Pierrot de Lille
Peu de Lillois se souviennent de son nom. Pour tout le monde c'est Pierrot. Avec le Bistrot de Pierrot planté depuis onze ans au cur du secteur piétonnier de Lille, il avait déjà créé un beau fonds de commerce, une superbe adaptation nordiste du concept de beau bistrot hérité de l'époque des halles parisiennes. Un rendez-vous de fines gueules mais aussi de grandgousiers, d'amateurs de bière comme de vin, d'étudiants comme de bourgeois bon teint, d'hommes d'affaires comme de politiques ou de membres de la fine administration régionale. C'était Pierrot pour de plus en plus de monde depuis qu'il a investi la télévision régionale le samedi après-midi sur France 3 avec une émission intitulée Goûtez-moi ça produite par Patrick Villechaize. Cet été, l'émission passait même sur l'antenne nationale. Pierrot, c'est encore le nom utilisé voici deux ans lors de la création de la presque champêtre Auberge de Pierrot, à mi-chemin de Lille et de Roubaix-Tourcoing, là où quelques vaches broutent encore sur une terre qui vaut de l'or, là ou quelques maraîchers s'accrochent à leurs arpents en pleine zone urbaine. Mais Pierrot porte un nom tout de même. Il s'appelle Pierre Coucke, Pierre gâteau en flamand.
Pierrot cuisinier et auteur
Il signe son second livre avec son producteur Patrick Villechaize et le photographe
nordiste le plus connu, Sam Bellet, la version édition de Goûtez-moi ça avec les
soixante dernières recettes présentées à l'antenne. Le premier livre s'est vendu à
près de 17 000 exemplaires, et Pierrot pense bien faire mieux avec ce second jet édité
à l'il d'Or à Paris, rue de Belleville. Une photo pleine page de Bellet face à
une page de recette, assortie d'un conseil d'ami un peu cochon sur les bords, il fallait
s'y attendre. Cette fois, les recettes visent très large, du Nord au Périgord et de la
Normandie à l'Italie. Les amis restaurateurs de renom nordistes et belges ont prêté
leurs conseils et leurs décors, signe que les professionnels ont décidé de s'encourager
mutuellement plutôt que de jouer une concurrence faite d'agressivité mutuelle. Pierrot
ne cesse de rendre hommage à ceux qu'il estime bien meilleurs que lui aux fourneaux. Il
livre "sans façon" une recette de cuisses de grenouille qu'il a goûtée chez
Haerberlin en Alsace. Les restaurateurs du Nord et d'ailleurs reconnaissent de leur
côté, outre la qualité de sa cuisine, une belle réussite d'entreprise et un talent
médiatique dont la région a besoin. En tant que délégué Euro-Toques récemment
coopté aux côtés de Denise Legleye (L'Auberge de la Garenne à Marcq-en-Baroeul), il
veut recruter et faire vivre vigoureusement l'association en renforçant les contacts avec
d'autres régions et les voisins européens.
A. Simoneau
Pierrot au lancement de son livre.
Le Bistrot, un tube à contre-courantFrançois Werner, directeur régional de France 3 et Luc Rousseau, directeur de
l'antenne, considèrent manifestement Goûtez-moi ça comme un pilier des programmes et le
revendent sans difficulté. Or, quelle chanson chante Pierrot ? Certainement pas celle de
la cuisine minceur. C'est le retour de Rabelais à table, l'amour fou des beaux produits
du terroir, et la joie de vivre en famille et entre amis. Au bistrot de Pierrot, on a le
droit de rapprocher les tables, de s'interpeller et de rire, de remercier le patron. A la
télé, c'est Pierrot avec une mamie, une jeune femme qui elle surveille sa ligne, et une
petite Philippine pour apprendre la cuisine aux jeunes. On est loin des déboires de
l'industrie de la petite bouffe industrielle. |
L'HÔTELLERIE n° 2631 Hebdo 16 Septembre 1999