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Hôtellerie l Clientèle de sports d'hiver

Le ski n'a plus l'exclusivité

L'hôtellerie des stations de sports d'hiver affiche un léger mieux. Parallèlement, elle s'est adaptée aux nouvelles demandes de la clientèle, pour qui le ski n'est plus la priorité et qui veut vivre des séjours avec des activités complètes et élargies.

Pour les stations de sports d'hiver, ces deux dernières années se sont révélées meilleures que les quelques années précédentes. Regain du goût des vacances à la montagne, enneigement exceptionnel, notamment pour les Alpes du Sud, sont les principales raisons de ce revirement positif de situation. Les stations de sports d'hiver ont aussi subi de façon moins forte un détournement de la clientèle au profit des destinations soleil. L'attrait des vacances au soleil à moindre prix est en fait à relativiser selon Danielle Romagnoli, secrétaire générale de la FAGIHT (Fédération autonome générale de l'industrie hôtelière et touristique) : "il faut comparer ce qui est comparable. Des vacances à l'hôtel à Courchevel sont à comparer avec un séjour au Club Med à Tahiti, alors qu'un séjour dans une station moyenne est à mettre en parallèle avec un séjour balnéaire en Tunisie. Et il faut inclure les différentes activités. Dans ces conditions, les différences de prix s'estompent." Ainsi, dans une conjoncture plus favorable, l'hôtellerie des stations de ski augmente sa part du gâteau, affichant un léger mieux en 1997-98 avec 8,7% des choix de modes d'hébergement pour les séjours à la montagne en hiver. Elle est néanmoins largement concurrencée par les autres formes d'hébergement, principalement les locations saisonnières et l'essor des résidences hôtelières. Elle représente d'ailleurs, selon le Seatm, seulement 6,8% du nombre total de lits des 220 stations de sports d'hiver françaises, ayant chuté de 40 à 60% dans l'offre en vingt ans, alors que la capacité totale en hébergement a été multipliée par 4.

Des habitudes ancrées... qui disparaissent

Mais, si la clientèle hôtelière de la montagne est plus réduite en volume, elle a également beaucoup changé. Les hôteliers ont dû s'adapter aux nouvelles demandes de leurs clients, devenus, on le sait, de plus en plus incompréhensibles et toujours à la recherche du meilleur rapport qualité-prix. Promotion musclée, démarche commerciale active, forfaits tout compris, animations... sont désormais le lot de tous ceux qui veulent conserver leur taux d'occupation, et ce "avec des plannings très difficiles à gérer", insiste Danielle Romagnoli. Les stations de sports d'hiver étaient en fait, jusqu'à ces dernières années, relativement épargnées par les grandes tendances comportementales liées à la consommation de vacances. Elles sont désormais autant concernées que les autres destinations. Ainsi, les touristes comme ailleurs réservent leur séjour de plus en plus tard (sauf en période de vacances scolaires). A certaines dates, les clients arrivent même en station sans aucune réservation... et peuvent trouver de la place, phénomène inconnu l'hiver jusqu'à ces dernières années. La durée des séjours est aussi à la baisse : même les semaines ont tendance à être écourtées (plus de week-ends, 3, 4 jours) pour la clientèle française. Les séjours de 2 ou 3 semaines n'existent plus. La clientèle étrangère, encore minoritaire et essentiellement composée d'Européens, continue cependant à séjourner une semaine généralement. Globalement, le séjour moyen s'établit à environ 6 jours.

La notoriété des grandes stations

Les petites stations de moyenne altitude sont celles qui souffrent le plus, encore aujourd'hui, principalement de leur manque de notoriété auprès de la clientèle jeune et des étrangers. En effet, ces derniers fréquentent les grandes stations, généralement en haute altitude, par méconnaissance des autres et pour l'assurance de l'enneigement : ils viennent encore essentiellement pour pratiquer le ski. Les efforts concernant les prix ont été le plus souvent consentis par les stations de basse et de moyenne altitude. Les grandes stations attirent malgré tout une clientèle beaucoup moins sensible au prix. Ainsi, les stations moyennes reçoivent généralement des personnes beaucoup moins dépensières. "La clientèle est essentiellement française et familiale en Chartreuse et dans le Vercors. La clientèle étrangère est présente en Oisans, à l'Alpe d'Huez ou aux Deux Alpes, surtout en dehors des périodes de vacances scolaires", résume Karine André du CDT de l'Isère. Cet exemple est valable également pour les autres départements. Pourtant, ce sont souvent les petites stations qui rivalisent d'ingéniosité pour attirer les touristes. "Le Vercors propose des forfaits incluant une carte d'hôte qui accorde des réductions ou des gratuités sur certaines activités (piscine, musées, restaurants...). Cette formule fonctionne bien et est très intéressante pour les prestataires car elle permet une fidélisation de la clientèle", constate Karine André. Les packages offrant des activités extra-ski fonctionnent s'ils proposent des avantages palpables aux clients. "Le package de base (hôtel + location de skis + forfait remontées mécaniques) est acheté par la clientèle étrangère et la clientèle française de janvier, celle qui vient encore à la montagne pour le ski," note M. Daumas (Hôtel Le Cheval Noir à Saint-François-Longchamp). De plus en plus volatile, de moins en moins fidèle à la station et à l'établissement -- ce qui s'explique par la multiplication des courts séjours et la diversification des destinations de vacances --, la clientèle hôtelière est également vieillissante et "ne se renouvelle pas" déplore Danielle Romagnoli. Pourtant Roger Machet, président du Syndicat des hôteliers de Val d'Isère note que "l'évolution des sports de glisse a eu un impact important pour le retour d'une clientèle jeune", qui, il est vrai, fréquente peu les hôtels, par souci d'économie.

