Actualités

Actualité
________

Après le plan de cession du groupe hôtelier marseillais

Quel avenir pour les hôtels de la famille Del Prête ?

Depuis quelques mois, la Société hôtelière du Palm Beach de Marseille est entre les mains de la SARL financière Eos. Eos s'apprête à investir environ 12 à 15 MF sur deux ans pour moderniser le Concorde Palm Beach. Elle a également repris le Concorde Prado à Marseille, qu'elle envisage de céder, et l'Atrium d'Arles.

Le plan de cession de la Société immobilière de la fabrique (SIF), dont la Société hôtelière du SHPB était une filiale, prononcé en septembre 1998 par le tribunal de commerce de Marseille, est en effet devenu effectif.
Les hôtels de la famille Del Prête - le Concorde Prado (50 chambres d'hôtel et 50 studios en résidence) et le Concorde Palm Beach (145 chambres) à Marseille, l'Atrium (91 chambres) à Arles - sont donc tombés dans l'escarcelle du repreneur, la SARL Financière Eos, une société parisienne gérée par Dominique Escarra.
Selon le plan de cession, celle-ci s'engage à se recentrer sur l'activité hôtelière de la SIF, et particulièrement sur celle de la SHPB, et à effectuer rapidement pour 10 à15 MF de travaux de rénovation dans les hôtels, essentiellement pour remettre à niveau le Concorde Palm Beach, quatre étoiles dont le lustre s'est terni.

Crédit bail à renégocier d'ici l'été
Les premiers travaux devraient démarrer cet automne. Ils étaient conditionnés à la renégociation des crédits-bails que la SHPB avait souscrits pour acheter les murs du Concorde et de l'Atrium d'Arles. En ce qui concerne le Concorde Palm Beach, les charges de leasing sont, en effet, "disproportionnées par rapport à la valeur vénale du bâtiment", lit-on dans le jugement de cession.
"La SHPB est plutôt en bonne santé, hormis justement le montant du crédit-bail, estime aujourd'hui Dominique Escarra. D'après notre bilan consolidé, le capital restant dû aux crédits bailleurs pour le Palm Beach et l'Atrium s'élève à 110 MF, ce qui est d'autant plus lourd que le taux d'intérêt est élevé alors que le taux d'inflation est faible."
A l'énoncé de cette somme, on comprend d'ailleurs le faible prix versé par Eos pour le rachat des titres de participation de la SHPB, évalués à... 250 000 F !
"Les négociations menées avec les crédits bailleurs sont sur le point d'aboutir et l'accord pour un réaménagement à la baisse devrait être finalisé d'ici le 30 juin", ajoute Dominique Escarra. "Nous commencerons donc les travaux à l'automne et les réaliserons par tranches, afin de ne pas fermer l'hôtel. Nous investirons au moins 6 MF la première année et sans doute autant la seconde. Nous allons commencer par les parties communes - réaménagement du hall d'accueil, de la réception, de la partie séminaires, de la piscine, avec création d'un grill - et par une partie des chambres. Nous sommes optimistes poursuit-il, car la conjoncture sur Marseille est redevenue bonne et nous souhaitons cibler, outre la clientèle de séminaires habituelle, une clientèle de touristes individuels haut de gamme. Il n'est d'ailleurs pas impossible que nous demandions ultérieurement l'autorisation d'ouvrir de nouvelles chambres, à la place de bureaux et salles de réunion dont nous disposons. Le Concorde Palm Beach, qui réalise actuellement environ 38 MF de chiffre d'affaires HT annuel, est un bon produit et aurait fait d'excellents résultats s'il avait pu être rénové à temps."

Redynamisation du Concorde Prado
Quant au Concorde Prado, qui réalise un CA de 9 MF, il sera sans doute déclassé de quatre en trois étoiles et l'homme d'affaires envisage de le céder. Des tractations avec plusieurs candidats se poursuivent. "Selon nous, la moitié de l'établissement qui, il y a 4 ans, avait été transformé en résidence hôtelière, devrait retrouver sa fonction première afin que le Concorde Prado compte à nouveau 100 chambres, au lieu de 50 actuellement. Nous voulons, par ailleurs, bénéficier de la réalisation immobilière prévue dans le pâté de maisons voisin du nôtre, en y associant les parkings et la galerie commerciale que nous avons rachetés. Nous sommes actuellement en discussion avec d'éventuels partenaires commerciaux pour redynamiser cette dernière, ce qui sera positif pour l'hôtel.".
Contrairement au Concorde Palm Beach et à l'Atrium, dont les murs appartiennent encore, de fait, au pool bancaire qui avait consenti un crédit bail pour leur achat, le Concorde Prado est entièrement payé.
L'Atrium d'Arles, filiale de la SHPB, est jugé, lui, en "très bon état", et ne nécessite donc pas de rénovation avant plusieurs années.
"Il est quasiment neuf et, avec 12 MF de CA HT, c'est l'hôtel qui réalise le plus gros chiffre d'affaires de la ville. Il a une grosse clientèle étrangère, allemande, japonaise, italienne", affirme Dominique Escarra.
La famille Del Prête - qui détient encore 4 % de la SHPB - continue d'assurer l'exploitation des trois établissements hôteliers. Elle crée à cet effet la SMS (Société de management et de services) avec laquelle Eos a signé un contrat de management, conformément à ce que prévoyait son offre de cession déposée auprès du tribunal de commerce. Cette situation durera pendant "toute la période transitoire" et se "régulera au fil du temps".

