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Dinan

L'Hermine en sursis...

De son origine à aujourd'hui, cette affaire fait l'effet d'une mauvaise boule de neige. D'erreurs administratives en mauvaises volontés évidentes, la crêperie L'Hermine à Dinan risque de ne jamais rouvrir ses portes.

En décembre 1989, Pierre Delaunay achète un immeuble sur deux niveaux, rue du Port, dans le vieux Dinan, en communication avec une discothèque lui appartenant. Il compte créer une crêperie, L'Hermine. En pénétrant dans l'enceinte de L'Hermine, le client arrive sur une première terrasse de plain-pied (aujourd'hui une cour). Sur la gauche, un escalier accède à une seconde terrasse surélevée et, sur la droite, à l'entrée de la crêperie également surélevée. Le permis de construire est accordé en mars 1990. Première inadéquation : alors que le permis de construire note deux terrasses, le procès verbal de visite de la commission de sécurité signale «un établissement destiné à recevoir environ 40 personnes en intérieur et 60 personnes réparties sur 3 terrasses.» Deux ou trois terrasses ? M. Delaunay a effectivement l'intention de construire une troisième terrasse, ce qu'il fait d'ailleurs rapidement, au niveau de l'entrée surélevée de la crêperie. Or, en août 1990, la mairie de Dinan lui demande d'effectuer permis de construire modificatif relatif à la construction de cette troisième terrasse, ces travaux n'étant «pas conformes au permis de construire». Mais Pierre Delaunay le reconnaît, «je n'effectue pas ce modificatif par négligence.»

Et la falaise s'éboule

L'affaire reste en l'état jusqu'en... février 1994. Dans la nuit du 26, se produit un éboulement de la falaise surplombant l'établissement et se situant sur des terrains appartenant au Conseil général mais loués par la Sous-Préfecture. Des gravats tombent sur l'une des terrasses. Pierre Delaunay assure, à ses frais (plus de 23.000 F), le déblaiement. En juin, la commission de sécurité visite l'établissement et son rapport enjoint le propriétaire de «régulariser la situation administrative de l'établissement par dépôt de permis de construire.» Le rapport interdit «l'ouverture de la terrasse au public dans l'état actuel» et préconise «une modification de sa superficie permettant de laisser une marge de sécurité en cas de chutes de pierres.»
P. Delaunay dépose alors un nouveau permis de construire régularisant son affaire en août 94, mais les démarches administratives traînent. Les travaux de consolidation de la falaise ne débutent qu'en juillet 1995, en pleine saison, pour se terminer en octobre de la même année. Pour autant, il faut attendre octobre 1996 pour que ces travaux de consolidation soient réceptionnés. Coût final, 2,5 M.F.
«Nous avons alors exploité l'affaire partiellement», souligne P. Delaunay. Car si les terrasses (80% du C.A.) demeurent interdites au public, l'intérieur de la crêperie reste ouvert. «En 93 nous faisions 675.000 F de C.A. En 94, 470.000 et en 95 rien. En 96, nous avons fait une tentative en salle. La perte d'exploitation s'élevait à 143 000 F.» Disposant de deux autres affaires à proximité, Pierre Delaunay enregistre, sur ces dernières, des pertes d'environ 30% du C.A. dues aux nuisances sonores entraînées par les travaux. Il les brade en 96 et 97.

Un ascenseur

Selon Pierre Delaunay, "le maire m'informe en octobre 96 qu'il n'y avait plus de réserve sur les travaux de consolidation de la falaise et qu'il soumettait mon nouveau permis de construire (déposé en juillet 95)." A cette époque, il existe désormais deux commissions : sécurité et accessibilité. La seconde donne un avis défavorable, l'établissement ne permettant pas un accès handicapés. Il faudrait construire un ascenseur (plus de 200 000 F) mais ce dernier doit répondre à des critères stricts, le secteur étant sauvegardé. Le maire accorde le permis de construire en janvier 97, mais précise, "les terrasses seront interdites au public." Pierre Delaunay demande une dérogation pour l'accessibilité qui lui est refusée. Le voilà donc devant le tribunal administratif de Rennes afin de casser ce refus d'exploitation.

Une tentative deconciliation

La justice ne devrait pas rendre un avis avant plusieurs années et «si nous n'ouvrons pas cette saison, nous fermons définitivement», lance P. Delaunay. Actuellement au chômage, un jeune couple s'est porté acquéreur. Il attend. Tout dernièrement, une tentative de conciliation a eu lieu en présence du nouveau sous-préfet, des services de la ville, de la DDE, de représentants des handicapés et du propriétaire. Selon Denise Benoît, secrétaire du maire de Dinan et ayant assisté à cette réunion, "tout le monde cherche à rouvrir l'établissement au plus vite. Le sous-préfet a déjà dérogé à deux reprises sur des problèmes liés à l'accessibilité." Une possibilité consisterait à créer trois places handicapés en bas. Pour ce faire, le propriétaire doit consentir à quelques travaux et déposer un énième permis de construire ! La bonne volonté semble toutefois de mise chez les différents intervenants.
Reste plusieurs questions en suspens : Pourquoi a-t-on délivré à l'origine un permis de construire pour un établissement situé à proximité d'une falaise ? Etait-il moins dangereux de s'installer sur une terrasse en 1990 qu'en 94 ? Pourquoi P. Delaunay a-t-il omis de réaliser un permis de construire modificatif ? Pourquoi l'accessibilité est-elle possible en 90 et plus en 97 ?

O. Marie


«Si nous n'ouvrons pas cette saison, nous fermons définitivement», lance Pierre Delaunay.


L'HÔTELLERIE n° 2570 Hebdo 16 Juillet 1998

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