Innovation à Aurillac
Jean Lavergne et son fils Laurent ont un raccourci imagé pour parler du Petit Déj Hôtel, lancé à Aurillac en mars dernier. "C'est un établissement économique de luxe." Les prix (169 F pour une, deux ou trois personnes), le prépaiement par carte bancaire, le personnel réduit soulignent l'aspect "économique" de l'établissement. Le système de chauffage qui réagit au quart de tour, la climatisation, l'insonorisation, l'isolation thermique, la qualité des couchages, les douches spacieuses (système breveté) et le parquet flottant apportent les preuves d'un "luxe" exceptionnel pour ce type d'hôtel. Il est vrai que Le Petit Déj cache une quasi révolution dans plusieurs domaines. Il a été construit en suivant une méthode non conventionnelle révolutionnaire. Electricité de France a installé un vrai laboratoire pour calculer les consommations électriques et les gérer au mieux pour satisfaire des besoins de confort des clients et maîtriser des dépenses d'énergie. Des capteurs détectent la présence des clients pour activer le chauffage ou la climatisation et obtenir rapidement la température voulue. Ils sont assez évolués pour savoir si quelqu'un est réellement dans la chambre, même s'il est endormi. EDF cherche ainsi à mettre en place des produits spécifiques pour l'hôtellerie, associant gestion et souplesse, économies et confort maximum. Un vaste local technique permet la maintenance des différents équipements sans pénétrer dans les chambres. Chacune d'entre elles peut être isolée pour une éventuelle réparation sans gêner le fonctionnement des autres.
Entretien minimum
Quant à l'hôtel lui-même, il a été monté comme un meccano géant. La structure est réalisée à partir de profilés en acier galvanisé. Les éléments sont rassemblés avec des vis autoperforantes. Ce système apporte bien des avantages : légèreté, robustesse, facilité de mise en œuvre, propriétés parasismique et anticyclonique, hautes performances thermiques et acoustiques. Même les tuiles du toit sont en tôle. Le tout est habillé de plaques de plâtre, avec du PVC pour les portes et les fenêtres. L'ensemble nécessite, en fin de compte, un entretien minimum. Deux salariés s'occupent du ménage et des petits-déjeuners. L'investissement, pour trente chambres, "peut se chiffrer aux alentours de 5 MF", explique Jean Lavergne. Et le président d'Inter Hôtel, propriétaire du Grand Hôtel Saint-Pierre à Aurillac, raconte comment cette expérience a vu le jour. Son fils Laurent voulait lancer un hôtel économique sur Aurillac, "car il n'existait rien dans cette catégorie dans un rayon de 100 km". Et il ne fallait pas dépasser 30 chambres, pour éviter les questions administratives avec la Commission départementale d'urbanisme commercial (CDUC). Jean Lavergne évoque ce projet avec des responsables d'Usinor, lors de rencontres des Dirigeants commerciaux de France (DCF). Ils se montrent intéressés : il s'agit pour eux de trouver d'autres débouchés valorisants pour l'acier.
D'après leurs études, le projet peut être rentable. Mais à condition de réaliser plusieurs établissements, hôtels ou autres, d'arriver à un certain niveau d'industrialisation. Laurent Lavergne lance alors deux sociétés : une pour l'hôtel lui-même et une autre pour commercialiser le procédé de construction. Euro Marquise Conception (ECM) compte quatorze associés.
Extension du concept
Des premiers contacts devraient se concrétiser dans les semaines à venir pour la réalisation d'hôtels dans le Limousin et en Auvergne. Mais il n'est pas question de lancer une chaîne Petit Déj Hôtel. ECM s'adresse aux indépendants désirant lancer leur établissement, "pour les hôteliers de centre-ville qui veulent investir dans la périphérie de leur agglomération ou bien pour les cadres qui quittent les grandes entreprises avec un pactole", souligne Jean Lavergne. Ce procédé pourrait attirer d'autres secteurs : salles de cinéma, maisons individuelles, etc. Il est utilisé aux Etats-Unis, mais bouleverse les habitudes de construction en France. Et quelles sont les réactions de la clientèle ? Ouvert en mars, l'établissement "a vraiment décollé depuis juillet". "Le concept plaît. Un jour, un client a demandé s'il existait un établissement similaire dans la région de Toulouse", se souvient Jean Lavergne. Les petits-déjeuners, à 25 F, sont de style continental : café, thé, beurre, confitures, viennoiseries. "Nous avons écarté l'idée d'un buffet médiocre."
P. Boyer
La structure
est en acier galvanisé et l'assemblage
par vis autoperforantes.
Les trente chambres donnent directement
sur l'extérieur.
"Un établissement économique de luxe".
Jean Lavergne, Grand Hôtel Saint-Pierre à Aurillac, a épaulé son fils dans son projet.
L'HÔTELLERIE n° 2629 Hebdo 2 Septembre 1999
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