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Propriétaires aux abonnés absents

A Rennes, la très commerçante rue Saint-Georges vient de vivre la fermeture de deux de ses établissements fétiches. Les propriétaires du café Carmès et du restaurant O'Brasil ont dû quitter les lieux pour cause de travaux. Et ce en... 15 jours.

En juin et juillet, le Mondial bat son plein. A Rennes, le restaurant brésilien O'Brasil ne désemplit pas. "Lors de la dernière Coupe du Monde en 94, nous avions fait en un mois le plus gros chiffre de toute l'existence du restaurant. Vous imaginez bien ce que je peux perdre cette année ! Nous avions tout prévu et acheté : projecteur pour retransmettre les matchs sur écran géant, publicité achetée, etc.", se désole Angéla Brassier, propriétaire du O'Brasil. L'établissement, situé rue Saint-Georges ferme pour cause de travaux, tout comme le café Carmès, mi-juillet. Ces deux établissements occupent respectivement le côté gauche et droit du rez-de-chaussée d'un immeuble menaçant de s'affaisser. Les travaux de consolidation devraient durer "jusqu'en novembre, décembre", explique-t-on au syndic Armor Immobilier. Pendant toute la saison donc, et bien au-delà, ces deux établissements connus, l'un pour son dynamisme coloré et exotique (par ailleurs premier cyber-café de Bretagne), l'autre pour être un pôle culturel et musical, présenteront portes closes. Au syndic concerné, M. Levaillant signale que "toutes les périodes ont été envisagées. Janvier ne convient pas aux étudiants, Pâques non plus, nous avons donc opté pour juillet. De toute façon, à Rennes, août est un mois mort."
Ces travaux dont le coût se monte à près de 2 MF, tout le monde s'accorde pour reconnaître leur utilité et leur urgence. Il suffit d'ailleurs de jeter un œil sur la cour intérieure et le hall de l'immeuble pour en prendre l'entière mesure : poutres étayées par des planches, relents d'égouts, circuits électriques découverts, etc. "Mais cela fait sept ans que l'on en parle ! Et franchement je ne croyais pas que la copropriété allait se décider maintenant", s'étonne Angéla Brassier. Les locataires avaient même demandé les travaux depuis longtemps sans résultat, les copropriétaires ne souhaitant visiblement pas engager de frais. "Ils ont agi sous la menace d'un arrêté de péril", remarque Jacques Carmès. M.Levaillant d'Armor Immobilier, souligne quant à lui "qu'on ne pouvait plus attendre. Nous avons agi dans l'urgence pour en effet éviter un arrêté de péril qui aurait été préjudiciable pour tout le monde." Dans un tel cas, la municipalité prend l'affaire à son compte, tout en se reposant financièrement sur la copropriété, mais sans aucune garantie concernant la durée des travaux (d'où un manque à gagner certain pour des propriétaires désireux de relouer au plus vite).

Mutisme des propriétaires

Mais le plus étonnant demeure l'attitude des huit copropriétaires "qui nous ont prévenu quinze jours avant de vider les lieux. Après douze années passées ici !", s'indignent Jacques et Mylène Carmès. Quelques jours avant la date fatidique, aucun avertissement n'est encore affiché sur la porte comme la loi l'exige. Du côté du syndic, M. Levaillant signale "que les locataires ont été avertis et informés, ne serait-ce que par les visites régulières de l'architecte. Ils ont aussi constitué une association dont l'un des représentants a assisté à l'avant-dernière assemblée générale des copropriétaires (en avril, pour des travaux annoncés mi juin...) Quant à l'affiche sur la porte, elle a été apposée mais quelqu'un l'a sûrement arrachée", poursuit-il. Rien n'a en tout cas brisé le mutisme des propriétaires. "Nous avons envoyé plusieurs lettres recommandées afin de connaître les modalités du déménagement, sans réponse", explique J. Carmès alors que Angéla Brassier assure n'avoir "absolument aucun contact avec ma propriétaire. Je n'arrive pas à la joindre. J'ai envoyé deux lettres recommandées. Comme je n'ai pas été prévenue, la loi me permet de rester dans les lieux." Pour autant, la propriétaire du O'Brasil ne souhaite pas jeter de l'huile sur le feu et décide de quitter les lieux, "et de toute façon, on m'a fait savoir que si je restais on me couperai l'eau et l'électricité." Elle a toutefois rejoint une autre affaire, plus éloignée, "mais les habitués ne viennent pas systématiquement comme là-bas."
Reste que les tenanciers s'interrogent logiquement. "Qui va me payer le déménagement ? Qui va compenser le manque à gagner ? Comment vais-je retrouver les locaux après les travaux ?", se demande Jacques Carmès. Quid des indemnités d'expulsion, quid de la suspension de loyer ?... Les tenanciers engagent des actions via leurs avocats respectifs afin de demander des dédommagements contre ce que Angéla Brassier appelle des "abus de pouvoir arbitraires."

O. Marie


L'HÔTELLERIE n° 2575 Hebdo 20 Août 1998

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