Expérience
Depuis la fin septembre, les
neuf salariés du Grand Hôtel Saint-Pierre à Aurillac et ceux des Provinciales à
Arpajon appliquent les 39 heures. Leurs sept collègues du restaurant Le Pommier d'Amour
aussi. Il s'agit de deux accords séparés, signés avant le 30 juin dernier. "Je
suis plutôt opposé aux 39 heures, explique pourtant Jean Lavergne. Je me suis
renseigné et j'ai réfléchi sur le sujet. En tant que président de la chaîne Inter
Hôtel, je voulais connaître les conséquences de la réduction du temps de travail pour
les adhérents." Il a donc rencontré un consultant, des juristes des industries
hôtelières, il a questionné la direction du Travail et des hommes politiques de tous
bords. "J'en ai tiré une conclusion : personne ne croit aux créations d'emplois.
Mais les 39 heures s'appliqueront. Et il n'y aura pas de retour en arrière."
Jean Lavergne se trouve alors devant un choix : "Soit j'attends, en espérant des
reports de dates d'application ; soit j'anticipe et j'utilise au mieux les aides prévues."
Il s'oriente vers la deuxième voie. "Je dois assurer la pérennité de mes
entreprises, les faire vivre, donc m'adapter aux nouvelles règles. Mon point de vue
personnel ne pèse rien."
L'expert-comptable rend son verdict : coût nul pour les deux premières années ; pour
les trois suivantes, la facture reste modérée et bien moins élevée qu'en cas de
non-signature d'accord sur les 39 heures.
Revoir l'organisation
Le jeu en vaut la chandelle. Jean Lavergne s'appuie sur un consultant, Marc Desprat.
"Je voulais profiter de l'occasion pour revoir toute l'organisation. Utiliser les
services d'un consultant apporte un il extérieur sur l'entreprise, des compétences
différentes et l'expérience acquise des autres." La mise à plat a fait
ressortir les points faibles, les améliorations possibles. Marc Desprat a rencontré les
salariés, évalué les tâches, les fonctions et écouté leurs ambitions, leurs souhaits
sur les horaires. La qualité de vie n'est pas écartée. Le bilan fait ressortir une
faiblesse pour le commercial, les contrôles qualité et la nécessité de recruter.
"Ce n'est pas un effet mécanique de la réduction du temps de travail,
précise Jean Lavergne, mais l'entreprise se trouvait à un pallier avec une hausse du
chiffre d'affaires." Il y a eu trois embauches : une personne en contrat de
qualification à la réception ; un temps complet en contrat initiative pour remplacer un
congé parental à temps partiel et une femme de chambre également à temps partiel.
"Nous avons tenu compte de l'avis de chacun et je n'ai pas voulu jouer sur la
flexibilité ou l'annualisation mais plutôt sur la polyvalence et la responsabilisation.
Les heures de présence peuvent être calculées avec justesse. Et il est toujours
possible de trouver des travaux d'entretien ou de démarchage, de commercial de
proximité, pendant les périodes creuses." Tous les horaires et les tâches ont
été redéfinis avec précision et figurent sur des plannings détaillés.
Etudes gratuites
En ce qui concerne les salaires, "aucune baisse n'a suivi le passage aux 39 heures".
Jean Lavergne raconte : "Une employée m'a dit qu'elle avait l'impression d'avoir
deux week-ends dans la semaine. Elle termine le samedi à 21 heures pour reprendre le
lundi à midi ; elle ne travaille pas le mercredi et commence le jeudi à 17 heures."
Il a livré son expérience à ses collègues d'Inter Hôtel lors d'une assemblée
générale. "L'accueil a été mitigé, sourit Jean Lavergne, certains ont
pensé que c'était cautionner l'action du gouvernement." Mais une moitié des
adhérents était d'accord pour se pencher sur la question. Un système Inter Hôtel a
été mis en place avec Marc Desprat et deux autres consultants. "Il ne faut pas
oublier que les études pour le passage aux 39 heures ne coûtent rien à l'hôtelier.
Elles sont subventionnées par le ministère du Travail. Et surtout, que leurs
réalisations n'impliquent aucune obligation de signature d'un accord." Le
président d'Inter Hôtel reconnaît toutefois que le processus est surtout valable pour
les établissements en progression, mais plus difficile à concrétiser pour ceux en phase
délicate. "Le plus intéressant, c'est de profiter de l'occasion pour revoir
toute l'organisation. Souvent, trop pris par le quotidien, nous avons du mal à prendre du
recul." Pour tout renseignement, les hôteliers d'Inter Hôtel peuvent
téléphoner au siège de la chaîne. "Ce service et aussi ouvert aux
professionnels extérieurs à la chaîne", précise Jean Lavergne.
Inter Hôtel : Tél. : 01 42 06 46 46.
P. Boyer
Jean Lavergne a décidé d'appliquer les 39 heures au Grand Hôtel Saint-Pierre
(Aurillac) et aux Provinciales (Vic-sur-Cère).
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L'HÔTELLERIE n° 2645 Hebdo 23 Décembre 1999