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L'événement
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Quatre associations de restaurateurs se désolidarisent de l'Umih

Création de la Fédération des professionnels indépendants de la restauration

Fronde ou ras-le-bol ? Quatre associations de restaurateurs professionnels ont décidé de se fédérer en syndicat avec, pour objectif, la défense du métier de cuisinier. Leurs spécificités n'étant pas, selon eux, suffisamment reconnues au sein de l'Umih, à laquelle la plupart appartiennent, ceux-ci ont également décidé d'un rapprochement avec la CPIH.

Peut-on raisonnablement rassembler, sous une même bannière, des métiers aussi éloignés que celui exercé par un cuisinier qui officie dans un établissement de chaîne et le travail d'un professionnel qui cuisine chez lui des produits frais, en fonction de sa clientèle et de son inspiration ? La question pourrait prêter à sourire si l'avenir d'un patrimoine, celui de la cuisine française, n'était en cause. En retraçant l'historique du désaccord qui oppose une partie des cuisiniers à la démarche de la FNIH (l'Umih aujourd'hui) Fernand Mischler a montré la difficulté, voire l'impossibilité, de défendre d'une même voix toutes les branches de l'industrie hôtelière. Ce constat, le président des Maîtres cuisiniers de France ne l'a pas fait de bon cœur. Il l'a répété à plusieurs reprises lors des débats qui allaient émailler la création officielle de la Fédération des professionnels indépendants de la restauration, entérinée la semaine dernière à Paris. "Nous ne sommes pas là pour être calife à la place du calife, a-t-il lancé, mais parce que nous sommes dépassés par un environnement extrêmement défavorable à nos métiers."
A l'origine du désaccord, une succession de revirements dans les rangs du syndicat de la rue d'Anjou qui a entraîné, progressivement, la mise en sommeil de la reconnaissance professionnelle et du statut d'artisan. Sans faire pour autant avancer l'épineux dossier de la réduction du temps de travail. Le 8 juin 1999, un colloque sur l'avenir de la restauration française, organisé par les Maîtres cuisiniers de France, la chambre syndicale de la Haute Cuisine française, les Jeunes restaurateurs de France et Euro-Toques, allait mettre le feu aux poudres. Chiffres à l'appui, Bernard Fournier, Dominique Crepet, Patrick Fulgraff, Fernand Mischler, Antoine Westermann et Philippe Fructus dénonçaient alors les effets pervers de la loi Aubry et la nécessité de mettre en place des "aménagements spécifiques au secteur". Depuis ? Rien, sinon le retranchement de l'Umih derrière le décret du 30 mars 1999 autorisant les CHR, dans le cadre de la convention collective, à rester à 43 heures.
"A ce jour, a répété Fernand Mischler, les discussions ne sont pas plus avancées." Les restaurateurs craignent désormais que le gouvernement tranche de manière autoritaire dans les divergences qui opposent patronat et salariés. Les reproches faits ici à l'Umih portent sur son "incapacité à obtenir un accord de branches" après avoir "obstinément et pendant trop longtemps" choisi la politique de la chaise vide.

Franchir le Rubicon
Francis Attrazic, président de la FNRF au sein de l'Umih, assistait à cette réunion parisienne qui était ouverte à tous les professionnels de la restauration, quelle que soit leur obédience. Passant de l'attaque à la défensive, celui-ci devait rapidement se rendre à l'évidence : les quatre associations présentes, ces quatre mêmes qui étaient montées au créneau un an plus tôt, sont désormais déterminées "à prendre en charge" elles-mêmes leur avenir. Bien sûr, les risques existent. La création d'un nouveau syndicat de la restauration n'est pas seulement l'expression d'un échec dans la tactique de l'Umih, elle va également à l'encontre des préconisations gouvernementales qui tendent à réduire le nombre des interlocuteurs.
Pour parvenir à ses fins, la Fédération des professionnels indépendants de la restauration a décidé d'opérer, entre autres, un rapprochement officiel avec la Confédération des professionnels indépendants de l'hôtellerie qui abritera d'ailleurs son siège rue Barye.
Pour Roland Magne, ce rapprochement n'est pas une "déclaration de guerre aux chaînes. Celles-ci, estime le président de la CPIH, gagnent leur vie à la corbeille" tandis que les restaurateurs professionnels gagnent la leur "derrière les fourneaux", sans cesse confrontés aux difficultés d'embauche et de gestion. "Nous ne faisons pas le même métier et n'avons pas les mêmes revendications", a-t-il martelé.
Venu soutenir les Alsaciens, montés en nombre lors de la réunion, Jean-Louis Clauss, président du Bas-Rhin (et président national des cafés de l'Umih), a admis que la balance avait tendance à pencher souvent du même côté. "Je reconnais que les chaînes font obstacle quand ça les arrange", a-t-il dit, ajoutant à propos des négociations en cours, "que la fédération (l'Umih) ne faisait sans doute pas assez vis-à-vis des réductions de charges". Jean-Louis Clauss a toutefois rappelé l'investissement personnel d'André Daguin dans le dossier de la TVA.
"Reste à franchir le Rubicon", se sont exclamés après trois heures d'échanges et d'une même voix Fernand Mischler, Antoine Westermann, Georges Rousset, Michel Blanchet et Jean-Jacques Daumy. Maîtres d'œuvre, désormais, d'un syndicalisme qui cherche à préserver un savoir-faire. Celui du cuisinier français.
S. Soubes

