Les Mouettes, 67 ans d'existence
Les Le Faouder travaillent en famille. Niché entre mer et marécages, leur établissement, ancien café de plage, montre l'exemple d'une entreprise indépendante ayant su allier, toujours au bon moment, tradition familiale et modernité.
Les promeneurs qui ne connaissent pas encore la
région sont étonnés de découvrir, caché entre mer et marécages, ce havre de paix et
de gourmandise. Le bâtiment, volontairement discret, bénéficie sans doute de l'un des
plus beaux emplacements à proximité de Lorient, les pieds dans l'eau, fenêtres et
terrasses ouvertes sur l'île de Groix, l'île des thoniers. L'hôtel Les Mouettes, à
Larmor-Plage, fait figure d'institution. Créé en 1933, ce 2 étoiles a d'abord été
café de plage. C'était une "baraque française", comme on les appelait
autrefois, montée sur pilotis, avec des murs en bois et un toit en papier goudronné.
Huguette Le Faouder se souvient de sa mère accueillant les premiers congés payés, puis
de son père se lançant dans la construction de douze chambres, au cours de l'année
1947. La pension de famille fonctionne uniquement l'été. Douches et eau chaude ne seront
installées qu'en 1961, date de la passation de pouvoirs entre Huguette et sa mère.
"Notre maison a toujours eu une bonne renommée, dit-elle en feuilletant avec
émotion l'album de photos de l'établissement. Nous faisions les mariages, les
baptêmes, les communions. Nous retrouvions les gens sur plusieurs générations..."
Le mari d'Huguette était ajusteur à l'arsenal. A l'image de sa mère, c'est à bout de
bras qu'elle tient l'établissement et élève ses enfants dans le deux pièces que la
famille s'est octroyée au-dessus du bistrot. Les Mouettes n'est pas encore
l'établissement coquet que fréquentent aujourd'hui les joueurs du FC Lorient en période
hivernale. Le site est protégé. L'obtention du permis de construire va prendre vingt
ans.
7 millions de francs
En 1988, Huguette abandonne volontairement fourneaux et direction. Ses enfants, Gérard Le
Faouder (de formation gestion commerciale, il a notamment suivi le Cephotel de Vannes) et
Huguette Hélou (école hôtelière de Quimper) prennent la relève, permis de construire
en poche. Une saine ambition les habite. Faire du café des Mouettes une référence.
"Nous avions l'emplacement mais pas encore l'argent", explique Gérard.
Coût estimé de l'opération : 7 millions de francs. "Le financement a été
réalisé avec l'aide, principalement, de la Société de Développement Régionale et du
Crédit Maritime. Cela n'a pas été simple, mais notre ténacité a eu le dessus."
Le 29 juin 1989, après 8 mois de travaux, l'hôtel-restaurant Les Mouettes est inauguré.
Un bel établissement, comprenant désormais 21 chambres et une salle de restaurant de 70
places. La presse locale salue la nouvelle structure et le courage de nos jeunes patrons.
"Cette affaire nous a toujours tenus à cur et il n'était pas question de
décevoir." L'établissement ainsi reconstruit, rénové, agrandi s'adresse à la
clientèle locale, aux estivants mais s'est également tourné vers la clientèle
d'affaires. Une salle de séminaire est à disposition : "C'est une salle de 20
places qui correspond à la taille de l'hôtel", souligne Gérard. Parmi les
habitués, un couple de Parisiens vient passer quatre semaines de vacances ici depuis...
1947. Sans doute un record. Dans son édition 2000, le Guide Rouge (Michelin)
indique à propos des Mouettes : "Une douce quiétude, à peine troublée par le
cri des mouettes, règne dans cet hôtel moderne baigné par les flots de l'anse de
Kuerguelen."
Fraîcheur et qualité
Interrogé sur sa gestion, Gérard précise : "Nous sommes une vingtaine de
personnes et l'établissement fonctionne toute l'année. Nous n'accueillons pas de groupe
en dehors des séminaires. Le taux de remplissage moyen annuel atteint 75 % avec un
effectif quasiment fixe à l'année. Les gens qui travaillent ici n'ont pas envie de
partir. Je crois que cela montre que nous sommes dans la bonne direction. Nous
investissons aussi souvent (de 120 000 à 200 000 F presque tous les ans)." Le
parc des téléviseurs a été entièrement changé il y a 2 ans. L'année dernière, la
façade a été ravalée et les moquettes renouvelées.
Côté cuisine, tout est "fait maison". Jusqu'aux sorbets et à cette étonnante
glace au Carambar qui séduit petits et grands. L'équipement est à la hauteur des
prestations. Pas de pertes, grâce aux cellules de refroidissement et aux règles
d'hygiène qui sont précisées dans le contrat de travail des salariés. "La
qualité est essentielle", insiste Gérard Le Faouder. Aux fourneaux depuis six
ans : Philippe Lelay, un ancien de chez Boyer, Ducasse, Thorel. Salpicon de saint-jacques
rôties au beurre, Filet de lieu jaune demi-sel, Meunière de bar de ligne et son risotto
aux cèpes, Magret de canard et confit de chou vert aux pommes... Il est vrai carte et
menus font le bonheur d'une clientèle assidue.
Gérard Le Faouder est également président des restaurateurs du Syndicat départemental
du Morbihan. Là encore, il s'agit d'une vocation familiale. Sa mère faisait partie du
syndicat. Pour lui, l'action syndicale s'inscrit dans une démarche salutaire et de
pérennisation. "Notre métier a besoin d'être soutenu, valorisé. Il est
important de faire entendre notre voix. Un professionnel ne doit pas s'isoler, au
contraire. Si nous voulons conserver nos affaires et notre indépendance, nous devons nous
battre sur le terrain syndical." Ce qu'il fait depuis 12 ans. Avec succès.
S. Soubes
En dates1933 |
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L'HÔTELLERIE n° 2667 Hebdo 25 Mai 2000