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Le brunch

L'engouement se confirme

Il y a quelques années encore, le brunch, tout droit débarqué des habitudes anglo-saxones, n'intéressait qu'une niche d'amateurs. Aujourd'hui, il semble qu'il ne soit plus du domaine de l'exception même s'il est plus familier à Paris et dans les grandes villes de province, et s'il attire avant tout une clientèle urbaine ou des touristes clients d'hôtels.


Les clients recherchent d'abord la bonne humeur, une ambiance conviviale et
du choix.

Le brunch, contraction de breakfast et de lunch, est un repas généralement dominical à mi-chemin entre le petit-déjeuner et le déjeuner, et a débarqué sur notre continent il y a environ une vingtaine d'années. Son apparition en France est née de l'initiative de quelques hôteliers avant-gardistes, y voyant notamment une manière de s'ouvrir vers la clientèle urbaine. Un des tout premiers établissements à s'être jeté à l'eau est Le Méridien Etoile avec sa formule "Jazz". A la mode dans les années 80, le brunch est plus ou moins passé à la trappe la décennie suivante pour finalement renaître de ses cendres à l'entrée du nouveau millénaire. Aujourd'hui, et plus particulièrement dans les quartiers animés et branchés de la capitale, les établissements qui osent le brunch sont légion.

Du brunch fastueux au brunch relax
Le brunch n'est pas uniforme, et d'un établissement à l'autre, les formules n'ont pas grand-chose en commun. On a d'abord découvert le brunch à l'hôtel. Celui des grands établissements est généralement remarquable par son côté gargantuesque. Le Méridien Montparnasse ou le Marriott Champs-Elysées, par exemple, organisent des buffets pharaoniques à l'attention des grosses faims dominicales. On y trouve de tout et en quantité : hors d'œuvre, plats froids ou chauds, fromages, desserts. A l'heure du brunch, thèmes, animations et spectacles y sont monnaie courante. Grands événements et dates en tout genre sont alors une occasion de faire la fête et de se démarquer. Le 1er janvier 2000, les brunches furent à leur apogée et tenaient du registre de l'insolite. Le Trianon Palace, le Plaza Athénée, le Prince de Galles ou le Ritz mettaient en scène un brunch revêtu de ses plus beaux atours. Au Marriott Champs-Elysées, les occasions de communiquer de manquent pas : dimanche Pascal, fête des Mères..., présenté sur un fond de musique jazz. Pour continuer à "bruncher" en musique, le Sir Winston accueille ses clients autour d'un brunch-gospel ; au Prince de Galles, un pianiste accompagne les repas. Mais tout travail mérite salaire. Et pour obtenir un résultat digne de ce nom, l'investissement est loin d'être négligeable, comme le prix de vente d'ailleurs. Il faut compter 280 F par personne chez Marriott, et 290 F au Prince de Galles. Mais c'est un mal nécessaire, question d'image de marque. En attendant, point de salut si la rentabilité n'est pas au rendez-vous. "Nous avons lancé le brunch pour plaire aux habitués et fidéliser notre clientèle. Mais il ne faut pas se leurrer, on ne pourrait maintenir la formule si ce n'était pas rentable", explique le directeur commercial d'un hôtel parisien.

