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Editorial

Inutilités...

Quand en 1900 Michelin sortit son premier guide, c'était dans le seul but d'aider le voyageur qui, bien téméraire à l'époque, s'aventurait à circuler sur les routes françaises. Un guide gratuit qui donnait toutes les adresses utiles à un chauffeur pour approvisionner et entretenir son véhicule comme pour se loger et se nourrir au cours de son périple. Les rédacteurs avaient sillonné les routes d'alors en se mettant intégralement au service des utilisateurs du guide. Près d'un siècle plus tard, c'est toujours dans le même état d'esprit que l'équipe de l'avenue de Breteuil à Paris conçoit son guide et le fait que sa sortie, la première semaine de mars, fasse autant de bruit que l'attribution du Goncourt n'émeut en rien Bernard Naegellen, le patron du guide, qui persiste à ne vouloir concevoir ce guide que dans le seul intérêt de ses lecteurs et non pas dans celui des maisons citées. Bernard Naegellen tient certainement là la clé de la réussite de ce qui est devenu aujourd'hui une institution. On peut être déçu qu'une maison que l'on aime particulièrement ne soit pas mieux « notée », étonné qu'une autre, dont on apprécie moins les talents du chef, soit étoilée, mais d'une manière générale, la contestation n'existe pas et le sérieux des choix du guide est sans équivoque. Pour qu'à sa sortie le Michelin suscite l'intérêt des médias, il n'a pas besoin de créer l'événement en supprimant une maison ou en dénichant quelque lieu insolite, les trouvailles ne lui apporteront rien, il continue juste, depuis 98 ans, à être ce qu'il est : un guide sérieux.

Bien sûr, au fil du temps, son succès a fait des envieux qui auraient souhaité pouvoir eux aussi avoir droit à leur part de gâteau. Un travers que la Fontaine avait déjà débusqué chez les animaux... Les petits pensent souvent qu'avec quelques artifices ils peuvent aisément se faire plus gros, histoire d'éliminer les plus forts... Alors, à force d'auto-persuasion, ils pensent y arriver et très vite proclament leurs intentions : ça va toujours très vite dans leur esprit, « une question de mois », et ils auront pris la place... Naïfs, ils imaginent être crédibles et cherchent alors par tous les moyens à faire parler d'eux et utilisent quelques supercheries... Depuis plusieurs années maintenant, le guide Gault Millau cherche à retrouver un nouveau souffle et à chaque changement d'équipe il se trouve toujours un quelconque plumitif pour avoir « l'idée de l'année ». Pour l'édition 1998, c'est sur Paul Bocuse que l'on a jugé astucieux de se défouler...
La note est remplacée par un ? les commentaires se disent désolés de devoir être mauvais et sur une
vingtaine de lignes, des digressions inutiles nous lassent.

Rien de bien intéressant pour le lecteur que de tels propos qui ne semblent destinés qu'à régler des comptes personnels par guide interposé. Une prose d'autant plus inutile qu'elle n'a été consultée que par ceux qui connaissent bien la cuisine de Paul Bocuse et qui n'attendaient pas l'avis du critique pour savoir ce qu'ils aimaient à Collonges au Mont d'Or ! Agitation stérile autour d'un guide dont les auteurs se succèdent sans jamais comprendre que pour assurer sa crédibilité, ils doivent commencer par faire preuve, avant tout, d'humilité pour mieux se tenir au service de leur lecteur qui ne recherche qu'à être bien informé et qui n'a cure des états d'âme des rédacteurs. Pour les messages personnels, libre aux auteurs du
guide de prendre rendez-vous avec les personnes concernées, aujourd'hui la technologie offre de très nombreux moyens de les contacter... Quant au Michelin, avec de tels concurrents, il
n'a pas de quoi être inquiété.

PAF


L'HÔTELLERIE n° 2588 Hebdo 19 Novembre 1998

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