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Actualité juridique
Licenciement pour faute grave

Il faut prouver la faute

L'employeur qui notifie un licenciement pour faute grave doit, en cas de contestation devant le conseil des prud'hommes, apporter la preuve de cette faute grave. Quels sont les moyens de preuve et que risque l'employeur s'il ne peut pas prouver cette faute ?

L'employeur qui procède au licenciement d'un salarié doit lui accorder le bénéfice d'un préavis et s'il justifie d'une ancienneté continue au moins égale à 2 ans, d'une indemnité de licenciement, sauf faute grave nous dit le code du travail. Dans cette dernière hypothèse, la rupture est en effet immédiate.

Sur la base de ce principe, les tribunaux (Cass. soc. 5 mars 1981) considèrent que l'employeur qui notifie un licenciement pour faute grave doit en cas de contestation du salarié devant le conseil des prud'hommes apporter la preuve de cette faute grave.

Qu'est-ce que cela signifie concrètement ?

Respecter la procédure

La charge de la preuve de la faute grave n'influence pas la procédure de licenciement. L'em-ployeur qui souhaite procéder à un licenciement pour faute grave, n'est aucunement tenu à des obligations en plus de celles applicables à tout licenciement.

Il doit comme pour toute procédure de licenciement pour motif personnel, convoquer le salarié à un entretien préalable par lettre recommandée avec accusé de réception (ou remise en main propre). Dans les entreprises n'ayant pas de représentant du personnel, l'entretien ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la réception de la convocation. Puis un jour franc après l'entretien, l'employeur notifie le licenciement par lettre recommandée avec accusé de réception. La lettre de licenciement doit contenir le ou les motifs du licenciement.

Lors de l'entretien préalable, obligatoire avant tout licenciement, il ne pourra être tenu d'apporter la preuve de la faute grave qu'il envisage de retenir à l'encontre du salarié. Certes, la notification du licenciement devra comporter l'énoncé précis du ou des faits imputables au salarié et constitutifs de la faute grave, mais il s'agit, ici encore, d'un principe s'imposant pour tout licenciement.

En aucun cas, pendant la procédure ou après dans l'attente de l'éventuel procès, le salarié ne pourra exiger de son employeur qu'il lui communique des éléments prouvant la faute (Cour d'appel, Rouen, 5 mars 1992). L'employeur n'est pas, à ce stade tenu de se justifier, il doit seulement informer le salarié lors de l'entretien préalable puis dans la lettre de licenciement, du ou des faits commis qu'il considère comme constitutifs d'une faute grave.

La preuve devant
les prud'hommes

Si la charge de la preuve ne modifie pas le déroulement du procès devant le conseil des prud'hommes, elle augmente cependant la tâche de l'employeur à cette occasion.

En effet, l'organisation traditionnelle et légale du procès devant le conseil des prud'hommes n'est pas modifiée en cas de contestation du salarié portant sur un licenciement pour faute grave.

Avant l'audience de jugement dans le cadre de l'échange obligatoire des pièces entre les adversaires, le salarié doit en sa qualité de demandeur saisissant la justice, communiquer en premier ses arguments et ses éléments de preuve à l'employeur. La pression émise par certains conseils, y compris des avocats, afin que l'employeur communique en premier ses preuves, ne saurait prospérer. L'employeur ou son conseil doit être vigilant et rappeler au conseil des prud'hommes, si ce dernier fixe des dates limites de communication entre les parties, qu'il appartient à celui qui demande, c'est-à-dire le salarié, de communiquer le premier (conformément à l'article 15 du NCPC et R.516-20-1 du code du travail).

Dans le même sens lors de l'audience de jugement, l'employeur ne peut être assurément contraint à plaider le premier. Là encore, il appartient au salarié demandeur de développer en premier son argumentation puis à l'employeur d'y répondre (art. 440 du NCPC).

A l'occasion de cette plaidoirie, en réponse, l'employeur se devra alors non seulement de démontrer le caractère justifié du licenciement ainsi prononcé, mais aussi d'apporter la preuve de la consistance de la faute grave.

Quels sont les moyens de preuve ?

