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Côté hôteliers

Pas d'euphorie

A l'exception de quelques cas isolés, les professionnels de l'industrie hôtelière n'espèrent pas remplir leur tiroir-caisse à l'occasion des fêtes de fin d'année. Subissant l'inflation des prestataires de services et la hausse des matières premières, ils sont néanmoins contraints d'augmenter leurs tarifs. Certains préfèrent même jeter l'éponge.

Cette soirée du nouvel an, Disneyland Paris l'annonce "magique". "Peu avant les douze coups de minuit, le château de la Belle au Bois Dormant sera la toile de fond d'un extraordinaire spectacle son et lumière symbolisant la paix et l'harmonie entre les peuples, à travers le langage universel de la musique et du chant." Son prix le sera également puisque les billets d'entrée pour adultes sont vendus 999 francs au lieu de 220 francs et 495 francs pour un enfant à comparer aux 195 francs habituels. "L'an 2000, c'est 2 000 francs !", a également décidé pour sa part un restaurateur indépendant de la région parisienne.
Le réveillon de cette fin de siècle a fait perdre la tête à certains professionnels du tourisme. Quelques-uns ont en effet imaginé pouvoir spéculer sur cette date mythique afin de remplir leur tiroir-caisse. Il est difficile ainsi de trouver un week-end dans une capitale européenne à moins de 8 000 francs ou bien encore un séjour (du 25 décembre au 1er janvier 2000) aux Antilles à moins de 14 000 francs dans un hôtel trois étoiles. Sans oublier les dîners de gala dansants "féeriques" et bien sûr gastronomiques atteignant parfois dans la Ville Lumière plus de 4 800 francs par personne (apéritif et champagne inclus, tout de même !). A ce compte-là, la soirée doit évidemment tenir toutes ses promesses. Autrement dit être "merveilleuse", "inoubliable", "frissonnante" et même "fantastique" voire "émouvante" comme le décrivent de manière superlative les brochures et plaquettes commerciales des entreprises concernées. Une nuit russe sous la bulle de verre du restaurant Le Jardin de l'hôtel Royal Monceau, qui sera envahie par l'âme slave et les violons tziganes tandis que les convives s'abandonneront (à discrétion) au caviar, à la vodka et au champagne, cela doit être mémorable.

Menus gargantuesques
Reste que dans bien des cas, hélas, les offres proposées à la clientèle demeurent très classiques. Pas de quoi en effet casser trois pattes à un canard ! A quelques rares exceptions, l'essentiel des produits présentés par les professionnels du tourisme (y compris ceux issus de l'industrie hôtelière), en particulier en France, tournent autour de séjours relativement traditionnels. L'hébergement étant bien entendu accompagné de menus "gargantuesques" (plus la liste des plats est longue, plus l'addition est salée) arrosés de grands crus.
A croire que certains hôteliers et restaurateurs sont totalement dénués d'imagination ou bien, plus vraisemblablement, embêtés par cette nuit exceptionnelle de la Saint-Sylvestre 1999. Ce n'est pas un hasard d'ailleurs si beaucoup d'entreprises hôtelières ont pris la décision de ne pas ouvrir ou rouvrir (certains étant fermés habituellement à cette époque) pour l'occasion. C'est le cas pour des restaurants tels que Faugeron, Apicius et autres. Tout comme L'Hostellerie Le Clos, Le Château de Montreuil et Le Moulin de l'Abbaye ou bien encore L'Auberge du Père Bise, Le Château de la Chèvre d'Or...
"On est obligé de faire plus pour marquer l'événement auprès de nos clients", avoue Paolo Danieli, le directeur du Prince de Galles. Et d'ajouter : "Pourtant, ce n'est pas une opération qui générera des gains importants. Parce que les tarifs des matières premières ont été rehaussés pour l'occasion. Tout comme ceux des prestataires de services. Et puis parce que l'on investit davantage avec des cadeaux type peignoirs (500 francs), boîtes de chocolats (200 francs)..."