Où les contacter ?

Fédération des professionnels indépendants de la restauration (FPIR)
2, rue Barye
75017 Paris

 

Les objectifs de la Fédération

1 Réunir les professionnels traditionnels indépendants
"Si rien n'avance au niveau des charges sociales, du taux de TVA, de la fiscalisation des charges sociales, c'est que la restauration traditionnelle indépendante n'a plus d'identité. Les pâtissiers, boulangers et bouchers-charcutiers sont autrement mieux organisés. Grâce à leur statut artisanal, ils ont une identité et lorgnent de plus en plus sur nos métiers. Les charcutiers se sont trouvé un nouveau label : chef charcutier-traiteur. Et arborent toque et veste de cuisinier. Au train où vont les choses, ils représenteront bientôt la restauration traditionnelle, non pas celle des étoiles, mais la petite et moyenne restauration qui constitue la base de la restauration française..."

2 Retrouver une identité professionnelle à travers le statut d'artisan
"Cuisinier, maître d'hôtel et sommelier forment les trois métiers de la restauration. Implicitement, leur caractère artisanal est déjà reconnu puisque les trois métiers sont autorisés à participer au concours du Meilleur ouvrier de France. Il existe déjà dans ce pays de nombreuses associations régionales de cuisiniers connues, moins connues ou pas connues du tout, mais qui ont en commun d'exercer le même métier, de développer les mêmes savoir-faire et de les transmettre. C'est à eux que nous nous adressons et à tous ceux non constitués mais qui travaillent dans le même sens. Cela suppose un changement du code Naf, une dérogation pour les entreprises de restauration de plus de 10 salariés, mais tous ces obstacles sont d'ordre réglementaire et un règlement peut en remplacer un autre. Ce qui compte, c'est notre volonté et notre détermination en faveur de la reconnaissance artisanale de notre métier."

3 Trouver des partenariats avec l'agriculture et d'autres fournisseurs
"Les cuisiniers sont les meilleurs ambassadeurs des produits du terroir car à travers les recettes qu'ils créent, ils révèlent toute leur diversité."

4 Obtenir des moyens pour réussir la réduction du temps de travail
"L'étude réalisée par nos soins au printemps 1999 est toujours d'actualité. Elle démontre que salaires et charges représentent près de 50 % de notre chiffre d'affaires. Comment, dans ces conditions, réduire encore le temps de travail et augmenter les effectifs ? Oui à la semaine des 39 heures, mais avec des moyens !"

 

Ils ont dit

Francis Attrazic : « En fait, il n'y a pas de désaccord sur les objectifs. »
Jean-Jacques Daumy : « Ce n'est pas ce qui s'est passé hier qui nous intéresse. Mais ce qui se passera demain. »
Antoine Westermann : « Il y a trop longtemps qu'on attend, trop longtemps qu'on espère. Il faut qu'il se passe quelque chose. »
Jean-Louis Clauss : « Je vous soutiens dans votre action. Mobilisez, devenez une forme de pression et de proposition qui vous permette d'être présents au sein des structures syndicales. Nous n'en serons que plus représentatifs. »
Alain Dutournier : « Apprenons à nous faire entendre autrement qu'en pleurant. Soyons une force de propositions. Montrons notre force et notre dynamisme. Nous devons savoir évoluer et nous adapter. »
Michel Blanchet : « Qu'allons nous devenir demain, nous, les indépendants, si les gens ne veulent plus venir travailler chez nous ? Nous n'avons pas été soutenus par les instances syndicales. Nous devons nous prendre en charge avant qu'il soit trop tard. »


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L'HÔTELLERIE n° 2671 Hebdo 22 Juin 2000


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