Qui est le repreneur ?
Le tribunal de commerce de Marseille avait retenu, sans enthousiasme, en septembre dernier, l'offre de cession partielle qu'avait faite Eos pour acquérir la Société immobilière de la fabrique (la société mère de la SHPB) en redressement judiciaire depuis juillet 1997 et dont le plan de redressement avait échoué.
La SARL financière Eos a acheté ainsi comptant, pour 13,6 MF - montant jugé "très faible" dans les attendus du tribunal, "eu égard au montant du passif à apurer" - les biens immobiliers de la SIF (deux parkings, deux galeries commerciales, situés à Marseille, un appartement à Marina Baie des Anges), ainsi que les biens mobiliers composés essentiellement des titres de participation de la Société hôtelière du Palm Beach.
Avec seulement trois millions de fonds propres, Eos a en apparence une surface financière limitée. Gérée par Dominique Escarra, elle agit, selon les termes de l'administrateur judiciaire maître Douhaire cités dans le jugement, comme "conseil en fusions et acquisitions et investit parfois aux côtés d'un repreneur, notamment dans le domaine de l'hôtellerie depuis six ou sept ans".
Dans le cas marseillais, elle intervient "pour le compte d'une ou plusieurs sociétés à constituer "les holdings de reprise" qui seront dédiés à la reprise des actifs définis dans l'offre, aux côtés d'une société belge financée par Jean-Philippe Chomette, financier international réputé".
Ce dernier, basé à Londres, est en fait le neveu par alliance de Dominique Escarra, et a repris les actifs hôteliers à 100 %. C'est la première fois qu'il investit dans ce secteur et il a constitué pour cela la Société Empire Hostellerie International qui souhaite continuer à se développer dans le Sud de la France.
Eos a de son côté repris, à 50 %, les actifs non hôteliers, aux côtés de M. Chomette.
Ce n'est pas la première fois que Dominique Escarra constitue des tours de table avec des investisseurs internationaux pour reprendre des hôtels de standing.
Il a, au cours des dix-huit mois écoulés, conseillé la constitution, avec des fonds du Québec et des Etats-Unis, d'un groupe de 9 hôtels de quatre et trois étoiles plus, soit 630 chambres, pour un coût total de 400 MF. Cette chaîne sans enseigne compte huit hôtels parisiens gérés par Astotel, dirigés par Serge Cachan, dont Le Madeleine Palace rue Cambon, Le Royal Alma rue Jean Goujon et un hôtel niçois, Le Beau Rivage, dont la gestion été déjà confiée au groupe marseillais Erghot (chaîne New Hôtel), dirigé par Georges Antoun, et l'est resté.
L. Casagrande

Flash back sur les raisons d'un échec

L'activité hôtelière, dans laquelle la famille Del Prête s'était lancée à partir des années soixante-dix, a commencé par pâtir des difficultés de l'activité d'origine, le commerce de la faïence et de la vaisselle.
En 1993, ADP France, la société de faïence, passe ainsi devant le tribunal de commerce. Le représentant des créanciers chiffre alors son passif à 378 MF.
Le tribunal n'accepte un plan de continuation que parce que la moitié de ses créances est cautionnée par sa holding, La Société immobilière de la fabrique, et parce que, souligne-t-il, la famille a un "comportement exemplaire" dans l'industrie régionale.
Mais, en 1997, la Société immobilière de la fabrique passe à son tour devant le tribunal. En 1998, elle dépose un plan de redressement. Son passif s'élève alors à 150 MF. Elle est "plombée" par le cautionnement consenti à ADP France.
De son côté, l'activité hôtelière a commencé à être en déficit. La construction du Concorde Palm Beach, en 1976, puis l'acquisition de l'Atrium d'Arles, ont en effet été financés par leasing et le coût de leur location pèse lourdement sur le budget d'exploitation : 9,60 MF par an pour le Concorde Palm Beach, 3 MF pour l'Atrium d'Arles jusqu'à un moratoire datant de mai 1997, selon Dominique Escarra.
La Société hôtelière du Palm Beach perd 9,7 MF en 1996 (dont plusieurs millions pour un chantier naval absorbé) et 4,4 MF en 1997 pour un chiffre d'affaires tournant autour de 45 MF (Concorde Prado + Concorde Palm Beach).
En février 1998, la SHPB, qui avait déjà vendu en 1995 le fonds de l'hôtel Abrial de Cannes (les murs, hypothéqués par le Société Générale, et appartenant encore à la SIF, sont toujours à vendre) cède ses actions de l'hôtel Alexander à Paris pour plus de 26 MF afin, notamment, de pouvoir payer ses arriérés de loyer à son crédit-bailleur.
Lors de la mise en redressement judiciaire de sa holding, son état n'est donc pas jugé suffisamment solide par le tribunal pour que celui-ci accepte le plan de continuation partielle de la SIF, construit autour de l'activité hôtelière.


L'HÔTELLERIE n° 2619 Hebdo 24 Juin 1999

L'Application du journal L'Hôtellerie Restauration
Articles les plus lus...
 1.
 2.
 3.
 4.
 5.
Le journal L'Hôtellerie Restauration

Le magazine L'Hôtellerie Restauration