Augmentations des prestataires de services
"Les coûts d'animation et d'organisation atteignent de tels niveaux qu'il faudrait pratiquer des prix prohibitifs pour rentrer dans ses frais", explique Michel Porte, directeur général du Sofitel Sèvres. "C'est la raison pour laquelle, précise l'intéressé, j'ai choisi de ne pas mobiliser l'ensemble de mes équipes sur une très grosse opération. Nous proposerons uniquement un menu festif aux clients de l'hôtel." Chaque fournisseur extérieur veut en effet profiter de l'aubaine du 31 décembre pour gagner le jackpot. "A titre d'exemple, l'orchestre auquel j'ai fait appel pour le réveillon va me coûter 60 000 francs au lieu de 20 000 francs", souligne Catherine Giana-Genevrier, directrice du Palais Maeterlink (Nice), qui a concocté un forfait "croisière" comprenant quatre nuits, les petits-déjeuners buffet, le réveillon à partir de 7 000 francs par personne. "Sans compter sur la surenchère en ce qui concerne les extras qui demandent plus de 2 000 francs pour la soirée", ajoute-t-elle. Des tarifs encore plus élevés, entre 3 500 et 5 000 francs les services d'un extra, circulent actuellement dans la capitale. Allez savoir jusqu'où monteront les enchères pour assurer une prestation de qualité ?
"Le réveillon de l'an 2000 sera de 700 francs plus cher au château de Divonne, non pas pour augmenter notre marge bénéficiaire ou pour profiter de la forte demande, mais simplement pour couvrir tous les frais occasionnés pour cet événement", confie-t-on au siège des Grandes Etapes Françaises. La hausse sera de l'ordre de 15 % pour le Mas d'Artigny à cause, là aussi, des cachets des artistes (magiciens, D.J...) qui ont fait un bond en avant. Et quand on sait que pour réveillonner dans l'enceinte magique de l'hôtel Carlton à Cannes, le palace a dû investir près d'un million de francs pour organiser les festivités, ça se paye bien sûr !

Séjour minimum
"On se retrouve un peu dans la situation de la Coupe du Monde. Il n'en est pas moins vrai que les hôteliers parisiens n'envisagent pas d'augmenter leurs prix au-delà de 10 % à 15 %", estime Bertrand Lecourt, président de la Chambre syndicale des hôteliers, cafetiers, restaurateurs de Paris et sa région. En fait, une grande majorité des hôtels français n'ont pas réellement souhaité "chasser le pigeon", ou autrement dit assommer le client sur les prestations du réveillon. Beaucoup ont en effet préféré jouer la carte du séjour minimum en pratiquant les tarifs affichés. Une politique particulièrement musclée au Marriott Champs-Elysées qui a vendu des forfaits de 8, 7, 5, 4 et 3 nuits minimum : la chambre executive (possibilité de coucher quatre personnes) étant facturée 4 800 francs par jour. "Nous n'avons pas bougé nos prix habituels, mais nous avons en revanche privilégié des séjours plus longs afin d'obtenir un prix moyen plus élevé sur la semaine", témoigne Xavier Dupain, responsable de l'hôtel Mansard.
En région parisienne et en province, les professionnels ont opté pour des packages, généralement plus courts, oscillant entre deux et quatre nuits selon les établissements concernés. Quatre nuits en chambre double avec petits-déjeuners et dîner de réveillon sont ainsi proposées à 4 000 francs au Domaine du Verbois (Relais du Silence) à Neauphle-le-Château. Pour 500 francs par nuit et par personne (pdj compris). Le Domaine de l'Amirauté, à Deauville, met également à la vente un forfait de 4 nuits et la 5e gratuite à partir de 3 300 francs. Les week-ends du millénaire des Grandes Etapes Françaises comprennent quant à eux le réveillon, les animations et un séjour minimum de 2 ou 3 nuits.

Les produits bon marché partent en premier
Reste à savoir s'il existe une véritable demande pour cette nuit de la Saint-Sylvestre. Un sondage BVA/ministère de la Culture révèle bel et bien que 59 % des Français sont favorables aux célébrations de l'an 2000. Certains touristes étrangers fantasment aussi à l'idée d'entendre les douze coups de minuit sur la place de la Concorde. Mais sont-ils prêts à casser leur tirelire ? Pas obligatoirement. Preuve en est la vente rapide chez certains tour-opérateurs, tel Accor Tour par exemple, des voyages les moins coûteux (Egypte notamment et Sénégal).
Au regard des informations données par les professionnels, les choses ne devraient cependant pas trop mal se passer pour les hôteliers. Les palaces de la capitale et de la Côte d'Azur n'ont en effet guère de souci à se faire pour leur taux de remplissage. Beaucoup comme le Bristol, le Crillon, le Ritz et autres quatre étoiles sont d'ores et déjà complets dans la capitale. D'autres, toujours dans les catégories haut de gamme, ont encore quelques chambres à louer comme au Carlton ou bien au Martinez. Une situation qui en fait n'a rien de véritablement exceptionnel puisque ce type d'établissements réalise généralement de très bonnes performances à l'occasion des fêtes de fin d'année. D'ailleurs, les taux d'occupation enregistrés au cours des années précédentes durant le mois de décembre parlent d'eux-mêmes : 75 % pour le haut de gamme parisien en 1998 selon le baromètre PKF Consulting.
Parallèlement, la tendance s'annonce également sous d'excellents auspices pour bon nombre d'unités implantées dans les stations de sport d'hiver où beaucoup de professionnels n'ont même pas eu à commercialiser des produits de fin d'année. "Nous n'avons pas mis sur pied de packages spéciaux parce que nous étions sûrs à 90 % de remplir nos établissements avec nos clients habitués", note Emmanuelle Reynoud, responsable commerciale pour Alp'Azur Hôtel. A ce jour d'ailleurs, la centrale de réservations de Courchevel ne reçoit plus de chambres à louer pour la fin de l'année de la part des hôteliers.

