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Hôtellerie l La sécurité des personnes et des biens

Changer les mentalités

Attaques à main armée, incendies, intoxications alimentaires, vols... les risques encourus par les hôteliers sont de plus en plus grands. Et le client réclame de plus en plus de sécurité. Pourtant, même si la menace plane, les actions ou les moyens investis pour y remédier semblent peu nombreux.

Assurer la sécurité des biens et des personnes dans un hôtel peut paraître évident car induit. Pourtant certains hôteliers paraissent se contenter de louer leurs chambres sans s'en soucier. Tous ne semblent pas très préoccupés par le problème. "Bien évidemment que mon hôtel est sûr. Tout a été vérifié. De toute façon, je suis en conformité avec les règles de sécurité", argumente un hôtelier normand, apparemment agacé par la question. En résumé, les catastrophes, ça n'arrive qu'aux autres. Mais sans paraître cynique, que fait-on pour lutter contre les intrusions intempestives, les vols répétés, pour garantir une hygiène sans faille, mais aussi pour mettre le personnel à l'abri d'accidents du travail... "Au-delà de ce qui est imposé par les différentes commissions de sécurité ou les services vétérinaires, l'hôtelier semble plutôt passif", explique le capitaine Xavier Wébert, des pompiers de Paris. Seuls ceux qui ont été confrontés à des problèmes semblent être devenus vigilants. Les établissements haut de gamme y sont aussi très attentifs. D'une part parce qu'ils reçoivent une clientèle très sensible à la question. D'autre part, c'est une question de gestion de l'image. La moindre défaillance dans un grand hôtel sur ce registre de la sécurité et de l'hygiène peut-être montée en épingle. Un cafard qui traîne, le feu, une intoxication par la nourriture... la presse peut s'en emparer aussitôt et en faire des gorges chaudes.

Trop de mesures imposées
"Un hôtel fermé par arrêté municipal", "la commission de sécurité refuse l'ouverture d'un hôtel", "des millions de francs investis pour satisfaire les exigences de la commission de sécurité", quasiment toutes les semaines, on trouve des titres identiques dans la presse professionnelle ou régionale. Il serait facile de jeter la pierre aux professionnels en insistant qu'en l'absence de réglementation, le client n'aurait aucune garantie de survie dans le cas où... Mais le problème se pose autrement. "Vous ne croyez pas qu'ils nous embêtent suffisamment comme ça. Pas besoin d'en faire plus", s'exclame une propriétaire d'hôtel du sud de la Bretagne. Son cas n'est pas isolé. Nombreux sont les hôteliers à réagir de la sorte. En fait, les mesures sont tellement drastiques et l'administration tatillonne que l'hôtelier se considère, à tort ou à raison, suffisamment couvert lorsqu'il fait ce qu'on lui demande en termes d'aménagements. En faire davantage serait dépenser de l'argent sans être assuré d'une meilleure couverture. "Sur un budget total de rénovation de 3,5 millions de francs, j'ai dû en consacrer 2 pour la mise en conformité avec les normes de sécurité. Du coup, ce que j'ai dépensé ne se voit pas !" s'exclame Olivier de Mervel, hôtelier en Bourgogne.

Problèmes de parkings
Vis-à-vis des vols, l'un des endroits le plus convoités reste le parking, notamment ceux des hôtels de catégorie économique, situés en périphérie des villes. Certains sont surveillés, mais d'autres n'ont droit qu'au panonceau "Parking non gardé". Cependant, ce lieu de stationnement, dès lors qu'il fait partie de la prestation hôtelière, est sous la responsabilité de l'établissement. Dans des zones dites sensibles, les hôteliers ne mettent pas forcément en place des systèmes dissuasifs. "On prévient les clients, ils n'ont qu'à faire attention", soupire une directrice de la banlieue nord de Paris. Mais chat échaudé craint l'eau froide et ceux qui ont connu des pillages se sentent davantage concernés. Paulo Silva, directeur de Climat de France des Mureaux a fait clôturer son parking, mis une barrière avec digicode et un éclairage lumineux déclenché par faisceau au moindre mouvement. "Avant cet investissement, certaines voitures de nos clients avaient été fracturées. Nous avons préféré sécuriser notre parking pour tranquilliser notre clientèle. Cela nous a permis de garder nos clients et même d'en gagner", confie-t-il. Il a raison car selon une étude de Coach Omnium, 28 % des clients d'hôtels considèrent qu'ils ne choisiraient pas un hôtel lors de leurs voyages professionnels, s'il ne disposait pas d'un parking sécurisé.

