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«La Perle de Prague» à Prague

Premier restaurant gastronomique français

Longtemps un des principaux agents d'une grande maison de champagnes et de spiritueux, Bernard Palix s'est trouvé un jour sur le pavé, à la cinquantaine, à la suite d'une restructuration de sa société et d'une compression des effectifs. Habitué des palaces et des restaurants de luxe, ce Valentinois avait toujours rêvé de créer sa propre entreprise. Aussi, avec un... retraité lui aussi en partie retiré des affaires, le maître-cuisinier Georges Achini des "Mésanges" à Montbonnot près de Grenoble, passionné d'art culinaire et de formation, il vient de créer «La Perle de Prague» premier restaurant panoramique et gastronomique français d'un projet de chaîne d'établissements haut de gamme en Europe centrale.

D'entrée, nos Dauphinois bientôt rejoints par Claude Richard, ancien premier maître d'hôtel du restaurant Pic à Valence et le jeune chef Emmanuel Ruz ont frappé un grand coup en choisissant un site en plein coeur de Prague, au bord de la Vltava (Moldau) : le sommet d'un immeuble asymétrique qui divise les Pragois et qui jouxte la maison -traditionnelle- du président de la République tchèque, l'écrivain et dramaturge Vaclav Havel. Conçu par l'architecte américain Frank O'Ghery, un des deux corps de ce bâtiment aux ouvertures décalées est censé représenter les jambes fameuses de Ginger Rogers, la célèbre partenaire de Fred Astaire, née dans l'ancienne capitale de la Bohême.

Le promoteur, une compagnie d'assurances néerlandaise cherchait un groupe d'investisseurs «du métier» pour faire marcher un restaurant panoramique de verre et d'acier aux deux derniers étages de l'immeuble, accessible par un ascenseur direct. Michel Rostang, le Sassenageois bi-étoilé de Paris, «refila le tuyau» à son ami Palix qui fonda du coup la Sofires, Société financière de restauration.

Chiffre d'affaires :
20 millions

De fait, Bernard Palix a su et pu s'entourer de professionnels, tant du côté des équipementiers -tous français- que du côté des chefs dont une douzaine va se succéder à Prague pour créer chaque mois un événement gastronomique en changeant les menus.

La société INC des Pays-Bas a consenti un prêt de 4,5 millions remboursable en dix ans sur un investissement total de 7,3 millions. Aucune banque française, nationale ou régionale, n'a voulu prêter un centime. La différence a été assurée par des amis et fournisseurs dont, dans la région Rhône-Alpes, les chefs Gilbert Battard, Gérard Besson, Jean-Paul Borgeot, Guy Lassaussaie, Christian Métral, etc., ainsi que les firmes chambériennes Teca (cuisines) et Gusmerini (bar, mobilier).

Le décorateur est celui-là même qui a dessiné la vaisselle, les menus et les documents du restaurant Michel Rostang : Régis Dho. Et si le législateur tchèque impose un gérant de même nationalité, Petr Stepanek, tout l'encadrement et le matériel sont français.

Pour Bernard Palix, le taux de croissance à deux chiffres dans les pays industrialisés occidentaux n'est plus possible, notamment en France, mais dans les pays de l'Europe centrale à l'économie désormais en partie libérale et concurrentielle, si. «La montée en charge de «La Perle de Prague» est prévue sur cinq ans et le chiffre d'affaires prévisionnel de 20 millions de francs.»

Déjà 65 couverts par jour

Pour Georges Achini, qui a déjà effectué quatre séjours de vingt à trente jours, contrôleur de la qualité pour la cuisine, les difficultés sont de deux ordres. Pour les ingrédients, d'abord, et notamment les légumes frais dont il a fallu trouver des filières d'approvisionnement dans un pays anciennement collectivisé où la nourriture industrielle, sur les plans des goûts et des saveurs, a déjà fait des dégâts considérables. Pour le personnel ensuite, dont la formation des... mieux formés doit pratiquement être reprise à zéro. En ce moment, les chefs de partie sont français, de Henri Gaonac'h à Michel Paray, chef pâtissier. Et au bar, officie le petit-fils de Georges, Laurent Battard, avec son BTS tout neuf obtenu à Grenoble.

C'est à cause de ces difficultés que l'entreprise tourne actuellement à 30% de sa capacité de 150 couverts. Le prix moyen d'un repas est d'environ 1.500 couronnes (300 F), ce qui peut paraître peu cher pour un repas de cuisine traditionnelle française, mais fort élevé pour le Tchèque moyen. Mais une classe favorisée, née de l'essor économique, industriel et commercial de la Tchéquie nouvelle, représente déjà 10% de la population.

Voisin et client :
Vaclav Havel

Le «Dancing Building» -dont à l'intérieur Régis Dho a respecté le style en déstructurant une partie du mobilier et du décor au demeurant très confortable- oppose, on s'en doute, les tenants du patrimoine traditionnel et les modernistes de l'architecture : cela n'a pas nui à l'engouement actuel des gourmets pragois pour leur «Perle de Prague».

En voisin, le président Vaclav Havel est venu visiter à la fois l'immeuble aux «jambes controversées» et les installations du restaurant. Le jour de l'inauguration, plusieurs de ses ministres sont venus respirer là haut, au-dessus des toits de Prague dominés par le château, un petit air de France - les vins, champagnes compris, provenant tous de notre pays.

Il reste désormais à pérenniser les bons résultats obtenus en trois mois. Mais tant à la Sofires créée par Bernard Palix et dont le Président-directeur général en France est Paul Lévy qu'au sein des très nombreuses sociétés financières européennes lorgnant vers l'Est, la «Perle de Prague» donne des idées et des études seraient en cours pour développer un collier passant par Budapest, Varsovie, Sofia, Dresde et Leipzig...

C. Bannières

«Le Dancing Building» en hommage à la star Ginger Rogers originaire de Prague.

La salle de restaurant.

De gauche à droite, Petr Stepanek, Bernard Palix, fondateur de la Sofires et Paul Levy, Président-directeur général. Debout : Claude Richard.



L'HÔTELLERIE n° 2498 Hebdo 20 fevrier 1997

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