Le gouvernement n'a certainement
pas apprécié la divulgation de la note confidentielle de la direction de la Prévision
qui, en date du 27 janvier 1999, concluait "une baisse ciblée du taux de TVA sur
les travaux d'entretien ou sur la restauration bénéficierait essentiellement aux
ménages les plus aisés". Une conclusion que le gouvernement n'a malheureusement
voulu retenir que pour le seul secteur de la restauration... Il est évident que le choix
d'une baisse de la TVA pour le seul secteur des travaux d'entretien aura des conséquences
mineures sur le budget de l'Etat dans la mesure où ces travaux donnaient jusqu'alors
droit à des réductions d'impôts qui ne manqueront pas d'être supprimées. Quasiment
donc, un jeu à somme nulle. Dès lors, on comprend mieux la décision gouvernementale et
on ne peut que dénoncer l'hypocrisie des propos des politiques qui, sous couvert de
justice sociale, ont tout simplement choisi de protéger le budget de l'Etat tout en se
ménageant un effet d'annonce et en se fichant bien de la dite justice sociale ! Il est
évident que la baisse de la TVA sur les travaux d'entretien profitera davantage aux
ménages aisés qu'aux autres, plus préoccupés à assurer un quotidien décent à leur
famille qu'à investir de l'argent qu'ils n'ont pas dans des travaux. Allez demander, à
Clermont-Ferrand, si les salariés de chez Michelin, qui s'attentent à des licenciements
prochains, envisagent d'investir dans la transformation de leur logement !
Vingt-trois millions de personnes travaillent en France et doivent chaque jour se
nourrir ; elles sont de moins en moins nombreuses à pouvoir rentrer déjeuner chez elles
et l'offre de la restauration collective est peu importante en regard de la demande. C'est
la raison pour laquelle autant d'établissements répondent justement à cette demande en
offrant des prestations autour de 50 francs tout compris. Un engagement de ces
restaurateurs à répercuter une baisse de la TVA sur leurs tarifs aurait peut-être aidé
à convaincre Bercy mais comment demander pareil sacrifice à des entreprises qui
pratiquent des tarifs qui ne leur garantissent pas de marge ?
Le problème dépasse bel et bien celui du taux de TVA : ces petites entreprises sont
en danger parce qu'au fil des temps, on a exigé d'elles le respect de règles plus
adaptées à la réalité économique des grandes entreprises qu'à la leur. Des règles
qui ont un coût élevé, des charges que l'Etat ne cesse d'alourdir, une concurrence
aiguisée, une exigence plus forte de la clientèle, sont autant de handicaps à leur
survie. Ne pourrait-on, pour les plus petites entreprises, quand elles continuent à jouer
un rôle social et économique, faire comprendre aux pouvoirs publics qu'une
réglementation adaptée est indispensable si l'on ne veut pas voir dans l'avenir la
restauration aux seules mains de groupes qui, guidés par la seule rentabilité de
l'investissement, ne pourront jamais offrir le service que les plus petites entreprises
offrent ? Il ne faudrait pas que, sous couvert d'une TVA trop lourde,
on délaisse le dossier essentiel pour les entreprises de main-d'uvre : celui de la
baisse des charges. Un sujet qui prendra encore une autre dimension à l'application de la
loi Aubry !
PAF
L'HÔTELLERIE n° 2631 Hebdo 16 Septembre 1999