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Syndicat national des restaurateurs, limonadiers, hôteliers parisiens

En prise directe avec les professionnels

Cette première assemblée générale du SNRLH, après l'élection de Jacques Mathivat à la présidence du syndicat, était celle de la passation de pouvoirs entre le président Pierre Gauthier, qui a officié pendant 17 ans à la présidence du syndicat, et son successeur. C'était aussi l'occasion d'ouvrir le débat avec les adhérents sur les sujets les plus sensibles de leur quotidien aujourd'hui : la loi Aubry et les problèmes de recrutement.


Michel Bessière, Brasserie le Wepler

 
Allocution de Pierre Gauthier, président sortant.

 
Jacques Mathivat, président du SNRLH

 
Pierre-Eric Fleury, DRH du Groupe Flo


Françoise Petrucci, Ambassade d'Auvergne.

Une matinée entière consacrée aux débats animés par Patricia Le Naour, rédactrice en chef de L'Hôtellerie. Un public très attentif et concerné qui venait rencontrer d'autres chefs d'entreprise qui acceptaient de témoigner.
C'est Jacques Mathivat qui a ouvert les débats en rappelant la situation de la profession sur la RTT, les inquiétudes et les difficultés rencontrées par la profession face à la loi dite des 35 heures. Difficultés d'autant plus importantes que la convention collective nationale des CHR, signée en avril 1997, avait déjà instauré une réduction du temps de travail par étape allant de 52 heures à 43 heures pour certains. Et de préciser : "C'est d'ailleurs le 8 décembre prochain que, conformément à la CCN, la durée du temps de travail dans les CHR passera à 43 heures pour l'ensemble du personnel, en fait pour les veilleurs de nuit."
Quant à la situation actuelle concernant les négociations entre les partenaires sociaux sur la RTT, Jacques Mathivat rappelle, qu'en avril 1999, ils avaient obtenu du ministère du Travail la parution d'un décret au Journal officiel qui validait la durée du temps de travail fixée par
la convention collective, soit 43 heures. Ce qui permettait ainsi d'obtenir un délai supplémentaire pour négocier un accord de branche. Dès lors, le SNRLH a tout mis en œuvre pour y parvenir.
"En août dernier, nous pensions avec la CPIH et la Fagiht obtenir un accord de branche sur la base d'une réduction généralisée du temps de travail de 4 heures, faisant passer les entreprises qui étaient à 43 heures à 39 heures et celles qui étaient à 39 heures à 35 heures. Il s'agissait en fait de transposer la loi Aubry à notre situation particulière par une réduction du temps de travail de 10 % en maintenant la concurrence qui existait entre les différentes entreprises, notamment entre les chaînes hôtelières et les indépendants. Malheureusement, nous nous sommes heurtés d'une part au refus de l'Umih, mais aussi et surtout à celui des organisations syndicales des salariés qui revendiquent 35 heures."

