Alors que le Conseil d'Etat annulait fin novembre le décret buvette,
deux jours avant Noël, les députés ont voté la modification de l'article L 49-1-2 du
Code des débits de boissons, accordant ainsi de nouveau l'ouverture de 10 buvettes par an
dans les stades. Le feuilleton laisse perplexe.
Alain Néri, député du Puy-de-Dôme le 22 décembre dernier dans l'hémicycle :
"C'est avec colère et indignation que les dirigeants bénévoles des petits clubs
sportifs avaient accueilli la décision du Conseil d'Etat d'annuler le décret du 8 août
1996 les autorisant à ouvrir une buvette plus d'une fois par an. C'est en effet une
décision injuste et vexatoire. Elle tend à accréditer l'idée selon laquelle les clubs
sportifs inciteraient à l'alcoolisme, alors même que le Conseil d'Etat s'est prononcé
à la requête de la Fédération nationale de l'industrie hôtelière, qui n'a certes pas
pour motivation de préserver la santé publique. Conviviales et traditionnelles, les
buvettes aident les clubs à financer leur activité, qui concourt à l'animation de nos
communes et à l'intégration des jeunes." Un peu plus loin dans les débats,
François Rochebloine, député de la Loire, ajoute : "Si nous voulons lutter
contre l'alcoolisme, augmentons les crédits qui sont destinés à cette lutte,
n'hésitons pas à multiplier les contrôles, en particulier les week-ends à la sortie
des discothèques. Mais de grâce, assez d'hypocrisie ! Arrêtons de nous donner bonne
conscience ! Entendons l'appel que nous lancent les dirigeants de clubs, avant qu'il ne
soit trop tard."
L'appel a été entendu puisqu'au terme des débats, les députés, tous bords
confondus, et dans une très large majorité, ont voté un amendement qui rétablit
l'autorisation de vendre des boissons du 2e et 3e groupes dix fois par an dans les stades,
à l'occasion de manifestations sportives. Comment la mesure a-t-elle pu revenir sur le
devant de la scène alors que les députés discutaient la loi de finances rectificative
pour 1998 ? Tout simplement parce que, très judicieusement, le texte présenté en faveur
des associations sportives a été assorti d'une disposition fiscale : chaque demande
d'ouverture de buvette est désormais assujettie à un droit de timbre d'un montant de 10
F.
Faut-il à nouveau crier à la trahison, comme nous l'avons fait en 1996 ? La vente
d'alcool a toujours eu lieu dans les stades, avec ou sans autorisation serait-on tenté
d'ironiser. Ce qui ressort, ici, c'est surtout la facilité avec laquelle la profession
est dupée. Relisez attentivement les propos de nos députés. L'un, relève fielleusement
que le secteur n'a pas pour "motivation de préserver la santé publique".
L'autre, pour lutter contre l'alcoolisme, réclame davantage de contrôles à la sortie
des discothèques. Que les associations sportives aient gain de cause, tant mieux si ça
les aide à survivre. Mais que les allusions systématiques qui placent la profession dans
le camp des méchants cessent. Messieurs les députés, les cafés, les restaurants, les
discothèques concourent également à l'animation des communes et à l'intégration des
jeunes. L'oublier serait hypocrite.
Sy. S.
L'HÔTELLERIE n° 2594 Hebdo 31 Décembre 1998