Le client catastrophe
Mais le client lui-même est aussi parfois une menace pour l'hôtelier. Télévision, tableaux, lithographies, lampes de chevet... sans oublier peignoirs et serviettes font souvent l'objet de convoitise de la part de ces visiteurs d'un soir. A l'heure actuelle, on n'a rien trouvé de mieux et de plus économique que de fixer un maximum d'équipements aux murs et aux meubles. "Nous ne fixons plus les télécommandes des téléviseurs à la tête de lit. On ne les vole plus car tout le monde a ça chez lui, maintenant. Mais les clients volent encore les piles", commente un directeur d'un Mercure. Quant aux sorties de bains, le problème reste entier. Parfois un petit écriteau stipule que les serviettes ne sont qu'un prêt de l'hôtel et qu'elles sont en vente à la réception de l'hôtel. Sans être forcément très efficace contre les kleptomanes, les amateurs sont avertis. "Certains clients sont persuadés de bonne ou de mauvaise foi que les serviettes sont un bien consommable et qu'elles sont comprises dans le prix de la chambre. Dans les établissements réputés, les clients les glissent dans leur valise en guise de souvenir. Que faire contre ça si ce n'est de demander à tous les clients d'ouvrir les bagages. On ne peut pas mettre des détecteurs électroniques comme dans les magasins", explique amèrement le directeur d'un grand hôtel niçois. En fait le plus important est que le cadre rassure et que la sécurité soit assurée par des moyens visibles aux yeux de tous. L'aspect psychologique devient ici prépondérant. Au Méridien Etoile à Paris, une équipe de 13 personnes patrouille en permanence dans l'établissement. "Le client, une fois dans l'hôtel, n'est plus du tout vigilant, il laisse son attaché-case sans surveillance et devient une proie facile. Les personnes chargées de la sécurité sont là pour rassurer, dissuader et intervenir sur le champ à la moindre anomalie. Sans être une obligation, nous pensons que cette présence est obligatoire pour maintenir une certaine prestation. Et puis, le système pourra détecter un incendie alors qu'il s'agit en fait que d'un gros fumeur. Là, le rôle de l'homme est essentiel", explique Jean-Luc Cousty, directeur de l'hôtel.

Du côté de la cuisine
Du côté de la cuisine, les initiatives personnelles sont plus nombreuses. Les visites intempestives de la DGCCRF ainsi que des délégations vétérinaires ont permis de faire prendre conscience de l'importance de l'hygiène. Sans doute également la presse a-t-elle joué un rôle en montrant du doigt des restaurateurs peu scrupuleux. Les chaînes de restaurants sont devenues extrêmement à cheval sur les conditions d'hygiène et imposent des mesures strictes. Mais les restaurateurs indépendants, par soucis du client mais aussi parce que les histoires de vaches folles et autres dioxine ont mis les clients en méfiance, deviennent parfois eux aussi des maniaques. "Tous les mois, je paie un laboratoire pour qu'il vienne faire des prélèvements. Nous n'avons aucune obligation mais c'est mieux. Je pense qu'on ne peut pas jouer avec la santé des gens", indique un restaurateur de la Côte d'Or. Côté chambres, c'est plus aléatoire, parce qu'on a moins de connaissances sur les contraintes d'hygiène et parce qu'une fois le client logé, on n'entre généralement plus dans sa chambre. Si les hôteliers ont tendance à prier chaque matin pour que rien n'arrive dans leur maison, il faut dire à leur décharge que sur la masse d'hôtels, il y a finalement peu de gros sinistres. Mais, il est certain qu'avec les tendances consuméristes, la profession va se voir serrer de plus en plus la vis sur ce registre de la gestion de la sécurité.
M.-L. Estienne


La sécurité est une priorité pour éviter les vols répétés.


"Au-delà de ce qui est imposé par les différentes commissions de sécurité ou les services vétérinaires,
l'hôtelier semble plutôt passif.
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L'HÔTELLERIE n° 2635 Supplément Économie 14 Octobre 1999

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