sans qu'elles soient toutes là lorsqu'il n'y en a pas besoin, comment recentraliser les techniques de fabrication sans occuper du monde aux fourneaux dans les heures creuses, bref, comment utiliser les gens à bon escient, dans un minimum de temps."
Une organisation du travail pointue en cuisine a permis d'arriver à optimiser la fabrication des plats, tandis que le personnel en salle est toujours en nombre, en adéquation avec les besoins réels. Des plannings ont donc été conçus, mis au point dans le seul but de gagner du temps, tenant compte des prévisionnels en regard du jour, de l'heure, de la saison. Partant du principe qu'il est illogique qu'il y ait un nombre égal de serveurs pour assurer 300 couverts un samedi et 150 un mardi, les responsables du Pont ont donc travaillé sur une radicalisation du travail.

Tous partenaires
Tout est affaire de prévisions : prévision du nombre de couverts servis par jour, prévision du chiffre d'affaires effectué. En regard de ces deux chiffres, le responsable du planning, Nicolas Chemin, aidé d'une adjointe de direction, Corinne Berthier, prévoit le nombre de personnes à faire venir, les tranches horaires et l'emploi de chacun. Pas question de mélanger les genres, comme le ménage ou le service : une femme d'entretien se charge en exclusivité du premier, et seuls les serveurs s'occupent aux seules heures nécessaires du second. Au final, cela donne sur 52 semaines un peu plus de 1 800 heures ramenées en semaines RTT et en congé à 1 617 heures annuelles. En fonction de ce prévisionnel, la direction embauche, si besoin, des saisonniers en période de pointe et monte des semaines en 28 heures ou en 43 heures.
"Mensuellement, nous dressons un compte d'exploitation, rappelle le dirigeant, dans lequel tout est pensé : ratio cuisine, boissons, électricité, etc. Et nous organisons une réunion générale deux fois par an, pour recadrer en regard des résultats et des obligations économiques." Tout le monde doit être responsable, mais tout le monde est concerné au premier chef, avec un système d'intéressement attractif. Un plan d'épargne entreprise a été mis en place, et 20 % des bénéfices nets sont reversés aux salariés, proratisés au temps passé et aux salaires de chacun. En prime, l'actionnariat est encouragé (16 % du capital est détenu par les salariés), tandis que les compétences de tous sont utilisées au maximum.
12 000 e auront été investis en formation en 2003, afin de continuer à se développer, notamment vers de nouveaux services. Le Pont Saint-Etienne souhaite mettre en place une unité traiteur, une politique commerciale vers les entreprises, organiser des séminaires, bref, se diversifier sans augmenter la partie restauration actuellement à son apogée. Certains serveurs se transforment en attachés commerciaux, pour aller démarcher les sociétés des environs et dénicher de futurs nouveaux clients. Le tout avec le même esprit de gestion rigoureuse du travail et du temps.
"Les 35 heures nous auront beaucoup apportés, avoue Nicolas Marcheix. Bien sûr, au début, elles ont fait exploser la masse salariale, mais notre croissance a permis d'y faire face. C'est vrai qu'il est facile d'embaucher, de pratiquer des RTT lorsque l'on double son chiffre en 5 ans. Mais cette politique sociale ne peut s'appliquer avec succès et rentabilité que si derrière une organisation rigoureuse du travail, une optimisation maximale de la production, une responsabilisation du personnel sont mises en place parallèlement."
J.-P. Gourvest zzz60t

En chiffres
a Investissements 2 MF en 1996, 4,40 MF en 2002 (dont 700 kF en cuisine)
a CA 2002 1,9 Me
a Nombre de couverts servis 65 000 par an
a Ticket moyen De 22 à 32 e
a Effectif 29 salariés
a Propriétaires Nicolas Poujol et Mireille Manaranche
a Responsable Nicolas Marcheix, auparavant directeur de salle du Domaine de la Grelle (87) En poste depuis 1992

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