Des brunches à toutes les sauces et pour tous les goûts
Le brunch des cafés, restaurants ou salons de thé est souvent proposé dans un registre plus convivial, moins sophistiqué mais pas forcément moins insolite. Bien au contraire. En attendant, si les formules se succèdent à la pelle, elles ne se ressemblent pas. Pour les puristes, il existe des endroits où l'on peut "bruncher" façon outre-Manche. Au Bombay Café à Paris, on se croirait quelque part en Angleterre dans la salle des petits-déjeuners d'un hôtel de charme britannique. Le Coffee Parisien, l'A Priori Thé, et le Tee and Tattered Pages, dans la capitale, proposent aussi de vrais breakfasts à l'anglaise ou à l'américaine loin de ces formules composées d'ersatz et d'à-peu-près. "Nous n'avons pas de formules brunch à proprement parler, mais nous offrons à la carte tous les ingrédients, du bagel veggie au chopped steak, en passant par l'eggs benedict. Notre établissement ressemble aux dinners américains, ouverts non-stop, sept jours sur sept", explique Ariel Durand, responsable du Coffee Parisien. Mais hors des sentiers battus et surtout loin de notre occident, on peut aussi dénicher des lieux où il fait bon "bruncher". Falafels, balbekia, sambousk et autres spécialités proche-orientales sont les pièces maîtresses du brunch de La Reine Zénobie, à Paris toujours. Chez Les Filles, on peut déguster un brunch berbère particulièrement fameux. A La Esquina, on "brunche" au rythme de l'Amérique latine avec un mélange de chili, guacamole et œufs brouillés, pour les amateurs. Pour une ambiance des plus décontractées et un brunch bon marché, les établissements J'ai Une Idée et Le Pain Quotidien font complètement l'affaire. Œufs, bacon, pommes sautées, jus de fruit, pancakes et thé ou café se savourent au prix modique de 40 F pour le premier. Au Pain Quotidien, viennoiserie, œufs pochés ou à la coque, et jus de fruit sont offerts pour un prix très abordable (entre 30 et 45 F) en solo ou à de grandes tablées. De plus en plus enfin, des brunches à la thématique atypique voient le jour. Pour preuve, tous les dimanches matin, l'hôtel Claude Bernard à Paris, propose un "brunch psycho" animé par le psychologue Michel Labbe. Comment peut-on expliquer l'engouement pour les brunches ? Leur aspect convivial, chaleureux, leur simplicité et leur tendance ludique sont à l'origine de leur succès. L'envie des consommateurs de découvrir autre chose, de manger autrement les attire irrésistiblement vers le brunch. La formule permet d'associer sorties et moments de détente entre amis ou en famille. C'est pourquoi le brunch séduit surtout des couples et leurs enfants. Certains établissements ont compris l'intérêt de proposer des brunches spécialement dédiés aux bambins. Le 115, à Villeurbanne, organise un brunch avec menu spécial et toutes sortes de divertissements pour les moins de 12 ans, au prix de 40 francs par personne. Quand ils n'ont pas réfléchi à un moyen d'amuser les petits, la majorité des restaurants qui propose le brunch ont au moins une formule ou un tarif enfant. Car, sans conteste, ce repas pantagruélique dominical est une affaire de famille. "Nous accueillons alors une clientèle très différente de la clientèle des autres services (déjeuners et dîners). Le brunch dominical séduit essentiellement des familles mais aussi quelques touristes", rapporte Véronique Jacrot, responsable administrative au 115. Au Coffee Parisien, parmi la clientèle, les touristes ne sont pas des parents pauvres. "Nous avons même une famille de Texans qui vient régulièrement pour se ressourcer", raconte Ariel Durand.

La clé du succès
Pas besoin d'une thématique très élaborée ni d'un service très sophistiqué pour réaliser le brunch idéal. La réussite de la formule est avant tout suspendue à des principes élémentaires en matière de restauration : qualité des produits, de l'accueil, efficacité du service, générosité dans la diversité. "Le Coffee Parisien a toujours eu le vent en poupe, car c'est un spécialiste du brunch et sa notoriété n'est plus à faire. La qualité est là, la carte propose des valeurs sûres, toujours disponibles. Quand un client vient, il sait ce qu'il va trouver", revendique Ariel Durand. Un cadre sympathique ainsi que la variété des produits font aussi partie des critères de sélection d'un brunch. "Nos clients recherchent d'abord la bonne humeur, une ambiance conviviale et du choix", confirme Marianne Carabin, responsable du Café Charbon, dans le XIe à Paris. L'atmosphère d'un brunch se doit d'être particulièrement chaleureuse et conviviale, moins pressée qu'au déjeuner et plus détendue encore qu'au dîner. "Chez nous, beaucoup de gens arrivent seuls et repartent accompagnés", souligne même un restaurateur, le sourire en coin. "Des liens se tissent avec une étonnante facilité." Formidable moment de détente ou de récréation et nouveau vecteur social, le brunch donne l'impression d'avoir tout pour réussir. Pourtant rien n'est moins sûr. Car si à Paris le brunch trouve toujours des émules, en Province, ce n'est pas systématiquement le cas. Celui du Café de la Mode à Marseille n'attire pas les foules. Rares sont d'ailleurs les établissements de la ville à proposer ce petit-déjeuner amélioré. Selon Monique Venturini, responsable de l'établissement, "le brunch n'est pas adapté à la clientèle des villes du sud. Les mentalités et les goûts en matière de restauration sont tout à fait différents de ceux de Paris". En France, le brunch a un avenir, c'est certain. Mais cette nouvelle façon de se restaurer, antinomique avec le déjeuner dominical rituel, n'est pas encore tout à fait entrée dans les mœurs.
A. V.

« D'un établissement à l'autre, les formules n'ont pas grand chose en commun »


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L'HÔTELLERIE n° 2669 Supplément Economie 08 Juin 2000


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