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L'événement
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Le procès des 10 de la Confédération paysanne à Millau

Mondialisation, malbouffe et Mc Donald's sur le banc des accusés

Les 30 juin et 1er juillet derniers, plus de 40 000 personnes se sont rassemblées à Millau, dans l'Aveyron, à l'occasion du procès de José Bové et de neuf membres de la Confédération paysanne. Ils étaient accusés d'avoir démonté, l'été dernier, le chantier du McDonald's de la ville.

Sandwich merguez contre hamburger

A chacun sa façon de militer. Si les manifestants les plus "durs" ont choisi de rester devant le palais de justice le temps du procès, d'autres ont plébiscité les sandwiches merguez, jambon ou saucisse fraîche.

C'est un procès particulier qui s'est déroulé, le week-end dernier, à Millau, une ville touristique située dans l'Aveyron, juste au-dessous du plateau du Larzac. Dans l'enceinte du tribunal, la cour jugeait José Bové et neuf autres membres (1) de la Confédération paysanne pour "dégradations en réunion, complicité de dégradation en réunion, menace de destruction ou de détérioration dangereuse pour les personnes sous condition". Mais, dans les rues de la ville, un autre procès s'est joué. Celui de la mondialisation, de la malbouffe et de McDonald's, dans une ambiance de fête et de militantisme de toutes sortes.
Le 12 août 1999, dénonçant la taxation à 100 % décidée par les Etats-Unis sur le roquefort, José Bové et une cinquantaine de personnes ont démonté le chantier du restaurant McDonald's, situé sur les hauteurs de Millau. Un "acte volontaire, à visage découvert", comme l'a expliqué José Bové. "A cette époque, nous étions dans une situation étrange. L'Organisation mondiale du commerce (OMC) venait de condamner l'Europe car elle refusait d'importer du bœuf aux hormones des Etats-Unis. Ces derniers ont alors eu le droit de taxer leurs importations de roquefort", a rappelé le meneur, lors du premier jour du procès. "Nous n'avions aucun recours possible face à une décision irrévocable de l'OMC. L'enjeu était très important : un organisme supranational avait pris une décision qui concernait notre vie quotidienne, en contradiction totale avec nos intérêts et notre façon de faire. La seule façon de réagir consistait à sortir de la légalité."

"Contre la Mac Domination"
Bilan : 728 000 francs de dégâts pour McDonald's qui entre temps a retiré sa plainte, et 47 000 personnes rassemblées durant deux jours pour célébrer l'antimondialisation et mettre McDonald's sur le banc des accusés. Protégé par une dizaine de cars de police, le fast-food de Millau est d'ailleurs resté fermé durant le procès, tandis que le centre-ville prenait des allures de kermesse. "Mange bon et panse bien." Dans les rues du centre, les banderoles renchérissaient à coup de slogans : "Contre la Mac Domination", "Les multinationales ne feront pas la loi".
Les cafetiers et les restaurateurs (lire ci-contre) étaient également mobilisés. Pour des raisons de sécurité et d'organisation, ils avaient tous fermé leurs salles, installé des comptoirs sur les trottoirs façon bodega.
Et prohibé le coca-cola. Les sandwiches et les boissons servies dans des gobelets en plastique étaient à 10 francs. "J'ai rarement vu autant de monde. C'est une très bonne opération commerciale", se félicitait Jacques, du bar du Mandarous, où l'on avait prévu de vendre un millier de sandwiches à la saucisse fraîche grillée, au jambon ou au roquefort. Mais ce sont les vendeurs en camionnette, davantage gagnés à la cause commerciale que citoyenne, qui ont réellement "fait des affaires". En soirée, aux abords de la Maladrerie où se déroulait le concert, ils demandaient entre 25 et 30 francs pour un sandwich.
L. Anastassion

(1) Les autres prévenus sont : Jean-Emile Sanchez-Matéo, Christian Roqueirol,
Raymond Fabrègues, Léon Maillé, Frédéric Libot, Jean-Paul Delaitte, Alain Soulié, Richard Maillé et Gilbert Fénestraz.

 

  

1 million de francs de dégâts ? 750 000 francs ? La défense des 10 membres de la Confédération a discuté la qualité des expertises financières réalisées à la suite de l'opération du
12 août 1999. Présent lors du démontage de son restaurant, le gérant, Marc Dehani, a donné sa version des faits : "Nous avions pris soin de débarrasser le chantier de tous les matériaux. Vers 11 heures du matin, 3 ou 4 tracteurs sont arrivés. Je pensais que nous allions entamer une discussion, mais tout de suite les dégradations ont commencé. Vers 12 heures, toutes les cloisons avaient été arrachées, les chambres froides détruites, les canalisations bouchées."

Démontage ? Saccage ? Difficile, selon les avocats des accusés, d'évaluer le degré de dégradation d'un chantier dont on ne connaît pas le niveau d'avancement. Un premier constat d'huissier, suivi d'un constat de police, ont permis de conclure à un préjudice financier d'un million de francs. Un chiffre ensuite évalué à la baisse (750 000 francs) par le cabinet de réassurance de l'enseigne McDonald's. Enfin, le montant total des devis établis par les entreprises locales de reconstruction se chiffrait à 728 828,28 francs. Une somme déjà versée par les assureurs à McDonald's.
Verdict le 13 septembre
Acclamés par la foule massée devant le tribunal, à chacune de leurs apparitions à l'une des fenêtres de la salle d'audience, José Bové et ses 9 collègues devront attendre le 13 septembre pour connaître leur sort. Alors que le public demandait la relaxe, le procureur de la République a requis 10 mois de prison dont 9 avec sursis contre le leader de la Confédération paysanne. Si les juges suivent ce réquisitoire, José Bové, qui a déjà effectué 21 jours de détention provisoire, risque encore une dizaine de jours de prison.

"José Bové et la Confédération paysanne se sont trompés de symbole"


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L'HÔTELLERIE n° 2673 Hebdo 6 Juillet 2000

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