La profession doit conclure un accord
Jacques Mathivat insiste sur la nécessité de parvenir à un accord, ceci dans l'intérêt des entreprises, et ce pour quatre raisons. Cet accord permettrait :
1. d'assurer une assise juridique pérenne au secteur des CHR en donnant un cadre juridique applicable à tous,
2. de prendre en compte les spécificités de la profession liées notamment aux fluctuations saisonnières et aux besoins de la clientèle,
3. de réduire le temps de travail par étape, de façon à donner non seulement du temps aux entreprises pour s'organiser, mais surtout pour trouver le personnel qui fait défaut actuellement,
4. de donner aux petites entreprises de moins de 50 salariés, qui représentent plus de 95 % du secteur des CHR, la possibilité de bénéficier d'aides financières absolument nécessaires pour compenser le coût de la réduction du temps de travail, sans avoir à passer par les accords d'entreprises, difficiles à négocier en l'absence de délégués syndicaux.
En outre, sans la prise en compte des 35 heures, il semble de plus en plus évident que les syndicats de salariés ne signeront probablement rien. Aujourd'hui, les négociations se poursuivent néanmoins. La majorité du collège patronal tente de parler d'une même voix, même s'il existe quelques différences entre les uns et les autres.
"Je dirais pour résumer que l'ensemble du collège patronal n'est pas contre l'application à terme des 35 heures qui permettrait, en faisant rentrer notre profession dans le droit commun, d'attirer davantage les jeunes vers nos métiers ainsi que les demandeurs d'emploi vers nos entreprises. Par contre, ces avancées doivent être acceptables économiquement, et ne pas mettre en péril la pérennité des entreprises et par conséquent celle des emplois", déclare Jacques Mathivat.
Il rappelle que le secteur des CHR est le 4e employeur de France, qui doit faire face à des charges sociales trop lourdes laissant une faible marge aux entreprises. Cette marge est comprise entre 2 et 4 % pour la majorité d'entre elles. Pour parvenir à un accord de branche, il faudrait donc que le ministère du Travail, avec l'accord du ministère des Finances, s'engage à donner à ce secteur d'activité les moyens de ses ambitions en lui accordant des aides financières spécifiques durables et réalistes. Il faudrait en quelque sorte que les aides financières prévues par la loi Aubry, qui s'appliquent aux entreprises des autres secteurs réduisant la durée de travail de 39 heures à 35 heures, soient doublées pour les CHR puisque ce secteur subirait une réduction de la durée du temps de travail de 43 heures à 35 heures, soit une réduction de 8 heures au lieu de 4 heures.
"Cependant, nous nous accordons tous à dire que nous nous méfions des promesses (si jamais on nous en faisait) car, malgré les engagements du gouvernement, la réduction des charges sur les avantages en nature nourriture, promise lors de la signature de la convention collective nationale, n'a toujours pas été suivie d'effet par le ministère du Travail, qui a laissé depuis 1999 les décrets permettant son application en attente. Pour ne pas dire en sommeil." La prochaine commission plénière se déroulera le 2 décembre prochain. "Nous avons encore l'espoir d'aboutir à un projet d'accord qui ne pourrait d'ailleurs être ratifié que lorsque le gouvernement se serait engagé sur un processus d'aides financières accordées à notre profession. Nous ne signerons pas sur les 35 heures en l'absence d'engagement ferme et définitif", prévenait le président Mathivat. Et d'ajouter : "A partir du 1er janvier 2001, en l'absence d'un accord de branche ou d'un décret dérogatoire, les entreprises de plus de 20 salariés risquent fort de connaître des conflits prud'homaux. La CGT et la CFTC menaçant en effet d'engager des procédures contentieuses pour une application des 35 heures. Face à cette situation, chaque chef d'entreprise est inquiet. Certains d'entre nous pensent négocier ou mettre en place une réduction du temps de travail pour nos salariés. C'est pourquoi le débat qui va suivre revêt une importance capitale, car ceux qui sont ici présents ont accepté de faire part de leurs propres expériences et d'en débattre ensemble."
Un des temps fort de cette matinée aura été les témoignages et les échanges avec des professionnels qui ont déjà mis en place une réduction du temps de travail dans leurs entreprises.
P. Carbillet

.Passation de pouvoirs

Pierre Gauthier, qui a présidé aux destinées du syndicat 17 années durant, a souhaité bonne chance à son successeur Jacques Mathivat qui, après avoir présidé la commission sociale, a été élu en octobre dernier à l'unanimité par le Comité directeur à la présidence du syndicat.
L'occasion pour le président sortant de rappeler que l'action syndicale se situe sur un plan réaliste, c'est-à-dire la réalité concrète de l'entreprise. "Le syndicalisme patronal ne doit pas être confondu avec le monde politique, et il ne doit pas avoir d'autres objectifs que la promotion de l'entreprise. C'est aussi unir des entreprises qui sont concurrentes et doivent gérer leurs affaires en toute indépendance." Il a tenu à remercier tous ses collaborateurs pour l'avoir aidé tout au long de son mandat.

 

Patricia Le Naour (L'Hôtellerie) : Comment la proposition RTT a-t-elle été accueillie dans vos entreprises ?

Michel Bessière (Brasserie le Wepler) :
En résumé on peut dire que la moitié des salariés était pour une réduction du temps de travail, plus particulièrement chez les salariés payés au fixe, et que l'autre moitié, surtout dans le personnel payé au pourcentage, souhaitait rester à 43 heures. Bien qu'il soit vrai que certains salariés au service désiraient aussi une RTT.

Pierre-Eric Fleury (DRH du Groupe Flo) : On ne peut pas faire de généralités. Car vous avez des salariés qui préfèrent gagner de l'argent, quand d'autres souhaitent accommoder leur vie quotidienne. Ces derniers voient arriver la RTT d'un très bon œil. Beaucoup de jeunes préfèrent privilégier leur vie familiale aux dépens de leur rémunération, mais là encore il ne faut pas généraliser. Mais en règle générale on peut dire que beaucoup de salariés sont très contents de bénéficier d'une RTT.

 

PLN : Comment avez-vous mis en place cette RTT dans vos établissements ?

