Le syndicat local a décidé d'utiliser tous les recours possibles pour s'y opposer. La
situation des professionnels locaux est en effet délicate : le taux d'occupation moyen
est estimé entre 37 et 42% pour les 800 chambres que compte actuellement le centre-ville
et dont le nombre augmenterait soudain de 20%.
L'inquiétude a été avivée lorsque s'est répandue dans la ville l'information selon
laquelle les investisseurs ayant acquis l'hôtel se réclamaient du groupe Accor et
allaient obtenir la franchise de l'enseigne Mercure. Au point que le président de la CCI
de Toulon a écrit la semaine dernière au président du directoire d'Accor pour lui faire
part de l'inquiétude suscitée.
Aujourd'hui, la société propriétaire -la Compagnie Toulonnaise d'Investissement et de
Développement, au sein de laquelle on trouve divers actuels ou anciens responsables
d'Accor- tente de calmer le jeu et souligne que les discussions avec ce groupe hôtelier
n'ont pour l'instant pas abouti. Elle souhaite bel et bien trouver une enseigne
commerciale prestigieuse mais se laisse un délai pour y parvenir. Elle n'en compte pas
moins rouvrir le plus tôt possible l'établissement, dans lequel elle a commencé à
réaliser des travaux dont le montant total devrait avoisiner les 10 MF, et en faire un
trois étoiles.
Construit en 1991, avec un cautionnement de la municipalité, l'Hôtel du Palais devait
fonctionner en partenariat étroit avec le palais des congrès qui venait lui aussi de
sortir de terre. Mais il n'a jamais réussi à dépasser un taux d'occupation de 20%.
Après quatre années de fonctionnement chaotique et moult péripéties, l'Hôtel du
Palais fermait donc ses portes. Il était finalement vendu aux enchères en février
dernier à un marchand de biens luxembourgeois, Philippe Moreno, au prix de 10,8 MF plus
les frais.
Celui-ci l'a cédé récemment, avec une plus value minimum, à une société
d'investisseurs spécialisés dans l'hôtellerie montée pour l'occasion : la Compagnie
Toulonnaise d'Investissement et de Développement (CTID).
Le capital de cette société anonyme a été apporté pour moitié par la Société
d'Exploitation et d'Investissement Hôtelier (SEIH), société où l'on retrouve à titre
personnel deux coprésidents du directoire d'Accor, Paul Dubrule et Gérard Pélisson.
L'autre moitié appartient à deux anciens cadres du groupe, soit en leur nom propre, soit
au nom de leur entreprise ; la Compagnie Financière Saint-Thomas pour Patrick Picourt,
ancien responsable du développement et du financement d'Accor ; Avenir et Développement,
pour Jean-Michel Beyrat, un autre familier du groupe. Le premier est le président de la
CTID -dont le siège sera prochainement localisé dans les murs de l'hôtel- et le second
en est le directeur général.
La CTID a signé un contrat de gestion avec la SEIH, qui vient d'ailleurs de recruter
le directeur de l'hôtel toulonnais, Freddy Cerda, actuellement directeur d'un Novotel de
la région parisienne. Il devrait prendre ses fonctions début juillet. «Nous avons
effectivement demandé à Accor de pouvoir être franchisé Mercure mais le groupe a pour
l'instant refusé car l'Hôtel du Palais n'a pas fait ses preuves», explique Claude
Normandin, directeur général de la SEIH. «Nous avons acquis un établissement que
nous estimons bien placé (proximité de l'autoroute et des départs ferry, grand parking
souterrain), et nous allons nous attacher à le développer, en mettant en place une
collaboration saine et efficace avec les hôteliers qui le désirent», poursuit-il.
L'entreprise, qui refait tous les équipements de l'hôtel et redéfinit le hall, la
réception et la restauration en y réaménageant notamment des salles de séminaires,
prévoit d'ouvrir une partie des chambres de l'hôtel d'ici l'été et de monter en
puissance d'ici la rentrée.
«Notre stratégie est simple et ne diffère pas de ce que nous faisons habituellement
avec l'aide de la SEIH : acheter des hôtels à prix abordables et leur apporter ensuite
un plus grâce à notre professionnalisme, explique de son côté Patrick Picourt. En
l'occurrence, pour développer notre hôtel toulonnais, nous comptons sur la présence du
palais des congrès qui est un très bel outil mais qui est sous-utilisé. Si nous
parvenons à développer l'activité de congrès à Toulon, cela apportera des retombées
à tout le monde.»
Mais cette bonne volonté n'exclut pas les tensions sur le marché toulonnais. Au
centre-ville, on compte pour l'instant trois établissements 3 étoiles, soit 230
chambres. L'Hôtel du Palais va accroître brutalement le parc de 65%. Et dans les
alentours on trouve, par ailleurs, deux franchisés Accor 3 étoiles : Novotel la Seyne et
Mercure Hyères qui ont, eux aussi, du mal à remplir. D'autant plus que, de son côté,
le Palais Neptune n'a toujours pas réussi à devenir un vrai lieu de congrès attirant
des manifestations d'envergure nationale.
L. Casagrande
L'HÔTELLERIE n° 2559 Hebdo 30 Avril 1998