Pouvoir faire d'autres activités

Le développement des « nouvelles glisses » - snowboard essentiellement, mais aussi télémark, skwal, patinettes, monoski - et la multiactivité permettent de satisfaire une clientèle devenue aujourd'hui touche à tout. Ainsi, les clients des sports d'hiver ne partent plus à la montagne uniquement pour faire du ski, même si, comme le confirme Régis Lavina, responsable du Club de commercialisation des hôteliers à la CCI de Savoie, "le ski reste l'achat de base, le motif du séjour". Elle a "besoin de s'enrichir" pendant son séjour, précise-t-il, en pratiquant de nombreuses activités. Pour preuve, le boom de toutes les activités liées à la nature : raquettes, promenades sur des chemins enneigés (mais damés, en toute sécurité). Réussite aussi des expositions de type « Arts et traditions populaires », succès des cinémas, devenus indispensables aujourd'hui pour une station, de même que les patinoires ou les piscines. A noter également le développement du tourisme industriel et technique, avec une très bonne fréquentation en 1997 de la visite des installations, organisée par la Société des remontées mécaniques de Méribel après la fermeture des pistes, par exemple.

Une demande accrue de confort à l'hôtel

La clientèle hôtelière à la montagne ne choisit plus de séjourner à l'hôtel que pour l'hébergement. Et, même si, par besoin de liberté et par souci d'économie, les séjours en demi-pension ou en logement-petit-déjeuner se sont développés, hors de question de sacrifier le confort et le service (tendance actuelle générale), surtout pour la clientèle d'accompagnateurs qui est majoritaire dans certaines stations. "La clientèle a de plus en plus besoin d'être prise en charge et chouchoutée. Les clients attendent de l'hôtelier qu'il les « rassure » en skiant avec eux 1/2 journée lorsqu'ils sont débutants, qu'il les réunit lors d'un pot d'accueil, qu'il les informe sur la station, ne serait-ce qu'en commentant la plaquette de l'office de tourisme", se tue à répéter Régis Lavina aux hôteliers . Les vacanciers désirent aussi trouver des activités et des animations pour l'après-ski. Ainsi les hôtels disposant d'une piscine, de hammams, jacuzzis, saunas... connaissent une meilleure fréquentation. Une demande d'animation le soir, telles que soirées contes, soirées à thème, soirées festives ou tout simplement un repas traditionnel avec une découverte de la cuisine locale, s'affirme également. "La clientèle ne demande pas tant les jeux, les animations que le côté sympathique de la montagne, un retour à l'authentique qui se manifeste aussi dans la recherche d'hôtels d'architecture traditionnelle", insiste Roger Machet. A noter que la présence de toutes ces activités est souhaitée par les touristes, même s'ils ne les consomment pas. "On a l'impression que quand ils rentrent, ils doivent pouvoir dire : Il y avait ça, ça et ça", souligne Karine André.

Dépenser autant pour plus de prestations

Car cette clientèle est bien souvent attentive à ses dépenses : le choix est souvent fait de sandwichs au déjeuner, les consommations au bar limitées, sauf pour un segment de clientèle qui a parfois préféré abandonner les stations huppées pour privilégier le confort de son séjour, à budget équivalent. Monsieur Daumas le résume ainsi : "Nous travaillons aujourd'hui avec une clientèle descendante, beaucoup plus exigeante sur son confort. En revanche, cette clientèle ne discute pas les prix, et s'offre plus de dépenses supplémentaires au bar ou au restaurant par exemple où les clients commandent parfois de bons vins". La clientèle hôtelière des sports d'hiver ne cherche plus aujourd'hui à rentabiliser son forfait de ski mais à profiter de manière élargie de son séjour pour se reposer, se ressourcer, s'aérer... et s'aérer l'esprit. En un mot, changer ses habitudes, "zapper pendant ses vacances", comme le résume Régis Lavina est tout à fait dans l'air du temps.

N. Peinnet


L'HÔTELLERIE n° 2591 Supplément Économie 10 Décembre 1998

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