A l'Ami Fritz à Ottrott
Sans emphase, mais avec énormément de conscience professionnelle : c'est ainsi que Patrick Fritz conçoit son métier d'hôtelier-restaurateur. Menée dans cet esprit, la rénovation de son établissement lui vaut une distinction nationale.
L'un des plus beaux villages de France, Ottrott, abrite aussi l'une des plus belles rénovations hôtelières du pays, avec l'établissement A l'Ami Fritz. L'avis émane, en tout cas, des Logis de France et de la compagnie d'assurance PFA : celle-ci vient de décerner son prix 1999 Cachet du terroir - réservé aux adhérents de la chaîne volontaire - à l'hôtel-restaurant installé au pied du mont Sainte-Odile en Alsace. Cette récompense nationale salue le travail en profondeur accompli depuis 1996 par Patrick Fritz. L'hôtelier-restaurateur, âgé de 40 ans, a consacré pas moins de 9 millions de francs à son établissement, pour lequel il avait déjà investi en 1989 en vue de moderniser les cuisines pour étendre les capacités de restauration. Le talent de Patrick Fritz a consisté à faire preuve de doigté : il a concilié l'inconciliable, à savoir moderniser sans perdre l'aspect traditionnel. Le bleu et le rouge dans les chambres, les rideaux en toile de Jouy, les canapés bleus de la réception apportent une touche new-look qui cohabite harmonieusement avec les bois locaux (chêne, frêne, noyer). Pas de doute donc sur le caractère alsacien de l'Ami Fritz - le propriétaire a pu jouer sur son nom, homonyme d'un célèbre personnage de la région. "Une identité régionale qui vous met à l'aise : voilà bien ce que recherche la clientèle en venant par ici", estime-t-il.
Vertus du travail bien fait
Un tour au caveau élimine les dernières traces de scepticisme : la nouvelle kaminstub -
du nom de la grande cheminée centrale - aux pierres apparentes évoque immédiatement la
winstub alsacienne. Au total, l'investissement de 9 millions de francs porte la capacité
à 39 chambres contre 17 auparavant. Elles se répartissent entre le bâtiment principal
abritant le restaurant et une annexe construite en 1980-1981, qui a pris le 1er mars le
nom d'Aux Chants des Oiseaux. De sa brillante rénovation, Patrick Fritz parle en peu de
mots, mais bien choisis. Visiblement, l'hôtelier-restaurateur d'Ottrott ne pratique pas
l'emphase, lui préférant les vertus du travail bien fait. Celui qui s'exprime, par
exemple, dans une cuisine prouvant que gastronomie régionale peut rimer avec
créativité. L'Ami Fritz multiplie les spécialités, en les accommodant souvent au rouge
d'Ottrott, cette originalité du paysage viticole alsacien. La Terrine de saumon et
anguille fumée en gelée, la Salade tiède de pigeonneau au foie gras poêlé, la Salade
tiède de cochon de lait, la Soupe de potiron à la persillade d'escargots, le Strudel de
boudin noir au raifort, la Tarte au biebeleskas, le Dos de sandre gratiné, les Quenelles
de brochet à la choucroute donnent du caractère à la carte, riche par ailleurs de 350
références de vins.
Avec ses 2 étoiles (la demande a été déposée pour en obtenir une troisième) et ses 3
cheminées Logis de France, L'Ami Fritz d'aujourd'hui n'a plus grand-chose à voir avec la
winstub villageoise que Patrick Fritz a repris à ses parents il y a treize ans.
Une vieille propriété familiale
C'est dans cette ambiance de restaurant de village et de bonne cuisine familiale qu'il a
grandi. L'hôtelier-restaurateur et son épouse ont repris l'établissement avec un double
souci : perpétuer la tradition de cette propriété familiale depuis cinq générations
et la faire entrer, en même temps, dans une nouvelle dimension. Lui-même s'est ouvert
des horizons durant sa formation : le parcours initiatique de Patrick Fritz passe par le
Majestic, à Cannes, le Conseil de l'Europe, à Strasbourg ou encore le Duc d'Enghien, à
Paris. Autant d'étapes révélatrices, et importantes, mais pas déterminantes à elles
seules : Patrick Fritz, l'apôtre du travail consciencieux, attribue une place tout aussi
grande à sa "formation continue".
La quête incessante de la nouveauté découle de son trait de caractère principal : la
curiosité. "Oui, j'aime en savoir le plus possible sur les choses. Je crois qu'on
apprend beaucoup en recherchant par soi-même. On s'améliore au jour le jour, en se
plongeant dans les lectures professionnelles, en observant à droite et à gauche, en
essayant soi-même : car si j'aime faire manger, j'aime aussi manger ! Je voulais un
métier non monotone, de création, l'hôtellerie-restauration m'apporte ces impressions.
A mon avis, s'imposer dans le métier s'avère impossible si on ne possède pas l'esprit
d'ouverture." Patrick Fritz l'avoue volontiers, le virus ne l'a pas gagné
spontanément : il est entré un peu par hasard à l'école hôtelière. Il compare la
pratique de cette profession à celle d'un sport : "Quand vous vous initiez, vous
ne prenez pas un réel plaisir au bout de la première semaine. Il faut du temps pour
apprécier." Chez l'hôtelier-restaurateur alsacien, la flamme a grandi au fur et
à mesure de l'exercice de la profession. Et elle n'arrête pas de briller. "C'est
étonnant, plus je pratique, plus j'aime. La lassitude ne me gagne pas. Quand arrive la
période de fermeture annuelle, l'hôtellerie et la restauration me manquent vite."
Cet état d'esprit enviable, Patrick Fritz l'attribue à deux facteurs : "La
volonté de faire toujours mieux. Et la reconnaissance quotidienne de la clientèle."
C. Robischon
En dates1980 : |
Vos commentaires : cliquez sur le Forum des Blogs des Experts
L'HÔTELLERIE n° 2662 Hebdo 20 Avril 2000