La montagne en vogue
"La station est en effet globalement bien remplie", explique Albert Parveau président des hôteliers de Courchevel. Moral au beau fixe également du côté de Méribel. "Cela va être comme toutes les autres années ! Nos clients viennent passer les fêtes à la montagne parce qu'ils y trouvent la chaleur et un accueil personnalisé", confie Claude Chardonnet, propriétaire de L'Orée du Bois.
Il n'en demeure pas moins vrai que certains professionnels jugent la demande légèrement émoussée. A croire que le phénomène de l'an 2000 est déjà retombé ! Toujours est-il que le responsable de la centrale de réservations des Relais & Châteaux n'observe guère de frénésie auprès de la clientèle. Pas plus d'ailleurs chez Relais du Silence qui comptabilise assez peu de demandes pour ces dates précises. "Nous avons engrangé pas mal de réservations, mais beaucoup n'ont pas été confirmées", raconte Daniel Le Biavant, président du Groupement national des chaînes pour l'Ile-de-France. Et de surenchérir : "A priori, il y a toutes les chances que les hôtels réalisent de bons scores. Mais, ce qui étonne, c'est que nous ne sommes pas du tout débordés d'appels téléphoniques en ce moment."
A défaut de passer un millenium "fantastique", les clients souhaitent peut-être mettre un terme à toute la campagne médiatique qui a été faite dernièrement à ce sujet. Chez Barrière, à l'exception du Majestic qui affiche à ce jour une fréquentation supérieure à 70 %, on constate effectivement une faible anticipation des réservations. Ce qui n'empêche pas les responsables de sites de conserver une pêche d'enfer. "Beaucoup de gens attendent la dernière minute pour réserver", indique-t-on au service communication du groupe français. Alors attention aux enchères du 30 et 31 décembre prochains !


Les grands palaces parisiens, comme le Crillon, affichent d'ores et déjà tous complet.


Beaucoup de gens veulent passer le réveillon à la montagne.

Nouvel an au Plaza Athénée en quelques chiffres

Le palace parisien a décidé de mettre les bouchées doubles pour le passage au troisième millénaire. Afin de marquer les esprits à jamais, il a donc confié l'organisation de cet événement à Valérie Vais, jeune créatrice. Ainsi, la façade de l'hôtel et la cour-jardin vont-elles se métamorphoser du début du mois de décembre à la date fatidique grâce à l'utilisation d'une décoration végétale futuriste. L'artiste va utiliser à cet effet de grands arbres de
à 6 mètres de haut recouverts de givre et de glace reprenant la forme des voûtes dans le hall et dans la galerie. Pour ce qui concerne les tables des salons, elles seront recouvertes de nappes d'organza, de satin et de soie pour les thèmes or, argent, perle et diamant (plus de 5 000 perles et
5 000 diamants fantaisie).

L'hôtel a également commandé quelque 210 mètres de ruban haute couture pour réaliser les liens de serviettes et les menus.
Parallèlement, 1 500 star flashs seront suspendus aux murs de la cour ainsi que 1 000 ampoules flammes. Un laser créera un faux plafond volumétrique sous la tente avant les douze coups de minuit. Sans oublier un ventilateur pour pluie d'étoiles, un système d'écriture en temps réel au sol et sur les murs, la cour transformée en une boîte de cristal de 250 m2 et la présence de deux groupes latino-américains.
Une opération de grande envergure que le nouveau patron de l'établissement, François Delahaye, devrait réussir comme à son habitude : à merveille !

 

Une chambre d'amis à moitié prix

180 établissements du groupe Accor (Sofitel, Novotel et Mercure) en Europe proposent 50 % de réduction pour la nuit du vendredi 31 décembre sur le prix d'une chambre double avec possibilité d'en disposer jusqu'à 18 heures le jour du départ. Et puis, si vraiment vous aviez la gueule de bois après cet événement de fin de siècle, qui se veut soi-disant fabuleux, les mêmes conditions tarifaires seront pratiquées pour les nuits du 1er et 2 janvier 2000.


Chambre Novotel.

 

Organisation blindée à New York

Comme d'habitude, les Américains ont un métro d'avance sur la vieille Europe ! Un "Millenium club" a donc été créé afin de répertorier les disponibilités des restaurants et des 60 000 chambres d'hôtels de la Grosse Pomme pour cette fameuse fin de siècle. Une nécessité absolue. D'autant qu'outre-Atlantique,
à New York précisément, la célébration du nouvel an à Times Square durera 24 heures (décalage horaire oblige). Une projection sur écrans géants illustrant les différentes cultures de la planète débutera en effet à 7 heures (heure locale). Le spectacle commencera par les îles Fidji. De quoi laisser libre cours à son imagination et planer
un grand coup !


L'HÔTELLERIE n° 2640 Spécial Réveillon 18 Novembre 1999

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