Actualités

À LA LOUPE

Dominique Frérard, Maître cuisinier de France

LA CHAINE À LA BOUTONNIERE

Indubitablement, 2003 sera une année faste pour Dominique Frérard, chef des Trois Forts à Marseille. Le groupe Accor investit 500 000 euros pour lui 'offrir' un cadre enfin approprié à sa cuisine ensoleillée.


"Je ne réinterprète pas la cuisine. Je pars des basiques et je réactualise", explique Dominique Frérard.

Il attendait avec fièvre une étoile au Michelin, ce ne sera pas pour cette année... "Surtout, n'insistez pas trop sur l'étoile. Sinon, on croira que je fais une fixation dessus." D'emblée, avec l'exquise politesse qui le caractérise, Dominique Frérard met dans l'ambiance. Il craint, sans doute, qu'à force de parler d'une distinction qui, selon lui, "honorerait l'équipe et les clients", elle ne lui échappe encore longtemps... Et puis, pour lui, l'essentiel n'est pas là. Il est dans l'assiette et "dans le plaisir qu'il donne" quand on goûte à une carte renouvelée toutes les 6 à 8 semaines. Il est encore dans la satisfaction d'avoir fait des Trois Forts, depuis 1994, l'un des grands restaurants gastronomiques de la ville et, aussi, de lui avoir donné une identité différente de celle du Sofitel Vieux Port qui l'abrite. "Avec Domenico Basciano, mon directeur au Pullman d'Aix que j'ai suivi au Vieux Port (il est aujourd'hui d.g. du Sofitel Palm Beach, N.D.L.R.), nous portions le même regard sur le client. Il voulait positionner ce restaurant comme étant celui de la ville." Pari tenu. En quelques années, le vocabulaire marseillais s'est adapté à cette mutation. Depuis longtemps, on ne dit plus "déjeuner au Sofitel" mais "aux Trois Forts". Pour être juste, il faut avouer que, hormis le menu et le service impeccablement discret, la vue sur le Vieux Port est somptueuse, sans doute la plus belle de la cité phocéenne. L'ensemble fait d'ailleurs courir tout le show-biz, les politiques, les hommes d'affaires, et on ne compte plus les personnalités qui y ont fait escale : Chirac, le Dalaï-Lama, le président de la Chine... Il n'empêche. Ses confrères lui assènent encore gentiment "que cela doit être cool de travailler dans une chaîne hôtelière". Un peu agacé par ces propos, il commente : "Je me bats comme si c'était mon entreprise, je ne compte pas mon temps. Si je n'ai pas de souci financier, j'ai des ratios à tenir. Et puis, si les clients ne sont pas contents, on peut me demander de partir." Très heureux d'appartenir au groupe Accor, le président du Comité des chefs de cuisine Sofitel International tient à rendre hommage à un employeur qui ne manque jamais de le citer dans toute sa communication et investit régulièrement dans son restaurant : 600 000 e en 1999 dans la rénovation des cuisines, le plus gros investissement de ce type, et 500 000 e l'été dernier pour un relooking intégral du restaurant. En phase avec Loïc Fauchille, directeur général du Vieux Port depuis quelques mois, il apprécie sa détermination de faire des Trois Forts le restaurant gastronomique de la ville. L'étoile, qu'il qualifie de 'filante', suivra peut-être. Elle retrouvera alors le chemin d'un chef qui l'avait déjà gagnée, en 1991, au Regina de Porto-Vecchio. Il avait 32 ans et faisait enfin l'orgueil de son père, transporteur routier de la 2e génération, qui avait mal supporté que son fils fasse sa route dans la cuisine. "A l'époque, cela a été un drame. Le métier de cuisinier n'avait pas la dimension qu'il a aujourd'hui. Il n'était même pas considéré comme un métier. Il avait l'image du cuistot, au fond de sa cuisine." Il ajoute : "C'est quand même énorme de pouvoir représenter sa région à l'étranger lors de mes déplacements, 2 par an minimum." De ce point de vue, il voue une profonde admiration à Paul Bocuse. "C'est grâce à lui si la cuisine française possède cette aura dans le monde entier." Natif des Ardennes, il n'est pas peu fier d'avoir si bien adopté la cuisine du Sud qu'il en est devenu l'un de ses représentants illustres.

En dates
* 14 juillet 1959 :
Naissance à Vouziers (Ardennes)

* Septembre 1976 : Entrée au CET de Saint-Amand- Montrond
* Avril 1980 : Le Club, Cavalaire (83), chez Alain Guigand (1 macaron)
* 15 avril 1989 : Mariage avec Annie
* Mars 1991 : 1 maracon au Michelin, au Regina à Porto-Vecchio
* 28 juin 1991 : Naissance de Baptiste
* 15 janvier 1992 : Chef à la Table du Roy (Pullman) à Aix. Rencontre avec Domenico Basciano
* 18 décembre 1993 : Naissance de Morgan
* 1er septembre 1994 : Il entre comme chef au Sofitel Vieux Port
* 1996 : Clé d'or de la gastronomie au GaultMillau
* 3 avril 1996 : Naissance de Clarisse
* 1998 : Coupe du Monde de Foot. Le Sofitel est l'hôtel de la Fifa
* Mai 1998 : Maître cuisinier de France
* 15 septembre 2003 : Fin des travaux aux Trois Forts

Un Ardennais champion de la cuisine méditerranéenne
"Ma cuisine est marquée par les 2 600 ans d'histoire de Marseille et de ses multiples invasions. Elle s'inscrit dans le répertoire méditerranéen." Peu porté à l'emphase, le chef explique : "Je ne réinterprète pas la cuisine. Je pars des basiques et je réactualise. Vous savez, on ne peut pas réinventer l'eau chaude." Poussé dans ses retranchements, il avoue : "Ma cuisine est une cuisine de goût. Le topinambour sent le topinambour. La sauce au romarin sent le romarin..." Il ajoute en passant : "Il a fallu oser pour accompagner le foie gras avec des pois chiches dans ma dernière recette."
Autre titre de gloire, pour Dominique Frérard, son entrée, en mai 1998, chez les Maîtres cuisiniers de France. "C'est une date importante. J'ai été élu par mes pairs, et je fais partie de la bannière la plus étoilée de France, celle qui prône l'apprentissage, la transmission du savoir et qui reste fidèle aux traditions."
Très impliqué dans la formation de ses jeunes apprentis, dont il affiche les bulletins de notes sur les murs, jury d'examen à Bonneveine, Dominique Frérard conseille aux jeunes d'entrer dans un métier "où il y a de la place pour ceux qui ont envie d'avancer".
Mais son plus bel hommage concerne son épouse Annie : "Je passe plus de temps dans ma cuisine qu'avec ma famille. Je le regrette, mais on ne peut pas tout faire en même temps. Si on veut réussir, il faut privilégier sa carrière. Si j'en suis là, c'est grâce à mon épouse. C'est elle qui élève nos 3 enfants."
D. Fonsèque-Nathan zzz36i zzz22v

Article précédent


Vos commentaires : cliquez sur le Forum des Blogs des Experts

Rechercher un article : Cliquez ici

L'Hôtellerie Restauration n° 2812 Hebdo 13 Mars 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

L'Application du journal L'Hôtellerie Restauration
Articles les plus lus...
 1.
 2.
 3.
 4.
 5.
Le journal L'Hôtellerie Restauration

Le magazine L'Hôtellerie Restauration