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Thonon-les-Bains

Du viagra au menu !

lls en parlent tous ! L'Agence France Presse a multiplié les fils sur une affaire "montée" à la "une" du Dauphiné Libéré, du Progrès, de Lyon Figaro et du très sérieux Times. En Afrique du Sud, aux Etats-Unis et au Canada, on connaît désormais Thonon-les-Bains, petite ville de 30.000 habitants à une vingtaine de kilomètres de Genève.

Genève justement où pour Jean-Louis Galland, propriétaire et chef du Basilic, tout a commencé ou presque. De son propre aveu, son histoire n'est qu'un canular, un poisson d'avril hors saison avec une bouteille de champagne pour enjeu. Déjà l'année dernière, ce farceur avait affiché en façade de son restaurant «vache folle et mouton tremblant» précisant qu'il était «en rupture de stock». Là, il a frappé plus fort en proposant à sa clientèle avide de sensations nouvelles un «menu aphrodisiaque» avec une «picatta de bœuf sauce... Viagra», un produit dont la vente est interdite en France mais autorisée -sur ordonnance- en Suisse. «C'est simple, nous avons ramené 200 mg de produit, divisé chaque comprimé -achetés à 90 francs l'unité- en cinq, avant de colorer la sauce au caramel, de déglacer au vinaigre et de servir !»
Le menu à 180 francs était du reste sérieusement «orienté» avec une «marinière de langoustines troussée sur bisque de homard à la purée de piment rouge» et un «nougat glacé au gingembre confit et à la menthe fraîche».
La clientèle intéressée ne pouvait plaider la surprise puisqu'une note précisait que les «utilisateurs de ce menu ne présentaient aucune contre-indication.»
L'affaire a fait du bruit au point qu'après deux services, les services de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) sont venus sur place saisir le corps du délit, deux comprimés de Viagra mis sous scellés et transmis au juge pour suite à donner !

Jean-Louis Galland l'épicurien le sait : il risque le tribunal, non pour avoir acheté -il possédait une ordonnance pour cela, mais pour avoir importé et transporté des produits dont la vente en France est interdite. Il peut donc être inculpé pour cela ou pour un exercice illégal de la pharmacie, même si en France le produit -exploité par Pfizer et qui devrait être mis en vente en France à la rentrée-, est davantage considéré comme une drogue que comme un médicament !
«J'ai suspendu la vente de ce menu et j'attends désormais la décision. Je sais simplement que l'affaire a donné un gros coup de projecteur sur notre ville et que, depuis huit jours, je passe le plus clair de mon temps à répondre aux journalistes, aux radios et aux télévisions», dit-il.
Il sait aussi que son restaurant affiche complet et que le coup de pub a été assez grandiose. Il s'en réjouit et concocte déjà un autre menu, quasiment similaire mais réalisé avec des produits... homéopathiques dont la vente, elle, est tout à fait légale et autorisée en France !
J.-F. Mesplède

L'HÔTELLERIE n° 2577 Hebdo 3 Septembre 1998