Editorial
Assez !
La pilule est, pour le moins, très amère à avaler pour tous les
professionnels du tourisme ! Dans moins de 10 jours maintenant, la France accueille le
monde, et, au-delà de l'événement sportif, parfaitement maîtrisé par les
spécialistes, la Coupe du Monde est avant tout un très grand événement touristique.
Une aubaine dont tous les professionnels du secteur doivent pouvoir profiter. Bien
au-delà du remplissage des hôtels ou des restaurants pendant cette période, c'est
l'image de la France, de ses atouts touristiques, de son savoir vivre, de son savoir-faire
et de son savoir accueillir qui est en jeu. D'une manière générale, les hôtels, les
cafés et les restaurants se sont impliqués pour que cette opération soit réussie.
Certains n'ont pas hésité à investir, à innover. Le secteur ne doit son dynamisme
qu'à l'audace de ses acteurs petits et grands. Une audace d'autant plus méritoire qu'ils
deviennent aujourd'hui maîtres de la «navigation à vue». Comment prévoir, comment
gérer, quand les règles du jeu tant fiscales que sociales ne cessent de changer ? Pire,
comment réagir quand des conflits sociaux, mal maîtrisés par le gouvernement, mettent
tout simplement en péril les entreprises du secteur ?
Aujourd'hui, le tourisme retient son souffle et vit au rythme des interventions du
président d'Air France, du ministre des Transports et des Syndicats de pilotes. Une
situation d'autant plus inadmissible qu'elle était depuis plusieurs mois prévisible.
L'important n'est pas de savoir si la rémunération des pilotes est trop élevée, mais
plutôt de savoir comment l'Etat, qui a choisi de rester l'actionnaire d'Air France, fait
peu de cas de l'économie de ce pays et en particulier de l'activité touristique, pour
gérer ce conflit ! Une attitude qui irrite d'autant plus quand le secrétaire d'Etat au
Tourisme, au coeur de la grève, organise une conférence de presse pour présenter les
actions mises en place par son ministère pour la Coupe du Monde (la reconduction de la
Campagne Bonjour)... Réunion au cours de laquelle elle ne fait même pas allusion à la
grève en cours ! Un comble ! Est-ce si peu important ? N'était-elle pas au courant ou
pas autorisée par son ministre de tutelle, responsable de la situation, à évoquer ce
problème ? De toute évidence, la coupe est pleine et les acteurs du tourisme en ont
assez ! Assez de voir le peu de cas que les gouvernements successifs font du secteur du
tourisme, assez de constater que des régions entières dépendent de cette activité sans
pour autant en favoriser son développement, assez de constater que le portefeuille du
tourisme est celui que l'on donne en dernier, comme si l'on voulait rééquilibrer
certaines forces, assez de voir que le budget du tourisme est inférieur à celui de la
météo nationale.
PAF
L'HÔTELLERIE n° 2564 Hebdo 4 Juin 1998
