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Restauration
Bocuse d'Or 1997

Un souffle venu du Nord !

Le Suédois Mathias Dahlgren a remporté le Bocuse d'Or. A Lyon, il a devancé le Belge Roland Debuyst et le Norvégien Odd Ivar Solvold. Ce tiercé gagnant confirme la montée en puissance des cuisines des pays nordiques...

Textes et photos Jean-François Mesplède

«Ce résultat n'est guère surprenant. Depuis quelques années, nous avions remarqué le bond en avant des pays scandinaves, qui savent travailler en équipe et respecter la tradition. La cuisine française reste encore influente, mais ces pays font un travail formidable.» En quelques mots, Paul Bocuse a ainsi rendu hommage au vainqueur de ce «Bocuse d'Or» du dixième anniversaire.

Initiateur du concours le plus médiatisé du monde, il est satisfait de la tournure prise par les événements. «Les candidats ont compris que nous voulions qu'ils réalisent la cuisine de leur pays et que leurs plats traduisent leur culture. Le niveau général est en hausse sensible et certains pays doivent même avoir recours à des éliminatoires pour désigner leur meilleur candidat», poursuit-il.

Ce fut le cas aux Etats-Unis avec trois épreuves en Californie, Floride et dans l'Etat de New York. Mais aussi en Suède, où une dizaine de candidats postulaient au voyage à Lyon avant que le jury, présidé par Werner Vogeli, ne désigne Mathias Dahlgren.

«Ce concours est très populaire chez nous et Melker Andersson vit encore sur la lancée de sa deuxième place de 1995», explique le président du jury suédois. «Le succès de Mathias Dahlgren est formidable pour ce garçon qui vient tout juste d'ouvrir son restaurant. De nombreux journalistes étaient présents à Lyon et sa victoire aura un énorme retentissement (1). Il s'est longuement entraîné et j'ai goûté ses plats une dizaine de fois... mais c'est lui qui a choisi la ligne générale de son travail.»

A Lyon, confirmation a été donnée qu'une victoire au Bocuse d'Or ne relevait pas du hasard. A l'instar des Jeux Olympiques, cette compétition de haut niveau où les candidats évoluent devant le public, se prépare avec soin.

Pour mettre un maximum de chances de son côté, Mathias Dahlgren avait choisi de peaufiner sa préparation à... Saint-Bonnet-le-Froid chez Régis Marcon, lauréat 1995 !

«Il voulait surtout trouver le calme et se préparer psychologiquement. Je lui ai donné très peu de conseils, car à ce niveau, cela ne servirait pas à grand-chose. Il a préparé ses fonds de base comme il en a le droit et nous avons mis quelques détails au point», explique le président du jury 1997.

Comme tous les observateurs, le Français a noté une progression sensible du niveau d'ensemble et le formidable enthousiasme suscité par un tel concours. Deux jours durant, dans des gradins pleins à craquer et sur fond de crécelles, tambours et chansons, les supporters ont encouragé les candidats comme pour une compétition sportive !

«Nous avons vu du beau travail et quelques plats fantastiques. On gagne dans la beauté, le goût et la précision», insiste Régis Marcon.

«En deux jours, les pieds sous une table, nous avons fait le tour du monde et c'était passionnant de découvrir toutes ces cultures. La victoire de la Suède est méritée. Le travail était très soigné avec beaucoup de précision dans les cuissons et de justesse dans les assaisonnements», complète Michel Bras, qui remarque pourtant qu'il «ne faut pas confondre la cuisine de concours avec celle de tous les jours qui doit être empreinte de davantage de spontanéité».

Un médaillon de dos de cabillaud (le Skrei de Norvège), cuit à la vapeur, glacé de moutarde et présenté sur une poêlée de ventre et langue de cabillaud et de noix de Saint-Jacques. Un jambon de trois façons (flanc rôti au four et glacé au poivre blanc, jarret présenté en rillette avec racines comestibles et herbe, rouleau farci de viande de pied de porc et de pistaches parfumé aux brisures de truffes) : ces deux plats ont permis à Mathias Dahlgren de s'imposer.

