Actualités


Cafés

Les buralistes en Ile de France

Aux problèmes de trésorie, s'ajoute l'insécurité

Michel Arnaud vient de prendre la succession de Marcel Valla à la tête de la Fédération des tabacs d'Ile de France. Ce fils de débitant, et débitant lui-même, depuis plus de vingt ans nous parle de ses projets à la tête du syndicat parisien et des difficultés que rencontre le secteur aujourd'hui. Entretien.

Propos recueillis par Sylvie Soubes

L'Hôtellerie :

Par quoi allez-vous démarrer vos nouvelles responsabilités syndicales, vous qui avez été président de la chambre syndicale des débitants des Hautes-Alpes et qui êtes également secrétaire général de la Confédération nationale des débitants ?

Michel Arnaud :

La chambre syndicale, grâce au travail de Marcel Valla à ce même poste, durant 18 ans, bénéficie d'une organisation structurée et reconnue. Je dois continuer dans ce sens, c'est évident. Personnellement, je suis un homme d'union. J'aime le travail en équipe et j'ai d'ailleurs demandé aux délégués (nous en avons 54 sur Paris/Ile de France) de m'accompagner, à partir de ce mois-ci, sur le terrain. L'objectif est d'organiser des réunions par secteurs pour rencontrer nos collègues et construire l'avenir sur des bases concrètes. Vous savez, le coeur du système n'est pas derrière un bureau mais bien sur le terrain.

L'Hôtellerie :

Vous l'avez déjà un peu démontré en amont des élections puisque vous avez visité, je crois, pas moins de 390 débits. Qu'est-ce qui ressort de ces rencontres ?

M. A.:

Les gens ont besoin de contacts, ils ont besoin qu'on les écoute et qu'on prenne en compte leurs craintes. Le problème de l'insécurité est l'une des grandes préoccupations à Paris. Il faut ajouter à cela les difficultés de trésorerie que rencontrent les buralistes. C'est un phénomène général et qui s'accélère depuis cinq ans. Deux raisons à cela : l'explosion du prix des tabacs (le prix moyen de la cigarette a augmenté de plus de 50%) et dans le même temps l'explosion de nouveaux produits. Nous devons commander pas loin de 1.000 références. Vous rendez-vous compte qu'un carton de cigarettes blondes approche les 5.000 F et qu'il ne rapporte que 400 F au débitant.

L'Hôtellerie :

Les difficultés de trésorerie sont-elles aussi importantes que ça ?

M. A.:

Nous, débitants, sommes pris en otages entre les interdits publicitaires de la loi Evin, la guerre des prix et le fait que ces hausses brutales réveillent un phénomène que nous ne connaissions pas vraiment en France, je veux parler des ventes illicites. La gestion du tabac est aujourd'hui un véritable casse-tête et les problèmes de trésorerie, comme je viens de vous l'expliquer, sont énormes. Il y a dix ans, nous avions la volonté de ne rater aucun produit. A l'heure actuelle, nous ne pouvons plus avoir la même approche. En ce qui me concerne, quitte à perdre quelques clients, je finis par limiter le nombre de références afin d'éviter une réelle désorganisation de trésorerie.

L'Hôtellerie :

Selon vous, que faudrait-il faire pour limiter les dégâts ?

M. A.:

Les débitants aimeraient revenir au paquet de 20 et c'est tout. Je souhaite, compte tenu de ce que je vois, de ce que j'entends et de mon expérience en tant que professionnel, qu'il n'y ait plus cette multiplicité de produits. Le marché n'évolue plus en volume et les fabricants se prennent des parts entre eux. Il ne faut pas oublier dans cette nouvelle approche du marché les conséquences sur le terrain. D'autre part, je voudrais qu'on nous laisse la possibilité, à l'intérieur de nos établissements, de faire la promotion des produits. J'admets qu'à l'extérieur des établissements, les choses soient différentes. Un point de vente est reconnu par l'Etat, le produit est licite. Il est quand même anormal que des groupes de pression puissent nous dicter ce que nous devons faire et pas faire à l'intérieur de nos établissements.

L'Hôtellerie :

Pourriez-vous évoquer le marché des cigares ? Peu de débitants offrent vraiment un choix de cigares haut de gamme. Ne peut-on pas améliorer les choses ?

M. A.:

Les cigares haut de gamme sont des produits nobles qui demandent des conditions de stockage et de commercialisation particulières. Là encore, il faut regarder l'aspect pratique. Si nous voulons assurer une diffusion correcte du produit, il faudrait revoir les conditions de vente. Ne nous cachons pas les yeux, il existe différents circuits pour acquérir ces produits, c'est même possible par Internet. En ce qui concerne notre secteur, on ne vend pas un cigare comme on vend une cigarette. Il faut du temps, une certaine connaissance du produit, un savoir-faire et de la place pour le conserver dans des conditions optimum. Investir coûte cher... La première chose à faire, selon moi, serait déjà d'essayer d'éviter l'évasion de vente des produits. J'espère sincèrement trouver des aménagements qui permettent de développer cette partie de notre profession.

L'Hôtellerie :

Qui sont les nouveaux buralistes ?

M. A.:

Il y a un peu plus de jeunes qu'à une certaine époque. Les nouveaux buralistes viennent du milieu commerçant, mais on trouve aussi un certain nombre de cadres d'entreprise qui veulent se lancer dans leur propre affaire. Sur la diversification de l'offre, la confiserie reste un produit intéressant. Sinon, la plupart des produits «cadeaux» sont en perte de vitesse. Dans l'ensemble, le tabac demeure un poste très valable pour le café. C'est réellement une valeur ajoutée, ce qui n'était pas le cas il y a une vingtaine d'années.

Michel Arnaud a repris il y a quelque temps un tabac sec à Paris. Et la limonade alors ? «Je voulais consacrer plus de temps au syndicaliste», confie-t-il.



L'HÔTELLERIE n° 2525 Hebdo 4 septembre 1997

L'Application du journal L'Hôtellerie Restauration
Articles les plus lus...
 1.
 2.
 3.
 4.
 5.
Le journal L'Hôtellerie Restauration

Le magazine L'Hôtellerie Restauration