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Au fil de la semaine

Tout fou tout foot

On n'a pas fini d'en entendre parler. De quoi ? Du Zaïre ? De la Palestine ? Du Timor-Oriental ? Du renouveau philosophique ? Du dernier roman de Joyce Oates ? Vous n'y êtes pas, mais alors pas du tout.

Du foot bien sûr, avec les finales de coupes d'Europe très proches, la reprise du championnat dès le mois d'août, et surtout, de la coupe du monde qui va tenir la planète en haleine, et plus particulièrement notre beau pays, dès le début de 1998.

Ça, c'est pour le côté sport en quelque sorte. Mais le foot a tellement de succès qu'il a suscité depuis quelques années des appétits qui n'ont que de lointains rapports avec la technique du 4-3-4 ou la reprise de volée. En fait, le foot est devenu un sport de fric, de magouilles, de corruption, de compromission et j'en passe.

A tous les échelons, c'est l'argent qui fait la loi, ce qui ne saurait laisser la profession indifférente, car elle est concernée.

Rappelez-vous les contorsions de nos chers députés, si soucieux de votre bien en ces temps de campagne électorale, pour faire passer le scandaleux «amendement buvette» après avoir tergiversé lamentablement pendant des semaines.

On nous avait expliqué à l'époque qu'il s'agissait de garantir les ressources aux «petits clubs» dont le rôle d'animation dans les lointains cantons n'est certes pas négligeable. Mais la ficelle devient un peu grosse quand on apprend que l'A.J.A., oui, le club de Guy Roux, l'ancien patronage du bon abbé Deschamps, s'est fait subtiliser la recette de la buvette réalisée lors de la dernière raclée d'Auxerre face aux joueurs de Dortmund. Montant du butin : plus de 200.000 F ! Vous en connaissez beaucoup des cafés d'Auxerre (ou d'ailleurs) qui font 200.000 F de chiffre d'affaires en moins de 3 heures ? Pourtant, lors de l'amendement buvette, on nous a doctement expliqué que ce texte ne devait concerner que les «petits clubs». Il va être content, Guy Roux, de cette appellation...

Mieux encore : vous avez vu la semaine dernière, l'éprouvante demi-finale d'Anfield Road, où le P.S.G. a arraché aux Red Devils la qualification pour la finale de la coupe des coupes ? Pris par le jeu, vous n'avez quand même pas manqué, et c'était le but de l'opération, de remarquer les maillots des joueurs siglés d'une grande marque de bière danoise. Plus de 10 millions de téléspectateurs au paradis de la loi Evin ! Bien joué, les Danois, et à quel prix ?

Mais le voile de l'hypocrisie vient d'être levé. Enfin, en partie seulement, et pour le bénéfice, à ce jour, d'un seul, mais un très gros. Le principal brasseur américain, pour promouvoir la célèbre Budweiser, a accepté de sponsoriser la coupe du monde de football de 1998 pour un montant de 100 millions de francs. Et pour ce prix, le gouvernement français a accepté de suspendre les contraintes de la loi Evin !

Vous trouvez cela scandaleux ? Vous considérez que les textes sacrés de la République, votés par la représentation nationale, mériteraient un sort moins désinvolte ? Vous à qui on applique sans faiblesse le moindre manquement aux réglementations les plus absurdes, vous trouvez cela incohérent, pour ne pas dire plus ?

Vous êtes dépassé, comme dans la chanson d'E. Mitchell. D'ailleurs, le même gouvernement (qui n'en a plus pour longtemps il est vrai) vient d'accorder de substantiels dégrèvements fiscaux aux revenus des vedettes du ballon rond.

N'essayez pas de devenir un as des fourneaux, un manager hors pair, un chirurgien exceptionnel ou un journaliste talentueux. Cultivez votre dribble, votre frappe de penalty, votre agilité dans la surface de réparation. Vous aurez droit à la reconnaissance, sonnante et trébuchante, de la République.

L.H.



L'HÔTELLERIE n° 2508 Hebdo 1er mai 1997

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