P.-E. Fleury : La RTT pour le Groupe Flo concernait 4 000 personnes, et elle a été mise en place sur la base de 39 heures en décembre 1999. Il nous a fallu plus d'un an de préparation pour l'organiser. Selon les entreprises, la RTT a été différente. Il a fallu étudier les organisations du travail. Le point positif a été l'étude de la rentabilité dans les établissements. En effet, on s'est rendu compte que dans certains restaurants, plus particulièrement en province, on faisait déjà 39 heures naturellement. Le rythme imposé par la clientèle était sur la base de 39 heures en fait, alors que sur les plannings la base de travail était de 43 heures. Globalement, on a amélioré la productivité du travail grâce à l'étude de l'organisation, c'est-à-dire étudier les tâches de chacun.

M. Bessière : Il a fallu faire preuve d'originalité et s'adapter. Avant on avait des horaires standards, alors que maintenant on peut faire commencer les salariés à midi ou à 20 heures. Un autre problème pour notre secteur concerne les coupures. Il est difficile de ne pas en avoir. Cette RTT s'est traduite malgré tout par l'embauche de deux salariées en mi-temps.
Cette RTT est différente selon les services et les salariés. Certains préféraient rester à 40 heures (soit 39 heures + 1 heure), ce qui leur donne 6 jours de congés supplémentaires au titre de la RTT. Quand d'autres ont 2,5 jours de repos hebdomadaire avec des journées continues et des jours avec coupures dans une même semaine. Le contrôle des horaires ne se fait pas avec une pointeuse, mais avec un cahier d'émargement signé à l'entrée et à la sortie.
En fait, il faut bien préciser qu'il n'y a pas d'organisation type pour la RTT, mais plusieurs qui dépendent des cas particuliers de chaque entreprise.

 

PLN : Avez-vous eu droit à des aides ?

P.-E. Fleury : Nous sommes dans une situation instable, car on peut avoir baissé le temps de travail et bénéficié des aides qui peuvent être remis en cause dans un an, car en passant de 43 à 39 heures, vous n'êtes pas dans le cadre de la loi Aubry qui parle de 35 heures.
Rien n'est écrit dans la loi ni dans un décret justifiant le bénéfice d'aides pour une telle réduction. On négocie dans le brouillard le plus total. Ça va même plus loin. On a appliqué la réduction de 50 % sur les avantages en nature selon les déclarations de Michelle Demessine. Mais maintenant, l'Urssaf réclame le paiement des cotisations car le décret, qui devait instaurer ce principe, n'est toujours pas paru.
La préoccupation du syndicat de vouloir conclure un accord de branche est fondamentale, afin que l'on puisse bénéficier d'exonérations de charges sociales. Je pense que cela sera indispensable d'avoir ces exonérations pour survivre économiquement.

Jacques Mathivat : Notre secteur est soumis à plusieurs flous juridiques. Normalement on devrait bénéficier des aides financières, mais la plupart des entreprises passent de 43 heures à 39 heures et, au ministère, ils répondent que pour bénéficier des aides dans le cadre de la loi Aubry, il faut une réduction d'horaires sur la base de 35 heures. Le gouvernement pourrait par un décret régler le problème, mais à chacune de nos demandes, il s'est contenté de répondre que cela était à l'examen et qu'il y réfléchissait.
En outre, les entreprises risquent des conflits prud'homaux avec des salariés qui pourraient réclamer l'application des 35 heures dans leur entreprise faute d'accord de branche.
Le décret d'avril 1999, sur lequel on s'appuie pour l'instant, va finir par ne plus avoir de portée ni de force juridique en 2001. Donc là aussi, on est dans un flou juridique.

Didier Chenet (Oh!.. Poivrier!) : Je tiens à préciser une notion. Il ne faut pas parler d'aide dont on peut bénéficier en contrepartie de la mise en place de la RTT. Ce ne sont pas des aides, mais des allégements de charges sociales. Il faut employer le bon terme. En fait, on bénéficie d'un taux de charges sociales qui redevient raisonnable. C'est tout.

 

PLN : La DDTR selon les régions a des positions différentes. Certains ont droit aux exonérations et d'autres pas. Qu'en est-il dans votre cas ?

M. Bessière : On a signé un accord RTT, et c'est la DDTR qui nous a contactés par la suite. Les aides de l'Etat représentent 70 à 80 % du coût engendré par la réduction du temps de travail. On a mis 9 mois pour assumer financièrement le passage aux 39 heures. Aujourd'hui, on commence à respirer.