«Sa cuisine est imprégnée de quelques influences espagnoles, mais reste traditionnelle car nous avons chez nous de très bons produits, poisson et gibier (2) en particulier», souligne Werner Vogeli.

«Sa victoire est aussi celle d'une équipe. Cette prédominence des pays nordiques n'est pas le fait du hasard. Les cuisiniers sont solidaires et savent travailler en équipe. Ils voyagent dans le monde entier, mais restent soudés, se préparent ensemble et arrivent à dégager une identité culinaire. C'est peut-être le message qu'il faut retenir de ce Bocuse d'Or. Pourquoi ne pas imaginer de nous rassembler pour ce concours autour d'une équipe de France de cuisine ?», insiste Régis Marcon. L'appel est lancé !

(1) La délégation suédoise ne comptait pas moins de 200 membres qui ont dignement fêté le succès de leur «poulain».

(2) Membre de l'équipe de Suède de cuisine lors de compétitions à Luxembourg, Chicago et Berlin, Mathias Dahlgren s'était vu attribuer en 1991 le titre de «chef de l'année» pour le gibier.

Mathias Dahlgren vient d'apprendre son succès.

Un homme heureux et ému !

Le podium du Bocuse d'Or 1997 : Mathias Dahlgren

(au centre) a devancé Roland Debuyt (à gauche)
et Odd Ivar Solvold (à droite).

Régis Marcon transmet le trophée à Mathias Dahlgren, Paul Bocuse Apprécie...

UN TIERCÉ DU NORD !

Suède-Belgique-Norvège : inédit par les pays concernés, ce tiercé nordique n'est pas une première puisqu'en1993 la Norvège, le Danemark et la Belgique avaient terminé dans cet ordre.

Cette année, le Suédois Mathias Dahlgren s'est donc imposé avec un total de 595 pts (306 pour le plat de viande et 289 pour le plat de poisson), devançant le Belge Roland Debuyst 566 pts (290-276)

et le Norvégien Odd Ivar Solvold 560 pts (266-294).

Première victoire, mais deuxième podium pour la Suède, Melker Andersson avait été le dauphin de Régis Marcon en 1995.Depuis 1987, et sauf en 1995, le candidat belge a toujours pris place sur le podium :

à la deuxième place en 1987 (Michel Addons) et 1989 (Pierre Paulus) ; à la troisième en 1991 (Gert Jan Raven) et 1993 (Guy Van Cauteren). Les Norvégiens étaient

déjà montés sur la première -Bent Stiansen en 1993- et la deuxième marches -Lars Erik Underthun en 1991- du podium.A Lyon, la Mexicaine Isabela Dorentes a remporté le prix de la «meilleure organisation», l'Allemand Rolf Straubinger le prix «poisson» et le Hollandais Hein A.J.Willemsen le prix «viande».

Pigeon et Saint-Jacques seront au menu des candidats pour le prochain Bocuse d'Or qui se déroulera les 26 et 27 janvier 1999.

MATHIAS DAHLGREN, NÉ À STORLIDEN
EN 1969...

Le 10 mars prochain, Mathias Dahlgren fêtera dignement son 28ème anniversaire, et nul doute que le Bocuse d'Or sera tout près du gâteau d'anniversaire.

Né à Storliden, une petite bourgade à 750 km au Nord de Stockholm, il a fréquenté l'Ecole de restauration d'Umea et travaillé en Espagne et dans plusieurs restaurants de la capitale suédoise. C'est là, à l'enseigne du «Bon Lloc» qu'il vient tout juste d'ouvrir sa propre maison où son commis à Lyon -Nicolas Diamantoglou, «ancien» du restaurant Copenhague à Paris- l'épaulera.



L'HÔTELLERIE n° 2496 Hebdo 6 fevrier 1997

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