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À LA LOUPE

France Deschamps

CUISINIERE DE... VILLE

Nantie d'un BTS de gestion, elle ne s'imaginait pas forcément faire sa carrière devant un piano. Pourtant, depuis le jour où elle dut remplacer au pied levé le chef du restaurant acheté avec son mari, elle n'a plus jamais voulu laisser la place...


France et Michel, l'esprit authentique du bouchon !

La vie de France doit beaucoup au hasard. D'une rencontre d'abord. Celle de Michel, aujourd'hui son mari depuis... 23 ans. En 1978, elle doit faire un stage de 4 mois dans une cuisine. Elle opte pour Lyon où elle compte quelques amis, et se retrouve au sein de la brigade du Sofitel où elle remarque Michel. Coup de foudre réciproque : le couple ne quittera plus jamais Lyon. D'un accident ensuite, celui qui immobilise le chef du petit bouchon acheté quelques mois plus tôt. Le chef 'out', France n'hésite pas et entre en cuisine. Un local de 6 m2 ouvrant... où elle cuisine désormais depuis près de 15 ans.
Serveuse en restauration, sa mère aime mijoter de bons plats pour la famille. Gamine, dans son petit village de Haute-Normandie, France sait déjà le goût du bon. Jacques, le père, est maquignon et n'ignore rien des qualités d'une bonne viande. Sa fille en sera marquée. "Je n'aime pas le poisson. J'en cuisine le vendredi, mais il faut vraiment que je me fasse violence", avoue-t-elle.
Elle ne regrettera jamais d'avoir un jour troqué sa blouse de serveuse pour un tablier de cuisinière. "Je pense qu'inconsciemment c'est ce que je voulais faire. Pourtant quand je faisais mes études, je me voyais bien à Paris dans un poste de gestionnaire. Aucun de ceux qui étaient avec moi en BTS n'ont d'ailleurs choisi la cuisine, à l'exception de Brigitte Guignery qui, elle, était bonne en tout." Et qu'elle a retrouvée 20 ans après l'école, à l'Auberge du Jarrier à Biot.
Flash-back et retour au Sofitel au sortir duquel le couple, fraîchement marié, se retrouve chez Sylvain Roiret. "C'est là, en salle, que nous avons appris le métier. Un jour, nous avons eu envie d'être chez nous", dit Michel.
Près de l'hôtel de ville, Chez Georges est en vente. Ce bouchon d'une trentaine de places jouit d'une belle réputation. France et Michel rachètent le fonds en mai 1989, avant de se porter acquéreur des murs 5 ans plus tard.
Les deux enfants du couple ont alors 6 et 4 ans. Mère de famille et cuisinière ? "Heureusement qu'ils sont nés avant que nous ayons acheté l'affaire. Nous avons dû prendre une nourrice pour la journée et le soir pendant 14 ans. Nous avons voulu les protéger de notre métier. Notre vie de restaurateur s'arrête quand nous passons la porte", dit France.
Et la vie de couple alors, lorsqu'on est ensemble au travail, puis à la maison ? "Nous avons 46 ans de mariage", blague Michel, expliquant que, depuis 23 ans, ils passent 24/24 heures ensemble. "Ce n'est pas un handicap, mais il faut deux caractères puissants. Nous n'avons jamais mélangé le travail et la maison", dit encore Michel. "Nous sommes très complémentaires", insiste France qui s'avoue impulsive, avec un mari plutôt 'bonne pâte'.
Cuisinière à Lyon, on évoque forcément les Mères. Mais France, qui avoue aimer cuisiner "pour les hommes dont les femmes n'ont pas le temps de le faire", n'ose s'attribuer le vocable. "Ce qui me plaît avant tout, c'est de cuisiner ce que j'aime manger : pot-au-feu, poulet au vinaigre, blanquette de veau, tablier de sapeur, salade de foies de volaille. Je ne suis pas lyonnaise, mais si l'on me dit que je suis dans la tradition, cela me fait plutôt plaisir."
Mère donc. Et au plein sens du terme qui... materne une clientèle fidélisée à l'image des habitués de la table n° 9, bijoutiers et marchands de tapis. Ils déjeunent ici tous les jours, et n'ont pas manqué un service depuis mai 1989 !
"C'est eux qui me boostent et me forcent à avancer. Je suis obligée de varier les plats et les menus. Bien sûr le métier n'est pas toujours facile physiquement pour une femme. Ce sont les jambes lourdes, l'arthrose dans les doigts... mais d'un autre côté, le travail permet de rester vive et dans le coup. C'est enrichissant et chaque client apporte quelque chose."
Echangerait-elle alors sa place dans son minuscule territoire ? "Je ne veux pas terminer en cuisine, tente-t-elle de se persuader en avançant ses arguments. Il faut que ce soit toujours impeccable. Je suis trop rigoureuse, trop ch... C'est une pression très forte et difficile à supporter. C'est ce qui me fait peur pour l'avenir. Je n'ai pas envie de péter les plombs. Oui, je pense que je ferais autre chose. A 46 ans, on n'est quand même pas vieux..."
En attendant, et pour le plus grand bonheur de ceux qui ont un jour franchi le seuil de son petit bouchon, elle continue. "Je suis une cuisinière de quartier", dit-elle.
J.-F. Mesplède zzz22v zzz18p

En dates

w 03/1958
Naissance de France dans l'Oise

w 1978
BTS de gestion au lycée hôtelier du Touquet Paris-Plage et rencontre de Michel au Sofitel de Lyon (né à Montluçon en 1957, école hôtelière de Gérardmer)

w 1979
Mariage de France et de Michel Deschamps

w 1983 et 1984
Naissance de Cédric et Nicolas

w 05/1989
Reprise de Chez Georges-Au Petit Bouchon

w 1994
Rachat des murs

w 03/2001
Bib gourmand au Guide Rouge

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L'Hôtellerie Restauration n° 2805 Hebdo 23 Janvier 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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