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Eloge de la restauration parisienne

On lit des choses étonnantes dans le Figaro.... D'ordinaire mieux inspiré, le quotidien parisien n'hésite pas, sous le titre accrocheur des «vertiges aigres-doux de la restauration parisienne», de nous prédire la fin de nos belles enseignes qui résisteraient mal, mais oui ! à l'arrivée d'un restaurant anglais lancé par un ancien marchand de meubles qui fait fortune à Londres en ouvrant des endroits «à la mode». On aura vraiment tout vu, et il est dommage qu'un titre aussi prestigieux que le Figaro entame sa crédibilité avec des formules aussi creuses que : «Alain Ducasse, aigu comme un laser» pour ne citer que la plus anodine. On atteint toutefois les sommets de la cuistrerie contemporaine avec cette appréciation portée par un architecte, connu paraît-il, qui trouve «tarte» les restaurants parisiens, le critère de qualité dudit architecte étant... «qu'il décroche son portable pour soupirer...». Décidemment, si le fait d'utiliser un portable autorise à dire n'importe quoi, il y a de beaux jours pour les muscadins et merveilleux de ce fin de siècle. Essayons néanmoins de rester sérieux devant ce qui est peut-être un gag de plumitif en mal de notoriété. A qui fera-t-on croire que la transformation de l'Alcazar en restaurant à la sauce londonnienne va ébranler les fondements de la renommée de la capitale ? Paris est, et pour longtemps encore, le phare de la gastronomie mondiale, Dieu merci, et il ne faut pas se laisser déstabiliser par les propos du premier venu. Les restaurateurs parisiens ont d'autres arguments que ceux de «la mode» à faire valoir, et même s'ils ne sont pas tous des lecteurs assidus de Jean Guitton, ils se doutent bien « qu'être dans le vent, c'est avoir un destin de feuille morte».

Précisemment, les établissements parisiens «qui marchent» ont su traverser les modes plus souvent que n'importe quel chroniqueur dont l'existence est conditionnée par la pérennité de ces restaurants sur lesquels ils daubent avec autant de facilité. Il est vrai que la courtoisie n'est plus, elle non plus, à la mode. Enfin, il est extraordinaire de remplir une pleine page du Figaro sur la restauration sans écrire une seule fois le mot «cuisine». Il serait peut-être temps de revenir à la raison et ne pas oublier la fonction essentielle de la table. Les thuriféraires des enseignes britanniques sont sans doute dans le vent, mais ils n'ont guère de palais. Votre serviteur, à qui il arrive également de souscrire au phénomène de mode et de sortir des frontières, n'a pas gardé un souvenir ému des nourritures servies dans les adresses londoniennes. D'ailleurs, c'est bien connu, on mange bien à Londres dans les restaurants français. Chez les autres, on se montre... Que les chefs et patrons parisiens continuent à bien faire leur métier, avec pour seul juge leur clientèle qui apprécie la prestation qui leur est servie. A en juger par les taux de fréquentation, Paris reste encore Paris...

L.H.



L'HÔTELLERIE n° 2534 Hebdo 6 novembre 1997

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