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Entretien avec Jean-Michel Couve

Les politiques ont un rôle à jouer

en matière de tourisme

Jean-Michel Couve est un parlementaire particulièrement impliqué dans le monde du tourisme, élu d'un des départements les plus touristiques de France, il est député du Var, rapporteur pour avis du budget du Tourisme de la commission production-échanges à l'Assemblée, mais aussi maire de Saint-Tropez. Sa position sur la politique du tourisme.

L'Hôtellerie :

Pensez-vous que le tourisme est, en France, reconnu à sa juste valeur sur le plan économique ?

Jean-Michel Couve :

«Absolument pas, c'est pour moi avant tout un problème d'ordre culturel. Nous sommes dans une société post-industrielle au sein de laquelle l'agriculture n'a de valeur qu'en tant que contrepoison et où il n'y a pas de reconnaissance pour les prestations de services parce que ça n'a jamais fait partie de notre culture. C'est la raison pour laquelle le tourisme n'est jamais reconnu. Il ne suffit pas de l'affubler du mot «industrie» pour le reconnaître, sur le plan politique, on a toujours considéré que le tourisme était secondaire ! Une attitude renforcée par le fait que très longtemps, c'était un secteur qui marchait ! Donc, l'Etat n'avait pas à s'y investir.»

L'Hôtellerie :

Vous pensez qu'aujourd'hui l'Etat doit investir ?

J.-M. C. :

«Absolument, mais pas n'importe comment et pas pour faire n'importe quoi. Sur le plan politique, heureusement, on est un certain nombre à défendre ce secteur et à y croire en matière de développement économique. Nous venons d'ailleurs de créer une amicale parlementaire de soutien à l'hôtellerie-restauration, c'est vous dire si nous sommes concernés. Je soutiens d'ailleurs tout à fait la politique de Bernard Pons qui a un discours clair et cohérent en matière de tourisme. Dans le cadre des restrictions budgétaires auxquelles j'adhère complètement, il fallait concentrer les efforts, c'est ce qui a été fait et c'est bien. Je salue d'ailleurs tout particulièrement le renforcement des délégations régionales, de l'AFIT et de Maison de la France, leur renforcement est essentiel dans la mesure où nous leur donnons les moyens de mieux vendre la France. Mais j'attends beaucoup de la préparation des schémas Etat-régions qui peuvent permettre une augmentation des crédits à terme.»

L'Hôtellerie :

Les entreprises du secteur rencontrent des difficultés financières qui souvent les empêchent de fournir une prestation de bonne qualité dans la mesure où elles n'ont pas les moyens de procéder à de réelles rénovations. Est-ce le rôle des politiques d'intervenir à ce niveau-là ?

J.-M. C. :

«Oui et à plusieurs niveaux. Je prendrai pour exemple ce qui se passe dans notre région. La région Paca monte vraiment en pression avec des moyens et une politique intelligente. Des aides à la modernisation, à la mise aux normes ont été votées. On ne peut que regretter le fait que le préfet ait dénoncé la mise en place de ces subventions (voir L'Hôtellerie n° 2505 p. 4), pour nous, sur le plan du Var, ce rejet a été d'autant plus discriminant pour les hôteliers que nous n'avons pas pu mettre en oeuvre les bonifications de prêts qui avaient été décidées parce qu'elles étaient liées à la subvention régionale. J'espère que la région arrivera tout de même pour l'année 1997 à régler le problème avec une convention Etat-région, mais ces subventions ne régleraient que les problèmes de nouveaux investissements sans pour autant régler ceux de la renégociation des prêts. Un grand nombre de professionnels est lourdement pénalisé par des charges financières insupportables pour leurs entreprises dans la mesure où ils ont emprunté à des taux d'intérêt très élevés et que les banques ne sont pas souvent d'accord pour renégocier.»

L'Hôtellerie :

Comment les collectivités locales peuvent-elles intervenir ?

J.-M. C. :

«Nous étudions la possibilité pour les collectivités régionales d'intervenir au niveau de l'hôtellerie indépendante à travers une bonification qui permettrait justement de compenser les taux élevés des emprunts contractés. Mais actuellement, nous n'en sommes qu'au stade de la réflexion.»

L'Hôtellerie :

Quelles autres interventions politiques pourraient aider le secteur ?

J.-M. C. :

«Il faudrait aller jusqu'au bout en matière de lutte contre le paracommercialisme déjà ! En tant que maire, j'attends avec impatience le décret imposant la déclaration obligatoire des meublés. Ça nous permettrait déjà de mieux maîtriser l'offre touristique en qualité et d'imaginer rapidement une labellisation qui favoriserait l'élimination des mauvais produits, mais aussi pour les communes touristiques, ce serait une nouvelle source de richesse à travers la taxe de séjour qu'actuellement seuls les clients des hôtels payent. Ce serait une concurrence déloyale de moins envers les hôteliers. Une action qui a été menée à bien devrait permettre dans quelques semaines d'apporter des opportunités nouvelles à l'hôtellerie-restauration en plus d'avoir une valeur sociale importante, c'est la mise en place des chèques-vacances. Mais c'est aussi à travers les départements que la volonté politique s'exprime : le Var, depuis 7 ans, a pris son tourisme en main. Un budget annuel de 42 millions de francs est alloué par le Conseil général, nous avons un des CDT les plus dynamiques de France et qui a entraîné un très grand nombre de professionnels, de responsables syndicaux. Tant et si bien que certains trouvent même que ça va trop vite ! 75% des hôtels sont ouverts en hiver dans le Var et nous avons mené une action Var-hiver pour justement sortir de l'idée tourisme balnéaire. Nous avons le golf, le tourisme d'affaires, la santé à vendre.»

L'Hôtellerie :

Et votre analyse sur le tourisme tropézien ?

J.-M. C. :

«Nous avons un projet de contrat de station, mais ce qui est essentiel dans notre réflexion, c'est de toujours faire en restant à dimension «village». Saint-Tropez est connue dans le monde entier, c'est un atout considérable, mais nous continuons à vendre le Saint-Tropez des années 60 alors que cette période est terminée, les stars viennent toujours pour y retrouver cette ambiance alors que nous n'avons plus les figures tropéziennes de l'époque... Nous manquons un peu de relais, aussi est-il essentiel d'apporter autre chose. Nous sommes en train de réaliser l'équipement du bassin avec des bornes branchées sur le réseau d'assainissement, c'est une réalisation unique, nous serons les premiers en Europe. Saint-Tropez doit toujours mener des actions entre tradition et modernité. C'est notre ligne de conduite».

Propos recueillis par P.A.F.

Jean-Michel Couve : «Nous étudions la possibilité pour les collectivités régionales d'intervenir au niveau de l'hôtellerie indépendante à travers une bonification qui permettrait justement de compenser les taux élevés des emprunts contractés.»



L'HÔTELLERIE n° 2506 Hebdo 17 avril 1997

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