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Vie professionnelle
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Associations de cuisiniers

Antoine Westermann et Paul Bocuse prônent l'union

Lors de l'assemblée générale tenue à l'Ecole des arts culinaires et de l'hôtellerie de Lyon, Antoine Westermann a réaffirmé son désir de rassemblement de la profession...

Si la chambre syndicale de la Haute Cuisine française compte aujourd'hui 72 adhérents, on était très loin de ce nombre, l'autre lundi à l'EACH/Lyon.
Président depuis deux ans, Antoine Westermann l'a déploré et n'est pas dupe des dissensions qui minent aujourd'hui une profession où l'on aurait pourtant bien besoin de reserrer les rangs. Il l'a dit aux adhérents, réaffirmant pour L'Hôtellerie le rôle de rassembleur qu'il entend jouer lors de sa dernière année de mandat.

L'Hôtellerie :
A l'heure de l'assemblée générale, quel est l'état des lieux ?

Antoine Westermann :
Je l'ai toujours dit, mais au bout de deux ans j'en ai la certitude : si nous jouons l'individualisme et que notre demande se limite à notre groupe, c'est fichu.
Avec 80 adhérents, on ne peut espérer inverser la courbe des choses. Il faut ouvrir notre association à tous ceux qui veulent suivre notre démarche. Et nous devons inciter les jeunes qui sont en attente et dans un énorme flou quant à leur avenir à venir nous rejoindre. Si nous n'y prenons pas garde, nous serons submergés et il vaut mieux être forts pour affronter un problème comme celui des 35 heures, ingérable en cuisine.

L'H. :
Ne pensez-vous pas que votre volonté d'élitisme a pu limiter votre recrutement ?

A. W. :
S'il est vrai que nous représentons l'élite de la cuisine française, il est vrai aussi que nous avons beaucoup de difficultés à recruter. Qu'avons-nous fait dans ce domaine, alors que le changement radical dans notre profession nous offre une chance à saisir ? Je pense que l'élitisme sur lequel la chambre syndicale a longtemps fonctionné est révolu. Nous ne devons pas nous limiter aux 3 et 2 étoiles. Un restaurateur qui fait honnêtement son travail est tout à fait respectable et nous pouvons le parrainer. Si demain nous voulons rassembler des jeunes qui ont la passion du métier, nous devons aller vers eux.

L'H. :
Beaucoup de turbulences ont traversé la profession. Lors de votre arrivée, vous vouliez être le président de l'union. Croyez-vous qu'elle soit encore possible ?

A. W. :
Ces deux dernières années, nous n'avons enregistré que trois départs pour raisons personnelles : ce n'est pas significatif d'une désaffection. Il faut cependant reprendre notre travail de recrutement et c'est la décision prise en assemblée générale. Je ne veux fixer aucun objectif, sinon celui de la qualité et la participation de tous. Pour la vivre, j'admets volontiers que la fonction de président est usante. Il faut se donner d'autres moyens de fonctionnement.
Par ailleurs, il est clair qu'aujourd'hui, si nous continuons à jouer individuellement, nous ne ferons pas avancer la profession. Je suis peiné, je l'avoue, que certains s'investissent si peu car il suffit de peu de chose pour que nous arrivions à nos fins. Il ne faut pas se replier mais, au contraire, s'ouvrir à l'autre. Tout le problème est là.

L'H. :
C'est à l'évidence un appel au rassemblement...

A. W. :
Bien sûr ! Il y a eu des départs, mais rien n'est irrémédiable. Il faut rassembler notre profession - les Maîtres cuisiniers de France, les Jeunes restaurateurs, Euro-Toques - autour d'une même idée. Il est primordial de nous affirmer comme artisans et d'être reconnus en tant que tels, comme peuvent l'être les boulangers, les pâtissiers ou les bouchers. Cela passe par le regroupement des forces.

L'H. :
Il vous reste donc un an de mandat pour y parvenir. Et ensuite ?

A. W. :
A un an des élections, aucune candidature ne s'est dégagée. Je travaille pour que nous trouvions un volontaire qui comprenne que c'est un honneur de représenter la profession... même s'il est évident que la présidence est une lourde charge à laquelle on doit consacrer du temps. En ce qui me concerne, trois ans me suffiront et j'entends bien laisser ma place à quelqu'un d'autre.
Propos recueillis par J.-F. Mesplède


"Il est clair qu'aujourd'hui l'individualisme ne fera pas avancer la profession", glisse Antoine Westermann
à Paul Bocuse.

L'appel de Paul Bocuse

"Les cuisiniers doivent se réunir pour créer un puissant syndicat de la cuisine"

Il était à Lyon, mais n'a pas participé à l'assemblée générale de la chambre syndicale de la Haute Cuisine française. Par contre Paul Bocuse a longuement parlé d'union avec Antoine Westermann et Joël Robuchon.
Le propos est sans équivoque. "Pour être solides, il est important de se regrouper. Ce n'est qu'en nous montrant solidaires que nous pourrons gagner." Paul Bocuse n'a jamais caché qu'il était un fervent partisan d'une union indispensable à une profession trop souvent soumise aux déchirements. "Devant les pouvoirs publics, pour faire avancer nos revendications, il faut parler d'une seule voix. Imaginez la force que représenteraient la chambre syndicale, les Maîtres cuisiniers de France et les Jeunes restaurateurs réunis sous une même entité, avec un seul président.
Et puis,
ajoute-t-il malicieusement, comme beaucoup de cuisiniers font partie des trois associations, ils n'auraient plus qu'une cotisation à payer. Nous représenterions également un attrait plus important pour les sponsors."

"Le problème est qu'aujourd'hui nous sommes représentés et manœuvrés par des gens qui n'ont plus pignon sur rue. Ils n'ont plus d'affaires et ne peuvent plus parler en notre nom. En plus, c'est eux qui s'opposent à notre union ! Nous avons besoin de nous faire entendre, de nous faire reconnaître des pouvoirs publics. Il faut que la cuisine et la défense de la cuisine, de la restauration, soit le fait de cuisiniers actifs, pas des retraités, c'est très important. Maintenant, il faut bouger et se mobiliser", dit enfin Bocuse qui, jamais à court d'idées, propose même un nom au futur mouvement. "Pourquoi ne pas créer le Syndicat de la cuisine française ou même, tout simplement, le Syndicat de la cuisine ?" L'appel est lancé...
J.- F. M.


"Nous sommes manœuvrés par des gens qui n'ont plus pignon sur rue", dit Paul Bocuse à Antoine Westermann et Joël Robuchon.


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L'HÔTELLERIE n° 2662 Hebdo 20 Avril 2000

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