P.-E. Fleury : On a d'abord subi les foudres des contrôleurs de l'Urssaf qui nous ont dit qu'une réduction de 43 heures à 39 heures, cela n'existe pas, et qu'on ne pouvait bénéficier des exonérations de charges. Ce à quoi on leur a expliqué qu'ils avaient un devoir de contrôle de l'application de la RTT sur un bulletin de paie, mais qu'ils n'étaient pas là pour étudier le contenu du texte. Ils ont reconnu les faits.
Il faut absolument rappeler que le contenu de l'accord de RTT, c'est la prérogative de la DDTR qui peut dire si cet accord respecte ou non la loi Aubry.

J. Mathivat : Ce que demandent les salariés, c'est qu'à terme, ils veulent rentrer dans le droit commun. Si on regarde les conditions de recrutement à l'heure actuelle, elles sont très difficiles. La pénurie de personnel peut avoir plusieurs explications, notamment en raison des conditions de travail. Conditions qui rendent difficile une vie de famille et en contrepartie des contraintes horaires plus lourdes. Ce n'est pas logique qu'éternellement cette profession ait de telles conditions de travail plus dures où les salaires ne sont pas excessivement élevés. On peut comprendre les demandes des salariés, et il faudra bien évoluer face à cette demande et finir à terme par rentrer dans le droit commun, mais à la condition que nos entreprises puissent le supporter financièrement. C'est pour cela que nous devons avoir en contrepartie des baisses de charges sociales suffisantes. Il faut rappeler que la masse salariale dans nos entreprises est importante, car elle représente 40 à 50 % du chiffre d'affaires.

 

PLN : Que conseillez-vous pour les entreprises de plus de 20 salariés ?

J. Mathivat : Je conseille tout d'abord pour les entreprises de moins de 20 salariés d'attendre la conclusion d'un accord de branche qui devrait arriver, sinon elles seront elles aussi dans un flou juridique. Quant aux entreprises de plus de 20 salariés, elles doivent essayer de négocier un accord qui peut leur permettre de bénéficier des baisses de charges.

 

PLN : On dit que dans la profession il existe de plus en plus de problèmes de recrutement. Le constatez-vous personnellement ?

Françoise Petrucci (Ambassade d'Auvergne) : Etant née dans une marmite de la profession, j'ai toujours entendu mes parents parler de ce problème de recrutement. C'est pour cela que je reste optimiste, même si on constate des phénomènes nouveaux.

D. Chenet : Les difficultés de recrutement ne sont pas plus importantes aujourd'hui, mais c'est surtout un problème d'image que nous avons. Les horaires affichés sont de 43 heures, mais on ne les fait pas. Quand nous aurons amélioré le respect des horaires, y compris des horaires actuels, on aura une autre image. En outre, je pense que les gens en formation sont plus souvent considérés comme de la main-d'œuvre à bas prix plutôt que des gens que nous sommes en train de former. Il faut donc leur consacrer une attention particulière.

PLN : Comment le secteur est-il vécu par les jeunes ?

F. Petrucci : Le contenu de nos professions est ignoré par les jeunes. Ils sont attirés par cette profession, mais ne savent pas ce qu'ils vont trouver. Lors des derniers salons professionnels sur le recrutement, on peut constater les mêmes questions qui reviennent souvent : Avez-vous des congés payés ? Avez-vous un repos hebdomadaire ? Combien d'heures travaillez-vous par semaine ?
Une certaine image nous colle à la peau. Il ne faut pas être contre toute avancée sociale, sinon on ne trouvera plus de personnel. Il faut aussi faire savoir aux autres comment cette profession a évolué.

 

PLN : Quel est votre constat sur ces problèmes de recrutement ?

Dominique Brechon (formatrice Asforest) : Le problème de recrutement a toujours été. Aujourd'hui, quand le chômage baisse, la pénurie de postulants, c'est normal. Passer plus de temps pour recruter c'est aussi normal. Il n'y a pas de solution miracle. Mais le recrutement, c'est une technique. Aujourd'hui, tous les professionnels acceptent de se former à l'hygiène, à la sécurité, mais ne se préoccupent pas du recrutement.
Il faut savoir que le recrutement, c'est une technique avec des procédures. La phase de recrutement ne se conçoit pas toute seule. Derrière, il y a la phase d'adaptation et de management. Un recrutement correct peut aboutir sur un échec sans adaptation.
Le recrutement n'est jamais dissocié du reste. Le besoin de considération est important. Le personnel doit être pris autant en considération que le client. Ce qui permettra d'avoir du personnel de qualité.


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L'HÔTELLERIE n° 2694 Hebdo 30 Novembre 2000


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