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La séparation Hermé Ladurée

Vers un contentieux

«Ladurée existait avant Pierre Hermé et vivra ensuite», commente David Holder, p.-d.g. de la marque. Pierre Hermé ouvrira prochainement une procédure judiciaire.

Comme beaucoup de divorces, la séparation entre Ladurée, filiale à 100% du groupe nordiste Holder et le créateur pâtissier Pierre Hermé tourne au vinaigre. David Holder, fils de Francis créateur du groupe et président de Ladurée, accuse Pierre Hermé d'avoir «joué son jeu de façon malhonnête», ce qui explique une séparation «un peu brutale». Selon Holder, Hermé, qui était son consultant, aurait engagé de nouveaux projets de développement à l'étranger à l'insu de son client Ladurée et en utilisant son nom comme ses moyens. «La moindre des choses eût été de nous en parler», explique le jeune président de Ladurée. Pierre Hermé ne souhaite pas répondre explicitement à cette accusation, refusant d'entrer dans une polémique par presse interposée. Par contre, son associé Charles Zanéty nous indique qu'une procédure judiciaire devant le tribunal de commerce de Paris est en cours de préparation. Selon toute vraisemblance, le tribunal aura à connaître du contenu exact du contrat de l'entreprise de Pierre Hermé, une affaire qui traite classiquement les activités de création, d'édition, de gestion de nom et de marque, de conseil et de coopérations diverses mises en place par cet artisan exceptionnel. Au moment où nous écrivions, Hermé avait tourné la page et se trouvait à New York pour la mise en place d'un nouveau projet.

Un orchestre sans chef ?
Une autre polémique plus sérieuse peut-être, car elle engage la vie d'une entreprise et de ses acteurs d'aujourd'hui, concerne la réalité de la maison Ladurée. Le succès de la maison est-il directement lié au passage de Pierre Hermé à la tête du laboratoire, et son départ met-il en danger le nom et les établissements Ladurée ? Incontestablement l'aura du maître acquise chez Fauchon ainsi que son talent ont donné un coup de fouet à la maison et permis au nouvel établissement des Champs-Elysées de gagner immédiatement une notoriété internationale et l'intérêt pressant des médias. Mais pour David Holder, ce succès est le résultat d'un travail d'équipe, même si Pierre Hermé était bien le chef d'orchestre. «Ladurée existe depuis 1862. Aujourd'hui encore le macaron représente la moitié de ses ventes. Lorsque notre groupe a repris l'affaire en 1993, nous avons conçu immédiatement l'idée de la développer, d'abord à Paris puis dans quelques métropoles de taille mondiale. Cela s'est concrétisé aux Champs-Elysées, mais aussi dans deux corners au Printemps Haussmann et chez Frank et Fils. Nous avons eu l'idée d'associer un créateur à notre nouvelle expansion, et de lui confier le devant de la scène. Peut-être avons nous eu tort». La brigade des Champs- Elysées compte quarante membres et plusieurs seconds. Le nouveau chef nommé parmi eux, Philippe Andrieu, saura poursuivre le travail de maintien de la tradition et d'innovation simultanément, affirme David Holder. «Et je serai désormais personnellement le porte-parole de la maison», ajoute-t-il, à commencer par la présentation de la collection d'hiver. Ladurée emploie aujourd'hui 254 personnes pour 90 MF de CA contre 15,7 MF pour 45 personnes en 1993, et 24 MF pour 140 personnes en 1996 avant l'ouverture de Ladurée Champs-Elysées. L'affaire, selon son président, est profitable. «Le nouvel établissement a déjà dépassé l'équilibre d'exploitation, et le retour sur investissement (50 MF) et frais financiers est attendu sous cinq ans. Cet investissement a très clairement conforté la stature internationale de Ladurée», analyse David Holder. L'expansion va se poursuivre. Ladurée s'efforce de reprendre au Tribunal de commerce un fonds dans le quartier du Trocadéro. «L'affaire est complexe et peut échouer même si nous y tenons beaucoup. Nous avons d'autres projets. En tout cas nous devons ouvrir deux salons de thé à Saint-Germain-des-Prés et dans le XVIème arrondissement». A New York, Ladurée tente de négocier très prudemment l'ouverture d'un modeste corner de 30 m2 chez Bergsdorf et Goodman au coin de la cinquième avenue et de la 57ème rue. Un ticket d'entrée pas exagérément cher pour tester le marché et envisager mieux par la suite. Et peut-être une raison de regretter l'absence d'un grand créateur.
A. Simoneau asimoneau@lhotellerie-restauration.fr


Ancien promoteur de l'image de marque Ladurée, Pierre Hermé va désormais imposer son savoir-faire seul.


L'HÔTELLERIE n° 2582 Hebdo 8 Octobre 1998

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