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La Duvel à la conquête de la France

La brasserie belge Duvel Moortgat est entrée en Bourse à Bruxelles le 22 juin dernier afin de financer son expansion à l'exportation. La France figure parmi ses cibles premières, et son organisation dans l'Hexagone est appelée à évoluer. Son fer de lance : la Duvel (le diable en flamand) une bière à la fois très traditionnelle et très mode.

Les frères Michel et Philippe Moortgat, président et administrateur délégué de la brasserie qui porte leur nom associé à celui du Malin, peuvent se frotter les mains. Pour la première fois suivant l'introduction de leur affaire en Bourse, ils ont pu publier des résultats semestriels. L'entreprise a réalisé un chiffre d'affaires de 140 millions de francs français environ, en progression de 8 % sur les six premiers mois de l'année, et devrait ainsi atteindre largement les objectifs promis à ses actionnaires. Ses ventes, sur un marché domestique en léger recul, ont augmenté de 3,2 % (de 4,9 % sur le terrain des CHR). Ses ventes à l'exportation (vraisemblablement 19 % du chiffre d'affaires cette année) ont crû de 7,5 %. Avec un bénéfice consolidé de l'ordre de 20 MF, soit une rentabilité assez exceptionnelle dans le monde brassicole, pourvus d'une solide cagnotte en haut du bilan (plus de 160 MF de liquidités), ces deux dirigeants d'une entreprise moyenne peuvent sourire à l'avenir. Duvel Moortgat n'a nullement l'intention d'aller chercher la concurrence sur le terrain du gigantisme et des grands volumes. L'affaire est concentrée sur le créneau mousseux des spéciales et spécialités. Elle possède certes une marque de pils, la Bel Pils vendue essentiellement dans son écurie nationale d'obligés. Mais ses grands chevaux de bataille sont la Duvel et la bière d'abbaye Maredsous. En selle sur ces produits, la firme entend développer ses ventes à l'export au moins jusqu'à 50 %. Par croissance externe ou interne, selon les occasions. La France représente environ 17 % des ventes à l'exportation de l'entreprise, soit un chiffre d'affaires encore modeste de moins de 10 MF. Mais sur le terrain des spécialités, et sur un marché distributeur pour le moins verrouillé, ce chiffre n'est pas si aisé à atteindre. Ce verrou est d'ailleurs visible dans le paysage. Alors que Duvel Moortgat vend 55 % de ses volumes en CHR sur le marché belge, dans le cas français la grande distribution absorbe les deux tiers. Philippe Moortgat, administrateur délégué, second de l'affaire, ne se satisfait pas de cette situation. Il remet en cause le dispositif actuel de vente en CHR français dans le sens d'une plus grande implication directe de l'entreprise. Historiquement, Duvel a confié ses intérêts en France au Nordiste Difcom qui a fort bien joué son rôle de pionnier. Les Artisans de la Bière ont joué ce rôle à Paris, mais l'évolution de ce distributeur a freiné les ventes de Duvel dans la capitale. "Pour aller de l'avant, il nous faut mettre en place un nouveau dispositif, plaide Philippe Moortgat. Cela veut dire renforcer la présence commerciale, soit seuls, soit en collaboration avec un ou des partenaires." Mais, souligne le brasseur : "nous manquons de connaissances, d'implication directe sur ce marché". Duvel Moortgat dispose déjà d'un délégué belge assisté de deux agents français sur le secteur CHR. Cette présence va s'accroître. Les régions de prédilection sont dans l'ordre le Nord, Paris, et l'Ouest. La Duvel par son expérience de terrain se positionne en France non comme une spéciale en Belgique, mais comme une spécialité. Sur des territoires très limités comme le Bouillon Racine dans le VIe arrondissement, la Duvel a une image. C'est une bière haut de gamme, extrêmement fine, chargée d'authenticité et d'histoire. Son conditionnement vieillot type abbaye n'est pas un problème, juge Philippe Moortgat, en raison du poids historique du produit. Mais elle reste encore globalement trop peu connue. Il faut savoir qu'en Belgique il n'existe pratiquement plus de carte de bières sans Duvel. Les bières d'abbaye Maredsous sont plus connues en France, notamment dans le Nord. "Nous devons faire mieux et travailler la notoriété de ce produit au pays du fromage. Le positionnement de la marque se situe en France entre les abbayes et les trappistes. Mais sans doute trop cher pour le consommateur français avec des prix qui frôlent les 40 F en certains lieux de Paris contre 25 à 30 F à Lille", précise le brasseur belge. Les bières, si spéciales soient-elles, ne peuvent décoller à ce prix, même dans un contenant de 33 cl. Autre question lourde en France, pays où la Leffe règne en maître tyrannique sur le segment des bières d'abbaye : comment introduire la Maredsous dans des établissements où le patron n'a guère d'autre choix que pousser soit la Leffe s'il est fourni par Interbrew, Grimbergen si son affiliation est plutôt Kronenbourg ou Affligem s'il a choisi le réseau Heineken... La Duvel a davantage le champ libre, puisqu'elle constitue en elle-même une spécialité, un segment original. Encore faut-il savoir la vendre comme telle.
A. Simoneau


Philippe Moortgat, administrateur délégué de Duvel Moortgat. "Nous devons nous impliquer davantage sur le marché français."

Une gamme originale

Pour les cafés qui voudront la rejoindre, Duvel Moortgat propose la Bel Pils (5,3 % vol. alc) en premier tirage, au goût plus marqué que la moyenne des bières de fermentation basse. La Duvel est typiquement une bière de fermentation haute, non pasteurisée, refermentée en bouteille, plus équilibrée que typée, sans ajout d'épices, encore moins d'additifs et autres conservateurs. Produit typiquement biologique, tout en subtilité entre amertume et arômes de terroir, la Duvel est servie dans un verre dodu marqué au col. La gamme Maredsous est l'une des plus complètes qui existent avec ses quatre déclinaisons, deux dorées-ambrées, dont l'une relativement légère (6 %) et l'autre fort dense (10 %), et deux brunes, l'une très caramel (6 %) l'autre plus classique et houblonnée (8 %).


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L'HÔTELLERIE n° 2645 Hebdo 23 Décembre 1999

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