A ce stade, l'employeur et lui seul devra apporter la preuve formelle de la faute ou de l'ensemble des fautes qu'il reproche au salarié et qui constitue à ses yeux une violation des obligations du salarié ou un manquement à la discipline de l'entreprise. Il devra surtout démontrer que cette faute reprochée au salarié est d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

L'employeur pourra à cette fin recourir à tous moyens de preuve. Il ne peut cependant utiliser des procédés de contrôle frauduleux, déloyaux ou clandestin, tels que la filature par un détective privé ou un enregistrement par une caméra dissimulée. Il pourra notamment produire des attestations sur l'honneur de témoin, un procès-verbal de constat d'huissier ou tout autre document officiel. Attention ! L'attestation de témoin doit respecter un certain formalisme pour être valable devant les tribunaux. Nous vous proprosons ci-contre un modèle de cette attestation.

Lors du procès prud'homal, l'employeur ne se trouve nullement placé sur le «grill» d'une justice le sommant de se justifier avant toute plaidoirie. Sa tâche consiste à répondre au salarié en apportant ici des éléments de preuve.

Que risque l'employeur qui ne prouve pas
la faute ?

Au terme des débats, lors de sa délibération, le conseil des prud'hommes va donc apprécier si les éléments de preuves fournis par l'employeur permettent de reconnaître l'existence d'une faute grave du salarié.

Si tel est le cas, le licenciement pour faute grave sera validé par le conseil des prud'hommes qui déboutera le salarié de ses demandes liées à la rupture de son contrat de travail. Si par contre le conseil considère qu'il n'y a pas faute grave ou qu'il subsiste un doute eu égard aux preuves fournies par l'em-ployeur, le jugement sera rendu au bénéfice du salarié. Celui-ci se verra reconnaître son droit à préavis et à indemnité de licenciement s'il a plus de deux ans d'ancienneté.

Si le salarié a réclamé également des dommages et intérêts pour licenciement abusif, le conseil ne pourra pas les lui accorder automatiquement. Désormais, il est clairement établi que l'erreur de l'employeur dans la qualification du licenciement ne doit pas systématiquement entraîner sa condamnation pour licenciement abusif. Le conseil des prud'hommes devra d'abord vérifier au regard des preuves fournies par l'employeur et le salarié si le licenciement est ou non fondé sur une cause réelle et sérieuse (Cass. soc. du 26 juin 1991).

L'échec de l'employeur dans sa tâche de rapporter la preuve de la faute grave n'a pour conséquence que de le condamner d'office au préavis et à l'indemnité légale de licenciement réclamés par le salarié.

La charge de la preuve de la faute grave n'a pour objet ni de dissuader l'employeur de prononcer un licenciement immédiat en l'entraînant dans une procédure difficile ni de le forcer en un quitte ou double quant à l'indemnisation du salarié en cas de contestation devant le conseil des prud'hommes ou de lui faire supporter une inquisition à cette occasion.

Le principe a simplement pour vocation à exiger de l'employeur qu'il prouve à l'occasion d'un contentieux prud'homal la faute grave qu'il a retenu à l'encontre du salarié lui permettant de prononcer un licenciement sans préavis ni indemnité.

Franck Trouet

SNRLH

Le témoin qui accepte de fournir une attestation est tenu de rédiger celle-ci à la main, de la dater, de la signer et d'y joindre la photocopie recto-verso de sa carte d'identité.

Pour que cette attestation soit conforme, elle doit comporter un certain nombre d'indications, conformément au modèle que nous vous proposons.

ATTESTATION

(article 202 du NCPC)

Je soussigné :

Nom, Prénoms :

Date et lieu de naissance

Domicile :

Profession :

(Indication, s'il y a lieu, du lien de parenté avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d'intérêts avec elles).

Atteste les faits suivants auxquels j'ai assisté ou que j'ai personnellement constaté (suivant le cas) : ...............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

Cette attestation est établie en vue de sa production en justice.

J'ai connaissance qu'une fausse attestation de ma part m'expose à des sanctions pénales.

A..................., le...................

Signature :

LA CHARGE DE LA PREUVE DE LA FAUTE GRAVE N'INFLUENCE PAS LA PROCÉDURE DE LICENCIEMENT.



L'HÔTELLERIE n° 2527 Hebdo 18 septembre 1997

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